Weld El 15 a été condamné à 4 mois de prison ferme et arrêté immédiatement après avoir comparu devant le tribunal cantonal de Hammamet. Son emprisonnement pourrait le mettre «physiquement en danger», avertit son avocat Ghazi Mrabet.
Par Yüsra N. Mhiri
Le rappeur Alaa Yacoubi, alias Weld El 15, a été jugé, aujourd'hui, pour atteinte aux bonnes mœurs et outrage à des fonctionnaires pour avoir chanté, en août dernier, au Festival de Hammamet ''El Boulissiya Kleb'' (Chiens de policiers).
Les policiers présents au concert s'étaient sentis visés et avaient procédé à une arrestation plutôt musclée du rappeur et de ses camarades, notamment Klay BBJ. Ce dernier avait été condamné, une première fois, le 26 septembre, à 6 mois de prison ferme avec exécution immédiate, puis libéré en appel, le 17 octobre.
Weld El 15 tabassé par des policiers le 10 août dernier.
Weld El 15, qui n'a plus confiance en la justice tunisienne, a préféré ne pas se rendre à la justice. Il avait été condamné par contumace à un an et 9 mois de prison, le 29 août dernier. Me Mrabet avait fait opposition à ce jugement, bien évidemment très dur pour une «simple chanson».
Quelques mois plus tard, le rappeur fugitif a décidé de sortir de la clandestinité et son avocat a déposé, le 22 novembre, une demande d'opposition au jugement après que Weld El 15 ait pris la décision de comparaître devant la justice pour «retrouver une vie normale».
Il s'est ainsi rendu, aujourd'hui, au tribunal cantonal de Hammamet, et a écopé de 4 mois de prison ferme.
Me Ghazi estime que cette décision est un acharnement contre la jeunesse, les artistes, les rappeurs et principalement contre son client. «Son dossier est vide, et n'est pas exempt de vices de procédures. Je crains sérieusement pour son intégrité physique», explique l'avocat, très inquiet pour son jeune client. Il craint que sa chanson hostile aux policiers ne lui vaille des vexations et même des agressions de la part des agents pénitentiaires.
Des jeunes en Tunisie et à l'étranger manifestent leur soutien à Weld El 15.
Certains pensent que le verdict est clément, sachant que le rappeur s'est dérobé à la justice pendant plusieurs mois. Ils estiment que la forte mobilisation d'artistes, de dirigeants politiques et de défenseurs des droits de l'Homme, aussi bien en Tunisie qu'à l'étranger, explique cette relative indulgence.
Pour d'autres, ce verdict est un scandale car il porte atteinte à la liberté d'expression et sanctionne une jeunesse éprise de justice, de liberté et de démocratie.
Me Mrabet devait se rendre cet après-midi à la prison civile de Mornag pour s'assurer que le jeune rappeur est dans de bonnes conditions. «Je vais m'entretenir avec le directeur de la prison pour être sûr qu'il n'y ait aucun dépassement de comportement, et que Weld El 15 soit traité de la même manière que les autres détenus», confie-t-il à Kapitalis.
L'avocat, défenseur des droits de l'Homme, pourrait avoir raison de s'inquiéter. Rappelons que le 10 août dernier, trois agents de sécurité ont insulté et tabassé le rappeur alors qu'il était avec sa fiancée en train de dîner, dans un restaurant à Sousse...