Le 11 novembre 2004, disparaissait Yasser Arafat. Il avait 75 ans. En ce 7e anniversaire de son décès, il paraît normal que l’on se souvienne de l’homme dont le destin est intimement confondu avec celui de sa patrie, la Palestine.

Dr Salem Sahli


Que retenir de l’homme au keffieh ? Les souvenirs foisonnent et nous allons tenter d’y mettre de l’ordre.

La première image qui vient à l’esprit est celle d’Abou Ammar à la tribune des Nations Unies, en novembre 1974, exhortant la communauté internationale à ne pas faire tomber le rameau d’olivier de sa main gauche. Car de l’autre main, il portait son fusil de révolutionnaire.

Homme de dialogue… intransigeant

En 1982, nous avons tous en mémoire l’image des forces palestiniennes contraintes d’évacuer Beyrouth assiégée par l’armée israélienne. A l’invitation du président Bourguiba, Arafat accepte d’établir à Tunis le siège de l’Olp. Il échappa de justesse à la mort lors du bombardement par l’armée de l’air israélienne de son quartier général à Hammam-Chott, au sud de Tunis, le 1er octobre 1985.

En 1994, c’est le retour triomphal en Palestine et le partage du prix Nobel de la paix avec Itzhak Rabin et Shimon Pérès en récompense des nombreuses années de négociation et la signature à Washington des accords de paix d’Oslo. Tout le monde se souvient de la poignée de main historique avec le Premier ministre israélien Itzhak Rabin.

Hélas, après une période d’euphorie, il fallait rapidement déchanter et les espoirs nés des accords d’Oslo se sont vite évaporés. D’ailleurs, leurs applications butent encore aujourd’hui sur l’intransigeance d’Israël, la division du camp palestinien et l’hypocrisie des grandes puissances.

C’est Ariel Sharon, celui-là même qui en 1982 avait juré de tuer Yasser Arafat, qui sonna le glas des accords d’Oslo auxquels il a toujours été opposé.

En septembre 2001, il déclare à l’adresse d’un G. W. Bush obnubilé par sa guerre contre le terrorisme : «Nous aussi, avons notre Ben Laden».

Bill Clinton et Ehud Barak n’ont jamais pardonné à Arafat son refus de signer, en 2000, à Camp David, un accord qu’il jugeait injuste et en-deçà des attentes de son peuple. Il va payer très cher son refus du diktat israélo-américain. Yasser Arafat va passer les dernières années de sa vie confiné dans la Mouquataâ, son quartier général à Ramallah, encerclé par l’armée israélienne avec la complicité honteusement passive des occidentaux.

Il a ramené son peuple à la visibilité

Il est mort le 11 novembre 2004 en n’ayant rien cédé sur les droits fondamentaux de son peuple, pas plus sur le droit de disposer de Jérusalem comme capitale, que sur le droit de retour de son peuple dans sa patrie d’origine. Yasser Arafat n’a certes pas réalisé son rêve : voir le drapeau palestinien flotter sur Al Qods, mais il aura réussi à «ramener son peuple à la visibilité» et «imposé la tragédie du peuple palestinien au cœur de l’attention internationale»*.

L’homme au keffieh s’est éteint. Il laissera derrière lui le souvenir d’un leader charismatique qui a mené le combat des siens sans jamais courber l’échine. Il porta sur ses frêles épaules la cause la plus médiatique de la fin du siècle passé. Même vieillissant et fragilisé, il se sentait pourtant fort de l’amour et du soutien de son peuple. Dans les moments difficiles, pour se consoler peut-être, il aimait à conclure ses discours par la formule désormais célèbre : «Ya Jbal, ma yhezzek Rih» (Ô montagne, ce n’est pas le vent qui te fera vaciller !).

* Elias Sanbar, historien palestinien et rédacteur en chef de la ‘‘Revue des études palestiniennes’’.