Les jihadistes, qui coupent les têtes de leurs victimes, traduisent la profonde pathologie collective: celle d'une civilisation qui est, malheureusement, la nôtre.
Par Jamila Ben Mustapha*
L'assassinat de l'agent de la garde nationale, Hassen Soltani, avant-hier soir, à Touiref (gouvernorat du Kef), montre que la mort naturelle n'est pas le summum de l'horreur et qu'il y a pire qu'elle.
Pleurer chez soi un être cher décédé à la suite d'une maladie comporte, sans qu'on le sache, une certaine douceur, par rapport à d'autres situations plus terribles: la disparition au loin d'un proche avec un corps jamais trouvé a l'inconvénient de ne pas permettre au deuil de s'accomplir.
Mais la mort brutale du père de Hassen Soltani à la suite de la vue du cadavre de son fils mutilé dont la tête a été séparée du corps, et ceci, non à la suite d'un accident, mais d'un crime volontaire, prouve, même si le mort ne sent plus rien, que l'être humain tient autant à l'intégrité du corps vivant qu'à celle du corps mort.
Le martyr de la garde nationale Hassen Soltani.
Le découpage d'un cadavre, dont on entend parler de temps en temps ailleurs que chez nous, se fait à contre-coeur par un assassin pour faire disparaître les preuves de son crime, ou est l'oeuvre isolée de déséquilibrés notoires.
Sa pratique fréquente actuelle par certains jihadistes dont certains brandissent en riant, dans la guerre en Syrie, des têtes de victimes, comme nous l'avons vu dans des vidéos, relève autant du crime que de la pathologie collective: celle de la civilisation dont nous faisons partie, puisque ces barbares du Kef, qui ont accompli de sang-froid cette horreur sur un innocent, sont malheureusement, et à notre grande honte, nos compatriotes !
* Universitaire.
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