A propos des difficultés qu’éprouvent les jeunes pilotes tunisiens, qui ont obtenu leur diplôme dans les pays occidentaux, à se voir délivrer la licence pratique d’exercer en Tunisie.
Par Mehdi Ben Fredj*
Monsieur le Ministre,
Je me permets de prendre la plume pour porter à votre connaissance des faits dont je suis persuadé, compte tenu de votre probité en complète harmonie avec le soulèvement populaire, que vous allez les qualifier d’attentatoires à la justice et à la démocratie.
Je souhaite vous informer, en ma qualité de président de l’association Council of Tunisian Pilots (Ctp), des fortes anomalies qui actuellement perturbent le recrutement de pilotes dans l’aviation civile tunisienne.
Beaucoup de nos associés ayant obtenu, souvent dans la souffrance, les diplômes requis dans les pays occidentaux, reconnus par la Tunisie par convention internationale et présentant leur dossier dans le cadre légal de l’équivalence se sont vus opposer un refus d’admission dans la mesure où on oblige le candidat à effectuer un nombre élevé d’heures de vol supplémentaires pour l’obtention en Tunisie du Cpl et de Ifr pratique.
Cette exigence oblige les postulants à effectuer 55 heures de vol aux instruments selon des principes et une formation tout à fait conformes à ceux qu’ils ont déjà effectués à l’étranger avec succès. On aboutit ainsi à les contraindre de repasser une seconde fois la totalité de la formation pratique qui les conduit à des dépenses supplémentaires insupportables. Et c’est d’autant plus insupportable que la législation tunisienne et internationale dans ces cas est violée.
Je fais ainsi référence au décret du 23 mars 2010, applicable à compter du 5 mars 2011, concernant la délivrance de la qualification tunisienne de vol aux instruments sur la base d’une licence étrangère.
De plus, après une lecture en profondeur de la réglementation du 11 juillet 2003, nous constatons en page 2185 du Jort n° 55, du 11 juillet 2003, que l’équivalence de l’Ifr ne nécessite absolument pas de réitérer toute la formation modulaire pratique mais uniquement de soumettre le postulant à un test en vol sous réserve de remplir certaines autres conditions.
Ainsi il est exigé à ce titre:
- d’être titulaire du brevet théorique de pilote de ligne tunisien;
- de produire une attestation d’un centre agréé justifiant que le candidat a suivi la formation modulaire homologuée pour l’Ifr.
La section 1ère du chapitre 1er mentionné à la page 2177 définit ses modalités qui exigent en fait uniquement la formation modulaire théorique. Il ne s’agit, en aucun cas, de refaire des heures de formation pratique.
Par ailleurs, les dispositions générales, règlementant le fonctionnement de l’aviation civile des pays adhérant aux lois internationales, qui constituent le fondement même de la législation tunisienne portant sur ce sujet, sont très claires.
Tout citoyen tunisien titulaire d’une qualification de vol aux instruments délivrés par un Etat signataire de la Convention de Chicago du 7 décembre 1944, en état de validité, a la possibilité, en passant un rapide examen de confirmation en vol et produisant une attestation sérieuse de formation modulaire théorique, d’obtenir, sous réserve de succès à l’épreuve en vol, la licence pratique tunisienne.
Tous les jeunes pilotes ont alors un point commun: ils détiennent une licence délivrée par les autorités de l’aviation civile tunisienne. Cette licence vient couronner un ensemble d’examens théoriques et pratiques effectués soit en Tunisie soit dans un pays dont l’équivalence de la formation est reconnue par Convention internationale et accords internationaux dont la Tunisie est prenante et, quelle que soit l’origine de la formation du pilote, in fine, rien ne s’oppose à ce que l’Etat garantisse ainsi les capacités et les compétences de ces pilotes.
Je vous prie, en prenant connaissance de tous ces éléments, de bien vouloir accepter de me faire part de votre sentiment sur un sujet qui ne doit pas, du point de vue de la capacité professionnelle et du diplôme, diviser les Tunisiens mais, au contraire, les rassembler dans un pays qui aspire de toutes ses forces à l’unité.
Nous sommes psychologiquement entrés, en Tunisie, dans une nouvelle ère, celle de l’égalité; nous espérons vivement que les actes et actions de nos ministres nous démontrent clairement que nous ne nous sommes pas trompés.
Très respectueusement.
* Président du Council of Tunisian Pilots (Ctp).
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