Telepeformance qui dispose de 6 sites et fait travailler plus de 6.000 salariés en Tunisie fait face à des mouvements de grève qui montent en crescendo depuis un an.
Par Yûsra N. M'hiri
Quatre membres du syndicat de Teleperformance ont observé une grève par l'isolement, du 26 février au 5 mars. Ils se sont réunis dans une salle au siège de la société à la rue Kheireddine Pacha, à Tunis, et ont décidé de ne plus quitter les lieux jusqu'à ce que la direction se manifeste et s'ouvre au dialogue.
La faim justifiera-t-elle les moyens?
La direction ayant campé sur sa position, refusant de dialoguer avant l'arrêt de la grève, les syndicalistes (ou trois d'entre eux, le quatrième ne pouvant se joindre au mouvement pour des raisons de santé) ont décidé, hier vers 15 heures, d'entrer en grève de la faim. C'est, à la fois, un appel au secours et un moyen d'aller jusqu'au bout de leur démarche afin que les conditions de travail s'améliorent dans la société où ils opèrent depuis des années et qu'ils ont vue se développer aux quatre coins du pays.
Dès l'entrée du bâtiment, les grévistes annoncent leur action.
Teleperformance, présente en Tunisie depuis 2001, dispose aujourd'hui de 6 centres de relation-client employant plus de 6.000 salariés, pour la plupart des diplômés du supérieur.
Il n'est plus surprenant, aujourd'hui, d'entendre parler de grève, dans un pays où la liberté d'expression et de revendication est devenue monnaie courante. A Teleperformance Tunisie, on a déjà en moins d'un an pas moins de 3 grèves. Ce qui interpelle, en revanche, c'est que les membres du Syndicat de cette entreprise offshore, Ali Ourak, Zied Fatnassi et Slim Ben Romdhane, ont entamé une grève de la faim, suite aux revendications restées à ce jour sans réponses.
Une «nouvelle colonisation»?
Les syndicalistes reprochent aux employeurs français d'avoir décidé des sanctions et des licenciements qualifiés d'abusifs. Ils vont même jusqu'à parler de «nouvelle colonisation», déplorant la détérioration du climat général au sein de l'entreprise.
Sur une vidéo diffusée sur le net, les membres du syndicat de Teleperformance (qui est affilié à l'Ugtt), parlent clairement de bras-de-fer et affirment que la grève entamée hier n'est pas le dernier recours et qu'ils iront jusqu'au bout pour avoir gain de cause. «Teleperformance a été construite par les employés depuis 2002. C'est une multinationale, pour laquelle nous avons beaucoup d'attachement. La nouvelle administration souhaite que nous fassions marche-arrière. Elle veut nous diriger par l'humiliation, mais elle oublie que nous sommes dans un pays où une révolution a eu lieu, et où le peuple ira de l'avant [...] On sacrifiera ce qu'il faudra sacrifier», dit Ali Ourak.
Les grévistes de la faim sont coupés de leurs collègues.
Communication interdite?
Aujourd'hui, au siège, il a été plus facile de communiquer avec les grévistes, pourtant isolés dans une salle dont l'accès est interdit (même aux employés se trouvant sur place), qu'avec la direction et/ou l'administration.
On nous dira, dans un premier temps, qu'aucun des membres de l'administration n'est encore arrivé, qu'ils sont en «réunion de crise», puis le téléphone sonnera... sans réponse...
On apprendra, par ailleurs, que, sur les autres sites de l'entreprise, les grévistes de Kheireddine Pacha bénéficient du soutien d'un grand nombre de leurs collègues. Et que d'autres grèves de la faim pourraient être décidées dans les prochains jours. Avis de tempête...