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Parmi les maux qui ont provoqué les émeutes ayant conduit à la révolution du 14 janvier 2011, il y a, bien sûr, le chômage, la pauvreté et les très bas salaires, responsables de la précarité sociale.

Par Rafik Souidi


Tant qu’on n’a pas avancé dans le règlement de ces trois problèmes, qui rongent le corps social et crée des situation de tension dans plusieurs régions du pays, la révolution tunisienne n’aura pas atteint l’un de ses principaux objectifs : rétablir la dignité de chaque citoyen.

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Image prise dans la région de Souk El Jemaa (nord-ouest).

Un impôt de solidarité pour vaincre la pauvreté

Pour la pauvreté, il conviendrait de procéder à un recensement démographique afin d’identifier avec précision les ménages qui vivent réellement sous le seuil de pauvreté. Ce seuil devrait être défini avec réalisme par rapport aux spécificités du pays et en veillant à distinguer les cas urbains de ceux de la ruralité.

Un impôt de solidarité devrait être instauré qui serait exclusivement consacré au traitement de la pauvreté. Il serait prélevé sur les revenus des personnes physiques. Les recettes fiscales ainsi générées seraient affectées à une caisse de solidarité qui serait gérée de manière autonome comme c’est actuellement le cas pour les retraites et ceci sous l’étroite surveillance de la Cour des Comptes.

Afin de ne pas encourager l’assistanat, ces aides seraient en priorité destinées aux démunis qui ne seraient pas en état de travailler.

La forme de ces aides devrait être étudiée avec minutie pour éviter les fraudes: virements postaux, timbres alimentaires, aides en nature, gratuité de l’électricité et de l’eau, gratuité des soins, gratuité des transports, etc. De plus, de lourdes sanctions devraient être prévues pour dissuader les éventuels fraudeurs.
Enfin, une attention particulière devrait être portée au monde rural où la misère est très répandue et où souvent les services basiques ne sont pas disponibles.

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La mal-vie dans les zones rurales.

Une politique de relance pour résorber le chômage.

Pour le chômage, sa résorption nécessite une forte croissance économique et un effort de formation professionnelle intensif, en particulier pour les jeunes diplômés universitaires. Les perspectives des besoins en main d’œuvre de la Libye pourraient également le soulager dans sa composante non universitaire.
Une politique de relance vigoureuse par le soutien de la demande interne accompagnée de réformes structurelles – caisse de compensation, secteur public à restructurer, importations sauvages, économie clandestine, etc. – est possible.

Quant au traitement social du chômage, y compris des jeunes, ce n’est pas à l’Etat de le couvrir par des allocations mais aux caisses sociales dans le cadre d’une assurance-chômage qui serait financée par les salariés du privé, les fonctionnaires et les professions libérales en gage de solidarité.

Il faudrait aussi faire la place aux nouveaux arrivants sur le marché du travail et rendre systématiques les mises à la retraite au-delà de 60 ans.
Cependant, tous ces efforts seraient vains sans une révolution des mentalités: la propagation de l’esprit entrepreneurial chez les jeunes diplômés et la lutte contre l’esprit bureaucratique au sein de l’administration publique.

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Manifestation de chômeurs devant le gouvernorat de Sidi Bouzid.

Relever les minimas sociaux

Pour les bas salaires, l’action prioritaire est l’augmentation significative des minimas sociaux (Smig, Smag). Aussi, le relèvement à 320 dinars du Smig annoncé par les partenaires sociaux va dans le bon sens, de même que le rapprochement entre le Smig et le Smag.

En conclusion, c’est tout l’édifice de la sécurité sociale du pays qui doit être remis à plat pour en combler les failles béantes et cela devrait également concerner la généralisation de la couverture médicale.

Il ne s’agit pas de bâtir une autre usine à gaz comme la caisse de compensation et ses dérives, qui asphyxierait les agents économiques, mais de dégager les ressources raisonnablement envisageables et de mettre en place progressivement des outils efficients pour réduire ostensiblement la précarité en Tunisie.