Il est le meilleur buteur de l’histoire de la sélection de Tunisie avec 22 réalisations. Le public de Radès ne rate pourtant aucune occasion pour le siffler. Ses éclairs de génie, intermittents et décisifs, lui valent parfois d’être pris (sans jeu de mots) pour un Messi.


Samedi dernier, Issam Jemaa, dans un bon jour, a libéré les Lensois. En marquant dans le temps additionnel, après avoir remplacé Akalé à la 74e minute, il a offert à Lens sa première victoire à domicile de la saison et une sacrée bouffée d’oxygène. L’attaquant tunisien est parfait dans le rôle de joker. Celui de sauveur lui convient aussi, même si les Lensois espèrent voir Jemaa jouer ce rôle un peu plus souvent.

«Jemaa, buteur à plein temps?» titrait ‘‘Eurosport.fr’’, le point d’interrogation exprime à la fois un souhait et un espoir, «Jemaa libère Lens !», écrit ‘‘Sport 24.com’’ , «Jemaa délivre les Lensois», renchérit ‘‘Actu-foot.fr’’ , ou encore «Issam Jemaa est un sacré numéro», surenchérit ‘‘La Voix des Sports’’.

Un carton, un but et un miracle…
«Samedi soir, Issam Jemaa est un héros », souligne, de son côté, ‘‘La Voix du Sport’’. Le journal ajoute: «Les gosses se précipitent pour l’entourer. Les parents veulent immortaliser l’instant, le Tunisien se plie en deux pour entrer dans le cadre et enlace des gamins aux anges. L’attaquant a inscrit le but de la dernière seconde. Un but qui, s’il ne redonne pas définitivement la vie, repousse au moins pour un temps la mort. Le garçon est formidablement attachant. Le joueur est incroyablement agaçant. À peine était-il entré d’une minute qu’il avait déjà eu droit à sa biscotte. Un petit carton jaune pour bavardage.»
Ça, c’est l’autre Jemaa, le joueur brouillon, maladroit, lunatique, dilettante..., que le public tunisien aime huer de temps en temps pour lui remonter les bretelles.
«Il est comme cela, on ne le changera pas. Un carton, un but et un miracle, le tout en moins de vingt minutes... Du Jemaa pur jus. Authentique, acide et goûteux à la fois. Capable de réussir les gestes les plus insensés autant que se servir du pied gauche pour écraser le pied droit.», écrit, indulgent et un brin lyrique, ‘‘La Voix du Sport’’.
Il faut dire que Jemaa n’est jamais au mieux de son inspiration que lorsqu’il est dos au mur, à deux doigts du banc des remplaçants: sanction suprême pour les footballeurs. Samedi, il était dans cet esprit là. Il a eu un réflexe miraculeux. Les Lensois jubilent et le portent en héros… le temps d’un week end.
«Sur le but, j’anticipe et je reçois un bon ballon de David [Pollet]. J’étais bien placé, il fallait absolument marquer», racontera Jemaa aux confrères après le match. Oui, il le fallait. Absolument…

En Tunisie, on attend beaucoup de moi
Après le carton rouge qu’il s’est fait gratuitement infliger il y a quelques semaines contre Lille, Jemaa a commencé à se poser des questions. A douter. Il avoue avoir même parlé de son possible départ. Ses agents et ses amis l’ont dissuadé. «Je pensais que je ne jouais pas parce que je n’avais peut-être pas le niveau. Je me disais que je n’étais peut-être pas à ma place. Ce but, il ne fallait vraiment pas le louper», raconte Jemaa.
Le joueur revient sur ses prestations avec les Aigles de Carthage: «En Tunisie, on attend beaucoup de moi. J’ai un rôle très important. On me donne trop de confiance et la pression est très forte. Je suis seul devant à essayer de donner le meilleur de moi-même. Mais j’arrive à m’en sortir. Ici, ce n’est pas pareil. Et puis il y a beaucoup de bons attaquants», ajoute le joueur.
Le week-end dernier, Jemaa a su se hisser au niveau que l’on attend de lui. Il a toujours le dos au mur: l’ivresse d’un samedi soir se dissipe très vite. Il faut se remettre au travail. Le doute est son meilleur allié.

M. T.