Puisque le gouvernement ne veut pas faire le bilan des 100 jours, l’auteur, ingénieur et consultant dans des cabinets internationaux, le fait pour lui. Très édifiant…
Par Hichem Jouaber*
Comme c’est de coutume, chaque gouvernement et chaque dirigeant d’entreprise doit faire un bilan de son action au bout de 100 jours d’exercice. Cette tradition a pour but de s’assurer que la trajectoire est conforme aux attentes et que la cible est toujours en bonne ligne de mire et que les premiers résultats sont tangibles.
Il se trouve que ni le gouvernement provisoire ni le président provisoire n’ont eu le courage de nous présenter leur bilan des 100 jours. Du coup, afin d’informer les concitoyens, j’ai pris la peine sur moi de le faire pour eux sous forme d’un discours factice du Premiers ministre:
Mesdames et Messieurs les journalistes soyez les bienvenues et merci d’avoir répondu à notre appel. Mes chers citoyens, mes chères citoyennes, mes frères et mes sœurs, d’ici et d’ailleurs.
Nous vous avons fait appel ce matin pour nous prononcer sur l’actualité: à savoir les cent (100) jours du gouvernement.
Réunis en conclave ce vendredi, nos différentes commissions ont rendu leur conclusion sur l’action gouvernementale en cent (100) jours.
1- Économie:
L’accroissement du rythme des importations sur ces 100 derniers jours a entraîné un élargissement du déficit de la balance des paiements courants qui a atteint 1,5% du Pib. En conséquence, le niveau des avoirs nets en devises a continué à baisser revenant à 10.246 MDT ou l’équivalent de 106 jours d’importation contre 113 jours à fin décembre de l’année précédente.
Sur le plan monétaire, l’intervention de la Banque centrale de Tunisie sur le marché monétaire a baissé durant la première moitié du mois de mars courant portant sur une injection moyenne de liquidité sur le marché de 3.729 MDT contre 3.917 MDT en février. Le taux d’intérêt moyen s’est élevé au cours de cette période à 3,51% contre 3,42% pour le mois de février.
En ce qui concerne l’évolution des prix, le taux d’inflation a atteint 5,4%, durant les deux premiers mois de l’année en cours, contre 3,2% pour la même période de l’an passé, sous l’effet surtout de la persistance des pressions sur les prix de certains produits alimentaires frais. Le taux d’inflation hors produits alimentaires s’étant maintenu au niveau de 4,1% pour le deuxième mois consécutif.
Comme vous le voyez la situation est entrain de s’aggraver mais grâce à Dieu bientôt nous toucherons le fond et comme on dit on ne pourra que remonter après.
2- Emploi:
Nous sommes sur la bonne voie pour atteindre le 1.000.000 de chômeurs cette année. Nous sommes actuellement à 900.000. Au bout de 100 jours de gouvernement, je peux vous confirmer que le nombre de chômeurs diplômés va largement dépasser en 2012 les 230.000.
Ces chiffres en croissance constante traduisent le dynamisme de l’activité sociale et contribuent de la même façon à augmenter le nombre de manifestants dans la rue, signe d’une réelle concrétisation de la démocratie au travers l’expression directe du peuple et ce depuis notre prise du pouvoir
3- Éducation et formation:
Ces 100 jours ont été marqués par la perturbation des cours dans nos établissements orchestrées par une minorité de salafistes convaincus allant jusqu’à toucher au sacre du drapeau national. Nos universités sont en train d’apprendre à nos jeunes le mérite du jihad, de l’intolérance, du fanatisme et de la dictature religieuse.
Ces matière d’avenir ont été longuement ignorées pour les anciens gouvernements alors qu’elles permettent largement de former des diplômés avec une grande chance de trouver du travail dans le monde que ce soit en Afrique, en Afghanistan, en Libye et au Pakistan. Ceci va certainement contribuer au rayonnement de la nouvelle éducation à la tunisienne dans le monde musulman.
4- Liberté et droits:
En toute franchise, les 100 jours passés n’ont pas permis de faire des avancées en la matière dans le mesure ou ce sujet ne constitue pas une priorité du gouvernement pour le moment.
Notre gouvernement reste focalisé sur les sujets importants que sont l’enracinement de la doctrine théologique et surtout la préparation de notre parti aux prochaines élections.
5- Corps des fonctionnaires de l’État:
Sur ce plan le gouvernement a fait de grands progrès et les récents mouvements au sein du corps des commis de l’Etat (gouverneurs, délégués, institutions publiques) visent à renforcer la cohésion de ce corps avec les thèses du parti… pardon du gouvernement!
Nous pensons que la cohésion et l’endoctrinement est le meilleur gage pour la réussite des élections futures et pour satisfaire nos proches et amis et ce en dépit de la compétence. Nous sommes ainsi prêts pour organiser les élections locales et législatives avec une garantie de la gagner.
Après uniquement 100 jours nous pouvons dire que nous sommes à présent assurés de garder le pouvoir pour encore longtemps.
6- Politique étrangère:
Le dynamisme de notre diplomatie a été suivi d’un grand succès auprès des grands de ce monde comme le Kenya, le Mali, l’Éthiopie et plein d’autres pays de ce calibre. Sans oublier le succès pour obtenir de notre frère du Qatar un prêt de 500 millions de dollars US avec un taux d’intérêt supérieur au marché. Nous avons également obtenu de notre frère la prise en charge complète des soins de... 20 blessées de la révolution. Ceci constitue un réel exploit, largement plus important que de voir, en contrepartie, nos relations avec les pays européens se détériorer et les investisseurs et les touristes occidentaux fuir le pays.
Comme vous le voyez, si même Dieu a mis 7 jours pour créer le monde, comment voulez-vous que nous sur terre nous puissions faire aussi vite à l’échelle de la Tunisie avec beaucoup moins de moyens et surtout sans expérience et sans compétence.
Je vous remercie! Et je vous donne rendez-vous dans 1000 jours si Dieu et le bourrage des urnes le veulent bien.
Source : Page Facebook de l’auteur.
* Titulaire d’une une maîtrise de mécaniques appliquées de l’Université de Tunis, ingénieur de l’Ecole nationale des ponts & chaussées (France) et diplômé en intelligence artificielle de l’Université Paris V, il a été vice-président de Gemini Consulting.