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Selon une récente enquête, 62% des Tunisiennes âgées de 25 à 34 ans sont célibataires. Alors que leurs familles et la société s'en inquiètent, certaines d'entres-elles revendiquent le célibat pour le meilleur et pour... le meilleur.

Par Yüsra N. M'hiri

Plus ouvertes, plus indépendantes et plus instruites, les femmes en général et les Tunisiennes en particulier sont aujourd'hui beaucoup plus exigeantes et n'ont plus pour objectif primordial de se lier à jamais à un homme et de fonder une famille à n'importe quel prix.

Prendre le temps de vivre

«Se marier, et accepter n'importe quel conjoint, juste pour faire taire la famille et la société, qui raillent les vieilles filles, ne m'intéresse pas. Quand je pense au taux de divorce, très élevé en Tunisie, je préfère prendre mon temps, et si le prince charmant ne pointe pas le nez, alors je préfère rester seule que de m'infliger un mauvais compagnon», confie Jihène, 34 ans.
Certaines célibataires endurcies craignent la vie à deux et accusent la gente masculine de machisme: «Il vaut mieux être seule que mal accompagnée. Je trouve nos hommes trop machos: ils sont ouverts pour piocher dans les revenus des femmes et partager avec elles les dépenses quotidiennes, mais refusent de l'aider à la maison. Le mariage est une forme cachée d'esclavage», explique la jeune Linda. Et d'ajouter: «Chez mes parents, je vis comme une princesse, pourquoi devrait-je quitter le paradis et me jeter dans l'enfer conjugal?».

«Mes amies mariées ne sortent pas quand elles veulent. Elles ont des obligations et des responsabilités au quotidien. Elles manquent de sommeil et s'occupent de moins en moins d'elles-mêmes. Quand elles sortent, c'est toujours en famille, flanquées de leurs enfants qui courent partout. Bref, c'est l'enfer!», explique Narjess, 25 petits printemps. «Je me lève quand je veux. Je sors, je fais la fête, je dors quand je veux... et j'aime ça! Il n'y a pas pire qu'un mariage pour casser cette ambiance joviale. Comme je suis une fêtarde invétérée, je préfère ne pas m'engager», ajoute-t-elle.

L'infidélité en question

Asma, quant-à-elle, ne craint pas le mariage en tant que tel, mais l'infidélité, un phénomène qui, selon elle, prend de l'ampleur dans la société tunisienne où des hommes et des femmes mariés n'hésitent pas à s'engager dans une relation extra-conjugale. «Ils papillonnent et se permettent des escapades. Et cela se passe dans toutes les catégories sociales, et peu importe l'âge», dit-elle.

Asma ajoute que les salons de thé huppés sont remplis de jeunes filles fréquentant des hommes mariés, et d'un certain âge. «Dans les cafés, on voit ces hommes aux cheveux grisonnants qui rient aux éclats avec des filles ayant l'âge de leurs enfants. Ils passent du bon temps à l'extérieur, mais je suis sûre qu'une fois à la maison, ils affichent de nouveau leur mine patibulaire et leur mauvaise humeur», s'indigne-t-elle. Elle ajoute: «L'infidélité me fait peur, c'est une trahison. Si je me marie un jour, ce sera juste pour avoir un enfant. Je sais d'ores et déjà que mon futur mari, comme tant d'autres, ira voir ailleurs, à moins que je tombe sur la perle rare.»

D'autres jeunes filles célibataires estiment que le facteur économique est la première cause du célibat, d'autant que le mariage, en Tunisie, malgré l'évolution des moeurs, coûte encore une véritable fortune, en dépenses festives, mais aussi en équipement et ameublement du foyer conjugal.

Pression économique ou choix de vie

«Les traditions imposent des dépenses monstrueuses pour le mariage. Alors, quand on a des moyens limités, on ne se marie pas... à moins de tomber sur un homme riche qui peut tout prendre en charge», explique Hend. Et puis, tenir un foyer coûte également très cher, ajoute-t-elle. «Avec l'inflation galopante, tenir un foyer relève presque de l'impossible. Entre les dépenses pour les couches bébé et le lait, je me demande comment les pauvres parents d'aujourd'hui arrivent-ils à gérer leurs maigres revenus», s'interroge-t-elle.

Selon les chiffres de l'Office national de la famille et de la population (ONFP), 34% des Tunisiens âgés de 25 à 34 ans restent célibataires en raison du coût élevé du mariage, 22% expliquent leur célibat par le chômage et 22% l'incombent à la difficulté de trouver un logement et de payer un loyer.

Pour les 22% restants, le célibat est, cependant, un choix de vie. Ces derniers préfèrent prendre leur temps et profiter le plus longtemps possible de leur «éternelle jeunesse». Il est donc révolu le temps où l'objectif du mariage venait juste après les études et... parfois même avant.