Habib Rachdi, secrétaire général adjoint du Syndicat de la sûreté républicaine, a révélé sur Mosaïque FM, l'existence de réseaux de prostitution, de drogue douce, de trafic de devises et même de terrorisme au quartier huppé d'Ennasr, à Tunis.
Par Imed Bahri
Intervenant, mercredi, dans l'émission ''Midi Show'', présentée par Naoufel Ouertani, Habib Rachdi, secrétaire général adjoint du Syndicat de la sûreté républicaine, a donné un avant-goût des révélations fracassantes que le secrétaire général dudit syndicat, Mohamed Rouissi, compte faire, au cours d'une conférence de presse, jeudi 26 décembre, au siège du Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT).
Des appartements loués.. à l'heure
Entre autres révélations, M. Rachdi a souligné l'existence de quelque 500 à 1000 appartements réservés à la prostitution clandestine à Ennasr, quartier huppé au nord-ouest de Tunis où vivent quelque 100.000 habitants. Ces appartements, gérés par des personnes puissantes, ayant des liens avec d'anciens hauts responsables de la sûreté, sont loués au prix fort et... à l'heure. Autant dire des appartements de passe...
«Sous l'ancien régime, Ennasr était considéré comme une zone dédiée au tourisme sexuel. Beaucoup d'étrangers y vivent ou y fréquentent des cafés et salons de thé où ils rencontrent des proxénètes et des prostituées, souvent âgées de 15 à 25 ans. C'était un choix délibéré des autorités politiques et sécuritaires. Aussi les contrôles étaient-ils toujours faibles et lorsque des agents faisaient des rapports détaillés sur certains trafics (sexe, drogue douce, devises...), leurs chefs hiérarchiques n'assuraient pas les suites nécessaires en déférant les coupables devant la justice ou en prenant des mesures pour mettre fin aux trafics», explique M. Rachdi.
Tout en soulignant que cette situation a continué et s'est même aggravée au lendemain de la révolution, le dirigeant syndical ajoute: «Mohamed Rouissi, qui était en poste au district de la sûreté de l'Ariana, a déposé auprès des services de Mohamed Abbou, du temps où ce dernier était ministre de la Réforme administrative (en 2012, NDLR), plusieurs dossiers relatifs à ces réseaux de prostitution et de drogue douce, les individus qui les dirigent, dont l'ex-président d'un grand club sportif, et les protections dont ces derniers disposent dans l'administration sécuritaire, mais en vain.»
Des dossiers perdus dans les méandres de la justice
M. Abbou a certes fait sa propre enquête avant de compléter les dossiers et de les remettre aux juges, mais ces dossiers, qui auraient dû donner lieu à des enquêtes judiciaires et même à des inculpations, se sont mystérieusement perdus dans les méandres de la justice, déplore M. Rachdi.
Le dirigeant syndical constate, cependant, que son collègue, Mohamed Rouissi a eu droit à 10 mutations en moins de 3 ans, la dernière a été décidée la semaine dernière: il a été muté à Ezzahra, au sud de Tunis, une façon de le tenir àdistance. «A chaque fois qu'il constituait un dossier sur une filière de délinquance dans cette zone visiblement protégée au plus haut niveau, il est aussitôt muté», raconte M. Rachdi.
Les autorités sécuritaires, mais aussi les responsables du gouvernorat de l'Ariana, dont dépend le quartier Ennasr, ont souvent été alertés. Ils ont reçu des dossiers détaillés sur les trafics de toutes sortes dont ce quartier était (et est toujours) le théâtre, de jour comme de nuit, mais ils ont estimé, à chaque fois, qu'il était urgent de... ne rien faire.
«Il y a aujourd'hui des kiosques qui changent les devises, des proxénètes qui organisent des excursions sexuelles ou envoient des filles tunisiennes se prostituer à l'étranger, des trafiquants de drogues, douces et lourdes, et même des éléments terroristes impliqués dans tous ces trafics, mais les autorités ne semblent pas pressées d'agir, si elles ne laissent pas faire», déplore encore M. Rachedi.
«Entre 2.000 et 3.000 étrangers fréquentent quotidiennement ce quartier. Beaucoup sont impliqués dans les trafics déjà cités. Or, un seul agent de l'ordre est chargé de surveiller les étrangers à Ennasr. Que pourra-t-il faire?», s'interroge le dirigeant syndical, ajoutant que d'autres révélations tout aussi inquiétantes seront faites demain par Mohamed Rouissi. Alors, suspense... On retient son souffle...