Il est possible d'éviter les ruptures brutales, de préserver un tant soit peu la légitimité et d'assurer une relance du processus démocratique et une meilleure gestion des affaires du pays... dans la continuité.
Par Dhafer Charrad*
Il est impossible, à l'évidence, de concilier l'inconciliable et de faire converger deux positions diamétralement opposées: celle bataillant pour un maintien de l'Assemblée nationale constituante (ANC) et du gouvernement provisoire et celle bataillant pour leur dissolution.
Cette situation de blocage risque de durer beaucoup trop longtemps, avec des risques de dérapages dangereux dont personne ne peut prévoir les conséquences.
Compte tenu de l'équilibre des forces en présence, le bras de fer risque de durer indéfiniment, d'épuiser toutes les parties et de mettre le pays à genoux.
La panacée simple proposée et qui doit bien entendu être affinée par les spécialistes consiste à remplacer le gouvernement et l'ANC par un mini-gouvernement et une mini-ANC.
Le mini-gouvernement
Ce n'est un mystère pour personne que les gouvernements Hamadi Jebali et Ali Larayedh ont tous deux lamentablement échoué et mènent le pays vers la faillite et le chaos, et ce n'est pas un 3e ou un 4e gouvernement issu de la Troïka, la coalition tripartite au pouvoir dominée par le parti islamiste Ennahdha, qui changera quoi que ce soit à la situation, même avec quelques autres ministres venus d'autres partis pour soi-disant «élargir la base du gouvernement», comme le répètent les dirigeants d'Ennahdha.
Nous n'avons aucunement besoin d'un gouvernement pléthorique avec une majorité de ministres effacés, sans apport et inutiles pour le pays au cours de la situation transitoire exceptionnelle et difficile que traverse le pays.
L'unique choix est la mise en place d'un gouvernement restreint, composé de spécialistes, technocrates et compétents ne faisant partie d'aucun parti et n'ayant aucune ambition politique, mais aussi motivé et uni seulement par son amour pour le pays et par sa crainte pour l'avenir sombre qui le guette.
Ce choix est absolument unique, indispensable et extrêmement urgent et n'est même pas discutable aux yeux de la majorité des Tunisiens.
Ce gouvernement doit être composé de personnages à forte personnalité, courageux, tellement cleans et tellement compétents, chacun dans son domaine, que le chef du gouvernement actuel, qui pourra garder son poste, sera incapable d'influencer et aura du mal à interférer dans leur travail et dans les décisions qu'ils jugeront utiles pour le bien du pays.
La mini-ANC
Il est flagrant sauf pour les aveugles d'esprit que nous n'avons pas besoin d'une ANC composée de 217 députés, dont une grande majorité de béni-oui-oui, sans aucune compétence, sans CV présentable et sans aucune valeur ajoutée.
La mini-ANC que je propose sera composée uniquement d'un représentant de chaque parti ou formation représentés à l'ANC, soit un peu moins d'une vingtaine de députés.
Ce groupe restreint et compétent car logiquement composé des meilleurs éléments de chaque formation politique parlementaire, sera évidement plus efficace, plus rapide et plus pertinent dans les travaux, choix et décisions qu'il aura à entreprendre et à faire dans le cadre actuel des travaux de l'ANC.
Bien entendu, ce groupe devra commencer obligatoirement par se décharger de la tâche d'achèvement de la constitution et devra la confier à maximum 5 nos meilleurs experts en droit constitutionnel.
Ces experts à qui on va (et on doit) faire confiance auront toute la liberté pour achever au plus vite la correction et la finalisation de la constitution, avec la seule obligation de demander l'avis de la mini-ANC, pour tous les points à caractère purement politique.
Les points litigieux présentés à la mini-ANC seront discutés lors de réunions télévisées dans un souci de transparence et seront soumis au vote en cas de persistance de désaccords.
Lors de ces votes, chaque député aura une voix simple car il est grand temps pour tout le monde d'apprendre à faire passer ses idées par la force de conviction au lieu de compter uniquement sur le nombre des simples suiveurs et exécutants, partisans de son propre bord.
Enfin, et pour ne pas écorcher son égo, l'actuel président de l'ANC pourra présider cette mini-ANC à la seule condition qu'il accepte de laisser tomber son fameux marteau ainsi que la possibilité de couper le micro, dont il abuse souvent à l'égard des députés de l'opposition.
Je crois beaucoup en cette proposition, qui outre les dépenses faramineuses qu'elle nous épargnera, a l'avantage de maintenir l'ANC, de maintenir 2 présidents à leur poste et de confier les rênes du pays à des gens intelligents, compétents et sûrement meilleurs que ceux qui gèrent nos affaires depuis 2 ans.
Le seul inconvénient mineur de cette proposition est le nombre de personnes qui ne bénéficieront plus, du jour au lendemain, de salaires et d'avantages indécents et immérités sur le dos du peuple qui souffre et n'arrive plus à joindre les deux bouts, et j'espère que ça ne sera pas un vil motif pour faire capoter ce projet.
J'espère de tout cœur que cette proposition soit entendue, prise en main et affinée par nos hommes politiques et mise en pratique dans les plus brefs délais
A bon entendeur...
* Diplômé en sciences économiques et planification.