A l'occasion du 168e anniversaire de l'abolition de l'esclavage en Tunisie, l'Association tunisienne de soutien des minorités (ASMT) a mis en ligne une vidéo de sensibilisation contre le racisme. VIDEO.
Par Yüsra N. M'hiri
Le spot portant le slogan suivant : ''L'esclavage a été aboli mais le racisme est toujours là'', a été réalisé par des Tunisiens noirs, qui s'amusent à faire de l'autodérision, en reprenant des surnoms racistes que les blancs leur donnent habituellement.
A travers cette communication décalée, l'ATSM dénonce le racisme des Tunisiens, que ces derniers tentent de cacher par pudeur, mais qu'ils laissent s'inviter au quotidien.
L'esclavage a été aboli en Tunisie, le 23 janvier 1846, sous le règne d'Ahmed 1er Bey. Un siècle et demi après, le racisme n'a pas disparu dans le pays où la communauté noir reste ostracisée. Cela va des surnoms péjoratifs de «garagara», «bambola», «mkhachlef», qu'on donne souvent aux noirs, à la qualification de «ousif» qui veut dire esclave en arabe.
Les noirs bénéficient certes aujourd'hui d'une émancipation juridique, mais celle-ci n'est pas traduite sur le plan socio-culturel, les mariages mixtes étant restés très rares en Tunisie.
Des Tunisiens manifestent contre le racisme à Tunis.
Le racisme, jamais assumé, mais toujours latent et diffus, sévit encore dans les domaines de l'emploi ou de la politique. Les Tunisiens noirs sont souvent exclus des hautes fonctions de l'administration. Pour preuve : il n'y a jamais eu un ministre noir depuis l'indépendance du pays en 1956. Et dans l'Assemblée actuelle, il n'y a pas un seul député noir. Quand ils accèdent aux responsabilités, ils sont souvent raillés pour la couleur de leur peau. Nejiba Hamrouni, secrétaire générale du Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), en a fait les frais. Le journal ''Al-Dhamir'', proche du parti islamiste Ennahdha, l'a souvent prise pour cible de ses attaques racistes.
Les Tunisiens noirs constituent une minorité, mais qui reste relativement importante – 15-20% de la population, selon une statistique avancée par l'association Adam –, compte tenu des différents brassages de populations que le pays a connu au cours de son histoire.
La Tunisie, rappelons-le, avait donné son nom antique, Africa, à tout le continent noir et ses échanges, humains, commerciaux et culturels, avec l'Afrique sub-saharienne remontent à l'aube des temps. Il y a également une forte imprégnation de la culture et des traditions populaires en Tunisie par les influences sub-sahariennes.