Ahmed-Abbassi-Banniere

Ahmed Abbassi, un tunisien de 27 ans, présenté comme un «bio-terroriste» appartenant au réseau Al-Qaida, a été pris au piège d'une manipulation d'un agent du FBI. Il pourrait être libéré dans quelques jours.

Par Imed Bahri

Cent heures de conversations enregistrées ont convaincu la police américaine qu'elle allait arrêter le «terroriste du siècle». Ce n'est, apparemment pas le cas. Retour sur ce qui ressemble à une méprise...

Dangereux terroriste ou pauvre victime?

L'affaire a été examinée, mardi dernier, par le tribunal fédéral de Manhattan. Les écoutes ont laissé croire que le dangereux «terroriste», étudiant tunisien de l'Université Laval, au Canada, allait utiliser des produits chimiques pour commettre le plus grand massacre de l'Histoire. Ils montraient aussi Abbassi du doigt comme celui qui aurait «radicalisé» Chiheb Esseghaier, un autre étudiant tunisien, originaire de la Cité El-Ghazela, à Tunis, arrêté à Montréal en avril 2013, parce qu'il aurait eu l'intention de faire dérailler un train de VIA Rail entre Toronto et New York.

«Ils ont basé leurs affaires sur rien! Mon frère voulait venir s'installer avec sa femme à Québec pour étudier et faire sa vie. Les gens doivent savoir qu'il n'a jamais été impliqué dans quoi que ce soit d'illégal», a plaidé sa soeur.

Sabrina Shroff, l'avocate de Abbassi, a pu cependant démontrer à la cour que le présumé «bio-terroriste» n'est qu'une pauvre victime d'une manipulation orchestrée par un agent du FBI, qui l'a fait venir aux Etats-Unis pour le faire accuser dans une affaire née de son imagination. La démonstration a poussé le ministère public à abandonner l'accusation de terrorisme, tout en maintenant deux autres chefs d'accusation et proposer au prévenu un arrangement à condition de plaider coupable. Il risquerait alors tout au plus 6 mois de prison, pour falsification d'une déclaration en vue d'obtenir une carte verte et un visa de travail lui permettant d'entrer aux États-Unis.

A défaut d'attraper des terroristes, on les crée

Ahmed-AbbassiL'affaire a commencé alors qu'Ahmed Abbassi était au Canada avant son départ pour les USA en mars 2013. L'avocate a démontré que l'agent, en contact avec Abbassi au téléphone ainsi qu'avec sa famille, lui a promis de lui assurer une carrière et de l'aider à obtenir un visa. Dès son arrivée, aux States, il l'a mis sur écoute et toutes leurs conversations, bien entendu manipulées, étaient enregistrées.

Le procureur général a déclaré que le Tunisien a fait part de ses intentions de faire sauter des immeubles et de commettre des attentats en Amérique ou ailleurs et de recruter des combattants pour Al-Qaïda. Il aurait aussi pensé contaminer l'eau et l'air avec des bactéries et tuer 100.000 personnes. Pour sa défense, l'avocate a déclaré que c'est la preuve qu'il est «dérangé».

Le 22 avril, Abbassi fut arrêté par la police pour terrorisme et inculpé pour fausses déclarations lorsqu'il avait signé le formulaire de l'immigration et pour préparation d'actes terroristes, risquant une peine de prison de 50 ans.

Mardi, le procureur du gouvernement Michael Ferrara a annoncé en Cour fédérale, à Manhattan, avoir présenté à Abbassi un projet d'entente visant à obtenir une reconnaissance de culpabilité de sa part, mais qui n'aurait aucune implication liée au terrorisme. S'il accepte l'offre du ministère public, le Tunisien pourrait être libre dès la semaine prochaine, quand il reviendra devant la juge Miriam Goldman Cedarbaum pour faire part de sa décision.

Au bout du compte, le malheureux sera peut-être condamné à une courte peine et expulsé en Tunisie après l'application de la sentence.

Morale de l'histoire: quand on ne peut pas attraper les terroristes, on les crée de toute pièce. Une spécialité somme toute américaine!

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