Nommé successeur de Kamel Idir il y a à peine deux semaines, Jamel Atrous est «déchu» de ses fonctions de président du club de Bab Jedid et remplacé par Chérif Bellamine que les supporters ont de suite refusé. L’imbroglio de la présidence du Club Africain (CA) est loin d’être fini.
La tendance générale au CA en ce moment de l’année n’est, en aucun cas, surprenante. Depuis plus d’une décennie maintenant, l’ambiance de l’intersaison a toujours été des plus tendues et des plus confuses. Impossible, en effet, de voir le Parc A passer l’été sans clash entre différents clans et différentes entités dirigeantes, dans une ambiance éternellement tendue et des disputes tous azimuts. Bref, ce qui se passe ces jours-ci a un air de déjà-vu.
Un déficit sans précédent
Kamel Idir, qui a veillé aux destinées du club pendant cinq ans (2005-2010), a connu une petite réussite au début de son mandat, avec, en 2008, un championnat de Tunisie de football, un titre qui échappait aux Rouge et Blanc depuis déjà... douze ans. Depuis, le club a replongé dans la gabegie et Iddir, se contentant de gérer le quotidien, a échoué à fructifier le titre de 2008 pour soigner la situation du club et développer ses structures. Des structures du reste inexistantes, sinon largement en deçà de l’envergure du CA et du niveau atteint par ses principaux concurrents du pays.
Les résultats réalisés pendant la saison 2009-2010 sont des plus mauvais de l’histoire du club: aucun titre, vraiment aucun, toutes sections (foot, hand, basket) et toutes catégories (jeunes, seniors, filles) confondues. Ça, c’est quelque chose de jamais vu au CA! Pis, le club enregistre un déficit sans précédent: le rapport financier (pas encore publié) parle de 1,5 millions de dinars (MDT)… et les mauvaises langues (sic !) de 3,7 MDT. Disons 2 MDT (en moyenne). Pourtant, une grande partie de l’effectif de l’équipe première de football réclame plusieurs arriérés de salaires et de primes, les entraîneurs des jeunes n’ont pas touché les leurs depuis des mois. Ça, c’est une autre histoire.
L’histoire se répète
Kamel Idir ne peut donc plus rester. Même si on continue, ici et là dans les sphères sportives, de le soutenir discrètement et de préparer son maintien. Et même si Idir lui-même garde la porte ouverte à un nouveau mandat. Mais ce n’était même pas ça le problème.
Le vrai casse-tête, récurrent chaque intersaison au CA depuis belle lurette, c’est de trouver un successeur à Idir. Les candidats potentiels ne se bousculent pas au portillon. La procédure de la nomination du président du CA est devenue tellement difficile, tellement embarrassante, tellement compliquée que les «décideurs» clubistes ont éprouvé cette fois-ci toutes les peines du monde avant d’atteindre le difficile consensus: confier le club à Jamel Atrous. Un consensus souvent considéré impossible tellement les «grands » du club en étaient partagés, tellement Atrous lui-même ne répondait pas aux critères essentiels pour être présidents du CA. De ces critères, l’âge (qui veut dire la maturité et la «sagesse» telles que conçues et comprises par la «culture» clubiste) et la richesse (Jamel n’est qu’un cadre, donc employé, dans l’entreprise de son père Tahar, et nous le voyons mal injecter des centaines de millions de l’argent de la famille dans les caisses du CA). Peu importe. Un président «en devenir» est mieux que le vide, père de tous les «vices» cachés.
Retour à la case départ !
Mais Atrous était bien, très bien même, accueilli par le public du CA. Quoi qu’alarmé par l’ampleur des dettes du club, il a vite (trop vite ?) arrêté la liste de ses collaborateurs. Il s’est de suite penché sur les dossiers les plus urgents (l’entraineur de l’équipe première, la régularisation des situations contractuelles des joueurs, les recrutements…). Tout cela n’a pas suffit, semble-t-il.
Dimanche a apporté une nouvelle inattendue: Atrous n’est plus président. C’est Chérif Bellamine qui le sera, nous annonce-t-on, à la surprise générale.
Destitué en décembre 2005 dans des conditions très semblables à celles qui ont coûté Iddir son poste il y a un mois, Bellamine déclare être prêt à répondre présent «à l’appel du devoir».
Une opération aussi surprenante (un président de club n’a jamais, en Tunisie, été destitué quelques jours seulement après être officiellement désigné) qu’ambiguë (ses causes et ceux qui l’ont décrétée ne sont toujours pas connues).
Le public clubiste n’a apparemment pas digéré ce «coup de théâtre». De suite, il s’est déchaîné contre le retour de Bellamine. Sur Internet (réseaux sociaux et forums), par SMS, dans les cafés et autres lieux de lobbying sportif, une campagne anti-Bellamine (pas nécessairement pro-Atrous) a été orchestrée depuis dimanche.
La soirée de dimanche a même vu des dizaines de supporters clubistes «envahir» le Parc A pour protester contre la décision.
Retour à la case départ. C’est le flou total qui s’installe de nouveau.
M. T.