En 2011, 272 cas de violence ont ciblé les corps médical et paramédical ainsi que les établissements hospitaliers. Ce phénomène a pris de l’ampleur depuis la révolution, estiment les professionnels.


La dernière agression en date a eu lieu, la semaine dernière à l’hôpital régional Habib Bougatfa de Bizerte. La victime, orthopédiste interne, a été tabassée par un groupe d’individus accompagnant un patient, ce qui a nécessité l’hospitalisation du clinicien.

Des grèves et des sit-in ont été organisés dans plusieurs établissements pour demander la sécurisation des hôpitaux.

Le secrétaire général de l’Union des médecins spécialistes libéraux (Umsl), Fawzi Charfi, a expliqué à l’agence Tap que «par respect du code déontologique médical, le médecin ne peut pas riposter en cas d’attaque».

Limiter l’accès des accompagnateurs des malades

Dr Charfi propose de limiter l’accès des accompagnateurs des malades aux salles d’attente et aux urgences et de renforcer la présence sécuritaire dans les établissements hospitaliers, notamment durant les gardes de nuit, à travers l’installation de postes de sécurité permanents et l’intensification des patrouilles de sécurité. Une réclamation exprimée par tous les professionnels.

«Si les médecins arrivent à comprendre les dérives sécuritaires qui ont éclaté au lendemain de la révolution et touché les hôpitaux, les administrations et lieux publics, il est aujourd’hui inadmissible que de tels agissements se poursuivent, alors que le pays a retrouvé une vie institutionnelle normale», déplore Dr Charfi.

Dans un communiqué, l’Umsl condamne les actes de violence perpétrés contre l’ensemble du personnel médical exerçant tant dans le public que dans le privé. Elle appelle les patients et leurs familles au calme, à la patience et à la retenue, et aux autorités, à prendre d’urgence les mesures nécessaires pour assurer la protection des médecins et leur permettre de travailler dans de meilleures conditions.

«Les médecins ont participé et soutenu, sans réserve, la révolution de la liberté et n’ont cessé de montrer leur sens de responsabilité, en assurant la continuité des soins médicaux sur tout le territoire tunisien, même pendant les périodes les plus troubles dans des conditions sécuritaires précaires», souligne le communiqué de l’Umsl.

Pour le chargé de mission au cabinet du ministre de la santé, Mohamed Meftah, ce phénomène ne date pas d’aujourd’hui. «Statistiquement, il n’existe pas un écart significatif entre le nombre d’agressions commises avant et après la révolution, la différence c’est qu’on en parlait peu».

Une commission sécuritaire permanente regroupant les ministères de la Défense, de l’Intérieur et de la Santé a été créée. Elle se réunit de façon presque hebdomadaire pour plancher sur cette question.

«Il y a eu des renforts sécuritaires dans les établissements hospitaliers et leur environnement pour dissuader les citoyens dont l’agressivité est nourrie par les préjugés qu’ils ont sur les hôpitaux et les cadres médicaux et paramédicaux», a-souligne M. Meftah.

Caméras de surveillance et bracelets électroniques

Des caméras de surveillance ont été installées dans nombres de services, en attendant la généralisation de cette expérience à tous les hôpitaux, même si elle n’a pas été très bien accueillie par le syndicat.

Le ministère envisage, aussi, l’introduction de bracelets électroniques dans les services pédiatriques pour contrecarrer les tentatives d’enlèvement d’enfants.

«La vague de liberté qui a balayé le pays après la révolution a rendu les citoyens plus exigeants en termes de rapidité et de qualité des prestations, en ignorant tout sur les moyens limités de nos hôpitaux», estime M. Meftah.

Le responsable a toutefois avoué le manque de médecins de spécialité dans les régions intérieures. Il a assuré que dans le cadre de son budget complémentaire au titre de 2012, le ministère a ouvert depuis quelques temps, un concours pour le recrutement de 308 médecins spécialistes à l’intérieur du pays. «Mais, malheureusement, jusqu’à ce jour, nous avons reçu 120 candidatures seulement».

Il a parlé de l’intention du département de créer quatre mille postes d’emploi (entre corps paramédical et ouvriers).

Le responsable a, par ailleurs, insisté sur l’impératif de créer un meilleur équilibre entre les différentes lignes de soins et de moderniser l’infrastructure hospitalière.

I. B. (avec Tap).