Ali Gargouri* écrit - Tout va bien et «le pays fonctionne à 90%», comme l’a affirmé le président de la République par intérim Moncef Marzouki sur une radio française. Sauf que les contestations ne baissent pas dans tout le pays.
Depuis les élections, et dans l’attente de la formation du gouvernement qui a pris plus que deux mois, les Tunisiens, en attente de solutions radicales et de messages rassurants sur leur avenir, ont entrepris plusieurs actions de contestation en région comme dans la capitale, et cela se poursuit, voire s’accélère depuis que la nouvelle composition du gouvernement a pris fonction il y a bientôt un mois.
Depuis le lundi 16 janvier 2012, la situation du pays est très préoccupante, et voici quelques éléments alarmants recueillis à travers les titres de médias électroniques tunisiens :
1. Affrontements entre étudiants Uget et milices Ennahdha à la Faculté de Sousse (3 blessés) ;
2. A la Faculté de la Manouba, on annonce le début d'une grève de la faim conduite par des étudiantes en niqab pour demain ;
3. Des chômeurs bloquent la route menant de Soliman au niveau de Borj Cedria ;
4. Poursuite du sit-in des familles de blessés de la révolution à la Kasbah ;
5. Grève générale à Makthar, Kesra et Sidi Bourouis en protestation contre l’exclusion et la marginalisation de la région ;
6. A Jebeniana la population manifeste devant chez les parents du ministre de la Justice pour la grâce accordée à son frère qui est condamné pour des faits de pédophilie sous l’ère de Ben Ali ;
7. Redeyef : fermeture des écoles et des lycées en protestation contre le désintérêt des autorités des 9 grévistes de la faim... ;
8. Une vague de protestations à Jendouba et des actes de violence à Ghardimaou ;
9. 15e jour de grève des éboueurs à La Marsa avec risques d’épidémies ;
10. Frontière tuniso-algérienne bloquée ;
11. Sit-in des familles de prisonniers devant le ministère de la Justice ;
12. Djerba : Un sit-in paralyse les bacs à El Jorf & Immolations, augmentation du chômage, fuite des investisseurs, faillite du tourisme...
Et, entre temps, le prolongement de l’état d’urgence sans date, ce qui n’encourage pas les touristes à venir, les Etats-Unis qui ne lèvent pas l’alerte voyage vers la Tunisie pour ses concitoyens.
Les voyages à l’étranger de Rached Ghannouchi, président du parti Ennahdha, qui nous parle d’islamisation du pays, et de Moncef Marzouki, président de la République par intérim, qui nous sort la fusion de la Tunisie avec la Libye, une sortie de piste en matière de communication qui n’est pas la seule de notre président qui n’arrête pas ses déboires à chaque apparition et nous met en conflit avec nos partenaires étrangers.
Célébrer le 14 janvier en invitant une brochette de dictateurs et gaspiller de l’argent pour des festivités à la Ben Ali alors que le peuple attend une reconnaissance des différents efforts menés contre l’ancien régime, surtout envers les martyrs et blessés, et envers les chômeurs...
Allons-nous continuer dans cette direction pour aller vers un vrai KO ?
Le gouvernement va-t-il arrêter de blâmer les quelques médias qui dénoncent cette situation ?
Quand est-ce que nos représentants à l’Assemblée constituante vont-ils s’activer pour réaliser ce pourquoi nous les avons élus, à savoir la rédaction de la Constitution ?
Que nous proposent les nouveaux dirigeants pour mener à son terme cette fragile phase transitoire ?
Nous attendons toujours… la déception déjà ressentie va-t-elle mener à une révolution bis ?
Bref tout va bien et «le pays fonctionne à 90%», comme l’a affirmé M. Marzouki sur une radio française.
Reste à savoir où va vraiment notre pays ?
* Entrepreneur tunisien basé en France, investi dans des projets sociaux et politiques en tant que citoyen indépendant..