Ezzeddine Ben Hamida* écrit – La sombre histoire de François Mitterrand avec les Arabes s’explique par son obsession de la sécurité d’Israël pour racheter son triste passé avec Vichy. Mais pas seulement…


«Je suis l’ami d’Israël, l’ami du peuple juif», lançait François Mitterrand, à Tel Aviv le 4 mars 1982. «(…) On sait ce qui me vaut l’amitié de la communauté juive de France, c’est mon admiration connue pour le génie du judaïsme. C’est aussi la solidarité dont j’ai fait preuve lorsque cette communauté a souffert. Et peut-être le fait que je n’ai jamais changé de position sur un problème pour elle à la fois intime et déchirant, celui d’Israël», disait-il aussi. Rien d’étonnant : sa femme Danielle était juive.

Solidaire de Bush

François Mitterrand a pris officiellement ses fonctions le 21 mai 1981. Le réacteur nucléaire Irakien d’Osirak a été détruit le 7 juin 1981 par l’armée israélienne. Récemment, Shimon Pérès, l’actuel président de l’Etat hébreu, avait déclaré dans une interview télévisée que, malgré son amitié avec François Mitterrand (1981-1995), il n’avait pas voulu assister à la cérémonie du 21 mais 1981, pour ne pas laisser penser qu’il y ait eu connivence entre Israël et le nouvel hôte de l’Elysée et éviter ainsi à son ami les foudres des Arabes.


Mitterrand et Bourguiba à Tunis en octobre 1983

François Mitterrand était donc au courant des intentions de Menahem Begin de bombarder le réacteur nucléaire Irakien. Un réacteur qui a été livré par la France quelques semaines avant l’attaque et déjà payé cash par Saddam Hussein.

Jacques Andréani, ancien ambassadeur de France à Washington pendant la guerre du Golfe de 1991, disait : «Isolé au départ, il a mis plusieurs mois à renverser l’opinion française et la position des officiels. Il l’a fait avec beaucoup d’adresse, en montrant qu’il avait des positions différentes des Américains sur certains sujets, ou qu’il était prêt à des compromis jusqu’au dernier moment. Mais sa position de fond était claire : il allait être solidaire de Bush, qui était décidé, très tôt, à faire la guerre s’il le fallait» (in ‘‘Dans le secret des Présidents’’ de Vincent Nouzille, éd. Fayard, 2010, P.184).

Pire encore, d’après Marc Boureau d’Argonne, ancien haut diplomate français, le président François Mitterrand avait refusé de signer un accord à l’initiative des pays arabes, avec les autorités de Bagdad de l’époque, pour sauver la paix en permettant à Saddam Hussein de faire marche-arrière sans perdre la face. Ainsi, Mitterrand a laissé le piège états-unien se refermer sur l’Irak.

Loin donc d’avoir voulu empêcher la guerre du Golfe, Mitterrand a-t-il participé à sa fabrication ? Pour l’ancien Président français, la sécurité d’Israël était indiscutable et l’Irak de Saddam Hussein représentait à long terme une menace réelle sur l’Etat hébreu.

Très méfiant à l’égard des musulmans

La sombre histoire de Mitterrand avec le monde arabe et musulman ne se limite pas seulement, hélas, à son obsession de la sécurité d’Israël pour racheter son triste passé avec Vichy et redorer ainsi son blason auprès du lobby juif ; déjà pendant la Guerre d’Algérie, quand il était ministre de la Justice de février 1956 à juin 1957, les condamnations à mort prononcées contre les nationalistes algériens pleuvaient et, en seize mois, la guillotine a été actionnée 45 fois. Mitterrand était un partisan de «l’intégration» à tout prix.

Pour convaincre le lecteur de l’intransigeance de Mitterrand à l’égard du monde arabe en particulier et du monde musulman en général, il suffit d’analyser sa position personnelle pendant l’éclatement de l’ex-Yougoslavie et son soutien inconditionnel aux Serbes, particulièrement les deux criminels de guerre : Radovan Karadzic et Ratko Mladic, malgré le massacre et le génocide dont étaient victimes les musulmans bosniaques. Le président français s’est systématiquement opposé aux opérations militaires contre les Serbes et à la levée de l’embargo sur les armes pour la Bosnie. Il était très méfiant à l’égard des musulmans et ne voulait surtout pas d’un Etat musulman au sein de l’Europe. (Vincent Nouzille, op. cit.)

* Professeur de Sciences économiques et sociales.

A suivre…

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