Le «refuge artistique» n’existe pour le moment dans aucune législation du monde, mais il va peut-être falloir l’inventer. Et pour cause…


Jadis, on demandait l’asile dans un autre pays pour fuir la répression politique. Il y a eu ensuite les réfugiés dits «alimentaires», ces gens qui émigrent vers des régions plus prospères en quête de survie. On a aussi parlé ces derniers temps des réfugiés «climatiques», ces personnes poussées à l’exode par la sécheresse et autres calamités naturelles, ou encore des réfugiés «sexuels», ces homosexuels ou lesbiennes qui fuient des pays où sévit l’intolérance vis-à-vis de ces tendances sexuelles. Voici venu le temps des réfugiés… «artistiques»: des gens qui fuient leurs pays parce qu’ils estiment que leur pratique artistique n’y est pas reconnue, marginalisée ou carrément réprimée.
C’est le cas des six membres du Ballet national algérien qui, le vendredi 12 novembre, ont choisi  de rester à Montréal et de demander le statut de réfugié au Canada.
Au départ, neuf danseurs avaient manqué à l’appel au moment du départ de la troupe, la semaine dernière, mais ensuite deux d’entre eux ont décidé de rentrer en Algérie et un troisième a suivi leur exemple.
Selon un membre de la communauté algérienne de Montréal, cité par l’agence Afp, les jeunes gens sont hébergés par des proches et ne souhaitent pas faire de déclarations.
Les Canadiens d’origine algérienne sont entre 60.000 et 70.000 dans la région de Montréal, selon des estimations.
Pour Mustapha Chelfi, directeur du mensuel ‘‘Alfa’’, journal de la communauté maghrébine, une des motivations des danseurs, parmi lesquels il y aurait au moins une jeune femme, pourrait être leur profession. «La danse est mal vue en Algérie, surtout avec ce phénomène de montée du religieux», a-t-il dit à l’Afp.
«L’Algérie devient de plus en plus religieuse, le voile, qui était absent dans les années 1970, est maintenant devenu majoritaire et donc, lorsqu’il y a une danseuse dans un quartier pauvre ou populaire, elle est mal vue, on la prend pour une prostituée, ni plus ni moins. Et on lui pourrit la vie par des allusions blessantes», a expliqué M. Chelfi. «Ici, au Canada, on leur fichera la paix, on ne leur en voudra pas d’être danseuses», a-t-il ajouté.

Kapitalis, avec Afp