De Ben Ali à Marzouki, nous sommes passés d'un extrême à l'autre: d'un président terrible à un président rigolo. Dans les deux cas, c'est l'institution présidentielle qui est dévoyée.
Par Jamila Ben Mustapha*
Personne comme le président provisoire de la république, Moncef Marzouk, n'aura aussi bien réussi à démystifier la fonction présidentielle! Sur ce plan-là, il s'est révélé être un véritable patriote, et personne n'a le droit d'ignorer ces services inattendus et très particuliers qu'il a rendus à la nation.
Espérons que sur ce point, il sera aussi un président de transition car, entre la terreur qu'on fait naître et les moqueries qu'on suscite, il y a le respect qu'on inspire et que nous avons un besoin vital de ressentir à l'égard de celui qui nous représentera, respect qui n'exclura pas, bien entendu, une attitude de vigilance critique vis-à-vis de son comportement politique.
C'est en effet le président provisoire qui a fourni l'occasion, par son «oubli» de la carte d'identité – se croirait-il au-dessus des lois? – à une simple employée de municipalité de le faire partir bredouille la première fois, sans qu'il puisse s'inscrire sur les listes électorales, dans une démarche inutile – puisqu'il est déjà inscrit – mais qui se voulait pédagogique et exemplaire. Sur ce dernier point, l'entreprise est ratée.
Le jour où il partira, une catégorie de journalistes – les caricaturistes – le regrettera sincèrement car elle n'aura probablement plus un exemple de comportement public suscitant autant sa verve à «se mettre sous la dent».
Nul ne doit méconnaître qu'il a effectivement contribué à consolider les institutions balbutiantes de la démocratie en donnant mille occasions à la liberté d'expression de s'exercer pour dénoncer et manifester l'attitude scandalisée des observateurs de la vie politique devant ses erreurs à répétition et ses multiples écarts de conduite: qu'il en soit remercié!
* Universitaire.
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