Pour sauver ce qui reste à sauver de la saison touristique, le gouvernement met le paquet en matière de publicité. Pourvu qu’il n’est pas en train de perdre du temps, de l’argent et de labourer dans un océan!
Une rencontre par-ci, une autre par-là, tout le monde semble mobilisé et tous les moyens sont bons pour changer l’image brouillée de la destination Tunisie. Comment convaincre les Européens en général et les Français en particulier, encore hésitants, de venir séjourner tranquillement dans notre pays?
L’affaire est loin d’être mince en ces temps de crise un peu partout. Où la guerre sur nos frontières avec la Libye ne sert pas notre cause. Où les immigrés à Lampedusa donnent de la Tunisie une image négative. Où le dernier attentat à Marrakech vient mettre un autre bâton dans la roue de notre tourisme régional. Où tout le monde a peur des attentats, de l’insécurité et de tout autre dérapage.
C’est ce qu’a souligné Habib Ammar, directeur général de l’Office national du tourisme tunisien (Ontt) samedi à la presse tunisienne, deux jours après avoir rencontré, à Paris, les médias français et autres partenaires de la Tunisie.
Selon le patron de l’Ontt, malgré la baisse enregistrée dans le secteur qui fait travailler 400.000 personnes, il y a encore une lueur d’espoir. Comment se rattraper? «Une opération médiatique. Du buzz», répond-t-il.
Le tourisme dans un pays démocratique
«C’est vrai, cette campagne est venue un peu en retard. Avant, il n’était pas possible de la lancer. La situation ne le permettait pas. Mais tout le monde sait que la Tunisie a rompu avec le passé et que son avenir est dorénavant lié à la démocratie. Et comme vous le savez déjà, le tourisme ne peut s’épanouir que dans un climat de démocratie», a précisé M. Ammar. Sans nier qu’il y a une baisse qui donne le vertige. Et que c’était attendu!
Selon le responsable, les résultats sont là. «Le secteur a souffert pendant les quatre mois de cette année d’une baisse de 41,8% par rapport à la même période de 2010. Du premier janvier au 30 avril, le nombre de nuitées globales a chuté de 53,7% (3millions et quelques nuitées). Selon la Banque centrale de Tunisie (Bct), les recettes ont baissé de 47,7% par rapport à la même période de 2010». Il n’y a pas donc de quoi avoir le sourire. Mais sourions quand même! Car, selon M. Ammar, c’est encore jouable.
Outre les accords de soutien avec des partenaires du secteur d’ici et d’ailleurs, M. Ammar compte sur un bon coup médiatique pour relancer la saison touristique. La première campagne publicitaire sera lancée à partir de Bordeaux (France) le 9 mai. Combien coûte cette campagne? Réponse de M. Ammar: «Ça va être sur deux temps. Le gouvernement a consacré la bagatelle de 60 millions de dinars pour la première tranche. Une fois notre objectif atteint, on passera à la deuxième campagne qui coûtera 55 millions de dinars». Et de signaler que le budget habituellement consacré à la promotion de notre tourisme était de 42 millions de dinars. Pour une année exceptionnelle, l’Etat a dû multiplier l’enveloppe par 2,5. Pourvu qu’il y ait un bon retour sur investissement!
Dites-le avec humour !
Contrairement à ce qui se faisait sous le régime déchu, la campagne sera cette fois-ci confiée à des boîtes de Com’ tunisiennes. Le conférencier a rappelé que notre pays ne manque pas de compétences dans le domaine. Selon lui, il n’y a pas mieux qu’un Tunisien pour faire la promotion de son pays.
«Des six entreprises qui ont proposé leurs idées sur le thème de la révolution, celles qui accrochent le plus et qui choquent, ont retenu notre attention. Nous devons ridiculiser la peur qui empêche le touriste européen de visiter la Tunisie», a-t-il souligné. Place donc à l’humour! Outre la carte postale du pays, il y a autre chose: «Le Tunisien. Pas plus attachant que lui». Dorénavant, le Tunisien est la carte de visite du pays.
A l’affiche, des phrases toutes faites, rédigées dans la langue de Voltaire. Elles seront diffusées sur les chaînes de télévision étrangères, dans des bannières sur le net… Et dans les rues les plus animées de l’Hexagone avant de circuler en Italie. Ces visuels racontent différemment la Tunisie. Il suffit de cliquer sur le www.bonjour-tunisie.com pour écouter des témoignages vivants de touristes qui gardent une bonne presse de notre pays, de la diversité de nos produits dans la rubrique: «Heureux de leurs vacances». Lire aussi : «On raconte que la Tunisie est un champ de ruines»; «On dit qu’en Tunisie, les balles fusent»; «Il paraît qu’en Tunisie, la tension est à son comble»; «A vous de voir»… Des spots qui ne laissent personne insensible.
Chassez le naturel, il revient au galop !
«Nous comptons aussi sur le relationnel. Outre les 550 journalistes et patrons des agences de voyage qui ont été invités au pays, nous accueillons, du 7 au 10 mai, 70 personnalités françaises, dans un Voyage du jasmin, dont Patrick Bruel, Serge Moati, Michel Boujnah, Franck Leboeuf, Smaïn, Mourad Zeghidi et autres Zyad Limam, qui vont, de leur côté, faire la promotion de la Tunisie», a annoncé M. Ammar, très fier de ses trouvailles.
En fait, il s’agit des mêmes «hôtes» de la Tunisie depuis toujours. Reste à vérifier si, parmi les 70, on ne trouverait pas aussi Salvatore Lombardo, Antoine Sfeir et tous les autres incontournables «clients» de l’Agence tunisienne de communication extérieure (Atce)…
En d’autres termes, le tourisme ne peut pas déroger à la règle de la vraie fausse transition tunisienne: on prend les mêmes et on recommence!
On jugera sur les résultats…
Zohra Abid