Rafik Souidi écrit – Les classements internationaux pour l’année 2011 en ce qui concerne la présence des universités tunisiennes sur le web sont tout simplement désastreux. Il faut renverser la tendance.
En effet aucun établissement n’est mentionné parmi les cent premières universités en Afrique et seulement deux parmi les cent premières du monde arabe !
La première université tunisienne se classe au rang 3.326 sur le plan mondial et la seconde au rang 6434...
Pour une remise en cause radicale
Quant on sait que plus de 25% des diplômés universitaires sont condamnés au chômage de longue durée, on mesure la débâcle de l’enseignement supérieur en Tunisie et sa dégradation abyssale lors des vingt dernières années.
Une prise de conscience lucide et une remise en cause radicale s'imposent.
Tout d’abord, il conviendrait de privilégier dorénavant la qualité en lieu et place de la quantité.
Comme pour bon nombre de secteurs, les responsables se sont essentiellement attachés à produire des statistiques et ils ont négligé la qualité des services rendus. Ainsi c’est l’employabilité des diplômés qui est en cause au même titre que leur adéquation aux besoins du marché du travail.
Il serait judicieux de détacher quelques universités du lot et d’en faire des établissements pilotes avec une sélection rigoureuse à l’entrée via des concours, une dotation conséquente en moyens humains et matériels et en associant étroitement les entreprises ou la haute administration à l’élaboration des cursus.
Des partenariats avec de prestigieuses universités internationales seraient également envisageables.
Ces universités-pilotes seraient payantes et les banques devraient accorder des prêts bonifiés aux étudiants de même que l’Etat devrait pourvoir des bourses aux plus démunis. La réussite des lycées-pilotes en Tunisie est indéniable et il serait pertinent d’étendre l’expérience à l’enseignement supérieur.
Privilégier l’ingéniorat
De plus, une spécialisation accrue des établissements est à préconiser selon les secteurs économiques stratégiques du pays. En particulier, il s’agirait de multiplier les écoles d’ingénieurs spécialisées car le défi industriel et technologique est celui que la Tunisie doit relever à l’avenir.
Enfin, l’esprit d’entreprise est à inculquer en amont aux futures générations et tout étudiant devrait avoir l’option de s’engager dans une année d’entrepreneuriat avec l’accompagnement adéquat d’un «parrain» ou «sponsor» et qui consisterait à élaborer un business-plan crédible en vue de réaliser un projet. Il est grand temps d’en finir avec les réflexes d’assistanat qui se sont malheureusement propagés dans la société tunisienne.
Dépolitiser l’université
Par ailleurs il serait salutaire de dépolitiser l’université tunisienne. Si la police universitaire doit être à l’évidence abolie, il en va de même pour les syndicats étudiants, gauchistes ou islamistes, qui n’ont plus de raison d’être dans une démocratie où chacun est libre de s’engager dans un des innombrables partis politiques. Que les étudiants aient des représentants élus dans les organes de décision des établissements est à encourager, qu’ils fassent de la politique sur le campus et qu’ils en viennent aux mains et aux insultes est complètement rédhibitoire et absurde ; plus encore pour les postures dogmatiques et idéologiques de certains doyens d’universités comme on l’a vu dans l’affaire du niqab à la faculté de la Manouba où le pragmatisme aurait dû l’emporter. Si la prestigieuse université de Cambridge le permet alors celle de la Manouba aurait du trouver une solution pratique pour cet épiphénomène. Il est vrai que l’université de Cambridge, excusez du peu, n’est classée que première au Royaume-Uni et seulement seizième dans le monde...