Le système éducatif tunisien s’est inscrit, dès les premières années de l’indépendance, au cœur du processus d’édification d’un Etat national moderne et d’une société ouverte sur le présent et habilitée à faire face aux défis conjoncturels. Il fut, pendant les premières décennies de l’ère postcoloniale, un motif de fierté pour toute la nation et la voie de médiation la plus naturelle entre les aspirations des citoyens à une formation performante et à une vie meilleure et les besoins du pays en cadres moyens et supérieurs.
Les mutations de l’école depuis 1956
Bâti autour d’un véritable consensus national, ce système dut subir des transformations économiques, sociales et culturelles profondes, de nature tant endogène qu’exogène, qui finirent par estomper sa vocation première et par altérer son image, sa mission et l’efficacité de son action.
L’école se transforma, durant des années, en un espace de conflit, et parfois même de confrontation, entre les partenaires, normalement solidaires du processus éducatif: l’administration, les élèves, les enseignants, les syndicats et les parents… La nature directive et rigide du régime politique en vigueur depuis 1987 accentua ces malentendus et renforça la rupture entre l’administration et ses partenaires naturels. Le résultat immédiat fut que la Tunisie paya un coût social et humain exorbitant: l’échec scolaire de masse et les inégalités sociales et régionales en matière d’accès à un enseignement de qualité.
La révolution du 14 janvier 2011 révéla au grand jour les multiples malentendus et les profonds dysfonctionnements du système. Dans certains établissements, le rejet brutal de l’école, de son personnel administratif, et parfois même des enseignants, donna lieu à des débordements spectaculaires que ni la révolution, ni la démocratie, ni le respect des libertés individuelles, longtemps muselées, ne peuvent autoriser.
Pour une école citoyenne
Comment l’institution éducative, qui explique pour une grande part le haut niveau de conscience et de civisme dont firent preuve les citoyens tunisiens durant la révolution, peut-elle se transformer en un foyer de ressentiment, de violence et d’exclusion?
Quelle est la nature du travail à effectuer, à tous les niveaux, et quel rôle assigner à l’éducation à la citoyenneté, pour restaurer la vocation première de l’école et en faire un foyer de tolérance, de dialogue, de civisme, un rempart contre toutes les dérives individuelles ou collectives, contre tous les sectarismes?
Quel rôle, quels objectifs, quelles approches et quels contenus pédagogiques pour une école citoyenne, au cœur du processus de démocratisation des pratiques sociales et culturelles, foyer vivant de production du savoir et catalyseur de la créativité des apprenants?
Le colloque ambitionne de répondre à toutes ces questions et de déterminer, ce faisant, la place et le rôle de l’école dans la transition démocratique initiée par la révolution du 14 janvier 2011.
L’école tunisienne, qui joua un rôle déterminant de facteur de promotion et d’intégration sociale et de catalyseur de l’unité nationale, a plus que jamais besoin d’assumer pleinement son rôle social, scientifique et culturel et de faire de l’éducation à la citoyenneté le socle sûr de la transition démocratique en cours.
L’éducation se doit d’être le principal levier de transformation de la nouvelle Tunisie, afin d’assurer un enseignement démocratique et de qualité à l’ensemble des enfants du pays.
La rencontre des 7 et 8 juillet permettra aux experts et aux représentants des différents corps et associations concernés (administrations, élèves, parents d’élèves, syndicats…) de passer en revue et de discuter les stratégies scolaires adoptées dans des pays qui ont fait, ou qui font, comme la Tunisie, l’expérience de la transition démocratique.
Source : communiqué.