La Tunisie a célébré, hier, 14 novembre, la Journée mondiale du diabète, lancée en 1991 par la Fédération internationale du diabète (Fid) et soutenue par l'Organisation mondiale de la santé (Oms).
Par Samantha Ben-Rehouma
Cette campagne – si elle gagne en popularité en rassemblant professionnels et prestataires de soins de santé, personnes atteintes de diabète, et média – est avant tout une réponse à l'escalade de cette maladie silencieuse, en Tunisie comme partout dans le monde.
De quoi parle-t-on exactement?
Première affection de longue durée devant le cancer, le diabète est beaucoup plus répandu qu'on ne l'imagine, car il passe parfois inaperçu: 366 millions de diabétiques dans le monde et 552 millions en 2030 (selon prévision Oms), la tranche d'âge 40-59 ans est la plus touchée, 183 millions de diabétiques ne sont pas diagnostiqués, 80% apparaissent dans les pays en voie de développement et environ 5 millions de diabétiques décédés en 2011
Etre diabétique c'est quand on a un taux de sucre trop élevé dans le sang. Le problème? L'insuline (une hormone produite par le pancréas) ne parvient plus à gérer le stockage du glucose sanguin, apporté par l'alimentation, dans les cellules du foie ou des muscles. Non soigné, le diabète s'avère alors mortel. Il existe deux formes majeures de la maladie:
- le diabète de type 1: pas très répandu et se déclare plutôt avant 40 ans – qui est une maladie auto-immune: le système immunitaire se met à détruire les cellules du pancréas, supprimant la production d'insuline;
Dr Leïla Ben Salem Hachemi révèle des chiffres affolants.
- le diabète de type 2: le plus héréditaire et le plus évitable – qui représente quant à lui 90 % des cas et combine deux mécanismes: l'insuline perd de son efficacité et le pancréas n'en produit plus assez.
Inutile de se précipiter dans le premier labo venu car sont considérées à risque les personnes ayant des diabétiques dans la famille avec un des deux parents atteint, le risque augmente de 30%, et il passe à 90% si les deux le sont. Un bilan chaque 6 mois s'impose alors.
L'obésité un combat de poids
Toutefois et hormis l'hérédité, d'autres facteurs (le stress, l'hypertension artérielle ou encore la grossesse et la naissance d'enfants de plus de 4kg pour les femmes, la sédentarité et l'absence d'activité physique, etc.) sont à prendre en compte. Nonobstant, il en existe un de taille... l'obésité!
Et c'est justement sur ce point que Novo Nordisk (leader mondial dans le traitement du diabète) a convié – lors d'une conférence de presse sur le thème «Le diabète, protégeons notre futur» – Dr Leïla Ben Salem Hachemi (endocrinologue), Dr Safia Bouzid (présidente de l'association Tawhida Ben Cheikh) et le Pr Nejib Ben Abdallah (président de l'Amicale des diabétologues) pour nous faire un état des lieux... plus qu'alarmant !
La situation est grave et désespérée
Dr Leïla Ben Salem Hachemi, Dr Safia Bouzid, Pr Nejib Ben Abdallah et la directrice Novo Nordisk
«J'ai honte, qu'en 2012, on ne puisse avancer aucun chiffre concret, et ce, par manque de moyen. Pourtant il ne faudrait que 400 millions de dinars pour mettre en place cette étude, envoyer de vrais enquêteurs sur le terrain, acheter le matériel nécessaire. La dernière étude date de 1976 où le diabète était 3,8%. Elle est passée à 9,9% en 1997. Aujourd'hui, le diabète doit être aux environs de 15%», a déploré le Dr Hachemi Ben Salem.
D'autre part à entendre les difficultés rencontrées quotidiennement par le médecin généraliste Safia Bouzid avec ses patients afin que ces derniers changent leur mode alimentaire «Mais non docteur c'est de la chamia light et là c'est du soda light» on se dit qu'il faut commencer par faire la chasse aux idées reçues. Et non, cher patient le light ne veut pas dire permission de se remplir la panse doublement (juste celle de l'industrie agro-alimentaire!) surtout quand ce diabète représente la 5e cause de mortalité au monde!
Pour reprendre la célèbre chanson d'Aznavour ''Tu t'laisses aller'', le Tunisien patauge encore dans la farine quand on le sermonne qu'ôter le pain de sa bouche est pour son bien! Mais bon, pain dérobé réveille l'appétit comme on dit surtout quand les habitudes alimentaires sont ancrées depuis des lustres, car, et c'est là que le bât blesse la cuisine tunisienne bien que succulente n'est pas diététiquement parlant une sinécure pour notre santé.
Ajouté à cela une mauvaise hygiène de vie, la conjoncture économique et sociale, les problèmes quotidiens (cherté de la vie, chômage, maladie, stress, etc.) et vous obtiendrez un Tunisien médaillé d'Or du concours «sous-pression et prêt-à-exploser». Que faire alors?
Mieux vaut prévenir que guérir
Avant d'être diabétique de type 2, on est «résistant à l'insuline» ou en pré-diabète. A ce stade, rien n'est perdu. En adoptant une meilleure hygiène de vie: chasser les kilos superflus, oublier les graisses saturées pour se mettre aux fibres (bien lire les étiquettes avant d'acheter), pratiquer sérieusement un sport, on peut alors réduire son risque de diabète. Et ça marche si l'on en croit l'étude menée par le très sérieux National Institute of Health qui a indiqué que 30 minutes d'exercice physique (marcher, par exemple) suffisent à diminuer de 58% le risque de développer la maladie.
De plus, le diabète – cause d'amputation (la 1ère) de cécité, d'insuffisance rénale, d'un infarctus myocardique – engendre des sommes considérables: 239 dinars/an pour un diabète pas compliqué et 24.275 DT pour un diabète compliqué, 74 millions de dinars pour l'hémodialyse.
A ce sujet, le traitement du diabète représente 1% des dépenses de la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) contre 7,5% pour la dialyse, c'est dire l'importance du dépistage !
Bienvenue à la Maison du Diabète
Affiche la soirée dédiée à la lutte contre le diabète
Pr Nejib Ben Abdallah, président de «la Maison du diabète» et chef de service d'endocrinologie à l'hôpital Charles Nicolle, veut encourager la diabétologie et établir une feuille de route pour sensibiliser une partie de la population, trop longtemps laissée pour compte.
Novo Nordisk, l'Association Tawhida Ben Cheikh pour l'Aide médicale et l'Association tunisienne des diabétologues, ont organisé, le 14 novembre, une grande soirée caritative à la salle de cinéma Alhambra au centre Zéphyr de la Marsa, avec la participation de Jaâfar Guesmi, Arbi Mezni, Hédi Weld Baballah, Mohamed Ali Nahdi et le groupe Metis.
1 billet acheté = 1 billet de plus pour l'achat d'un «automate» (appareil mesurant le taux d'hémoglobine dans le sang des trois mois passés).
Bouger, bouger...
Dépister la glycémie plus vite et mieux est un grand progrès. Mais le diabète régressera lorsqu'on mangera plus léger et qu'on bougera son corps. Le sport joue un rôle majeur dans la régulation du diabète car il diminue le glucose sanguin et réduit la surcharge pondérale...
Alors, au placard le paquet de biscuits et à la porte pour un petit tour gratuit!