Une année après la révolution de la dignité, hommage à ces jeunes qui ont pris tous les risques avant de se voir doublés à l’arrivée par des opportunistes religieux qui se sont accaparés leur révolution.
Par Rachid Barnat
Vu un documentaire à la chaîne Al-Jazira, dans le cadre de l’anniversaire des révolte arabes, je suppose, pour lequel le réalisateur a retrouvé les premiers jeunes qui ont filmé les évènements et les ont mis en ligne sur les réseaux sociaux, pour les diffuser au plus grand nombre ; puisque les médias officiels n’en parlaient pas. Ce faisant, ces jeunes prenaient beaucoup de risque. Dont certains le payeront de leur vie.
Ainsi, le réalisateur a-t-il pu retrouver les jeunes dont les vidéos filmant les évènements graves, qui se passaient chez eux et sous leurs yeux, ont fait le tour du monde.
La réalisatrice de fortune
Le soir du 14 janvier 2010, un homme ivre de bonheur, crie sa joie d’être libéré du tyran qui a quitté comme un voleur le pays dans l’après-midi, pendant qu’une foule de plus d’un million et demi de Tunisiens rassemblés dans l’avenue Habib Bourguiba, demandaient qu’il «dégage» !
L’homme ivre de bonheur parcourait une avenue Habib Bourguiba déserte, ce qui donnait plus d’écho à son cri solitaire dans la nuit. La police bien, que présente, n’a pas bougé. Impressionnant !
Il ne se doutait pas qu’une jeune fille, bouleversée par le spectacle qu’il donnait de son ivresse, le filmait de son balcon, sur son téléphone portable... Vidéo qui bouleversera tous les Tunisiens et bien au-delà, tous ceux qui l’ont vue et surtout entendu ce cri déchirant.
Le réalisateur a interviewé la jeune fille «réalisatrice» de ce moment bouleversant, comme il a retrouvé aussi le jeune homme «ivre» de joie, l’avocat Naceur Laouini, filmé à son insu. L’une et l’autre en sont encore bouleversés et sont étonnés de leur audace.
Faire comme les Tunisiens
Un jeune égyptien, voyant ce qui se passait en Tunisie, a dit à ses copains de faire comme les Tunisiens. Ses amis l’en dissuadaient n’y croyant pas. Sans trop y croire, il va quand même ameuter ses amis sur Facebook pour les exhorter à sortir pour manifester pacifiquement contre le régime en place. De sa fenêtre et à son grand étonnement, il voyait la place Tahrir se remplir petit-à-petit de jeunes venus manifester contre le régime du tyran.
Là aussi, le réalisateur a retrouvé les premiers instigateurs de la révolution égyptienne, «réalisateurs» de l’Histoire grâce à Internet et à leurs téléphones portables.
De même, le réalisateur de l’émission retrouvera les jeunes syriens et les jeunes yéménites qui étaient eux aussi à l’origine du départ de la révolution dans leur pays.... n’utilisant toujours que les réseaux sociaux : Internet, Facebook, Twitter, et leur téléphone portable pour filmer...
Le plus bouleversant dans cette émission, c’est le jeune libyen qui a voulu, à lui seul, et astucieusement, créer une sorte de TV pour contrer la TV officielle et ses discours mensongers.
Grâce à une webcam et à un micro bricolé avec un verre en plastique, il exhortait les Libyens à se révolter et les appelait à libérer le pays du tyran... toujours en anglais pour que son message soit entendu dans le monde entier. Et il le fut.
Mais voilà, la police du tyran a repéré son lieu d’émission et l’a assassiné...
Ceux qui le suivaient en direct s’étonnaient de voir une image fixe et de ne plus le voir ni l’entendre sur leur PC... jusqu’à ce que sa femme en pleurs reprenne le micro pour annoncer la mort de son mari et pour exhorter ses auditeurs à poursuivre son combat jusqu’à la libération de la Libye de son tyran !
Bel hommage à ces illustres jeunes inconnus qui ont fait preuve de beaucoup de courage !
Et dire que tous ces jeunes avec tous les risques qu’ils ont pris se voient doubler à l’arrivée par des opportunistes religieux qui se sont accaparés leur révolution !
Alors qu’à aucun moment, ni eux ni ceux qui sont morts lors de leur révolte dans les rues contre leur tyran, ne l’ont fait au nom d’Allah. Ne scandant et réclamant que LIBERTÉ, DIGNITÉ et TRAVAIL !
Mais semble-t-il, qu’il en est toujours ainsi des révolutions : il y a ceux qui les font et il y a ceux qui en profitent... mais ce ne sont jamais les mêmes !
Est-ce une fatalité ? La révolution tunisienne première en son genre, ne peut-elle, là aussi démentir cette «évidence» ?
Aux Tunisiens d'en décider.