Cet article à contre-courant de ce climat révolutionnaire jusqu’au-boutiste suscitera sans doute quelques réactions critiques mais, pour l’amour de la Tunisie et en raison du contexte économique et géopolitique, il se veut au moins réaliste.
Vox populi et rumeur révolutionnaire
Sous l’ancien régime, on ne pouvait parler ou écrire que pour louer Sidi Ben Ali. Toute plume ou parole libre était interdite sous peine de grands risques. L’un des plus grands bénéfices de l’ère post 14 janvier est sans doute le droit à l’information et à la liberté d’expression. Mais voilà que, ô grand paradoxe, sous prétexte que la vox populi ou la rumeur révolutionnaire, a condamné un homme d’affaire, un homme politique, etc., sans preuves, il devient interdit de l’interviewer. Pire, certains qui ne faisaient que fumer la chicha toute la journée au café avant le 14 janvier se permettent maintenant d’accuser des personnes, qui luttaient avant le 14 janvier contre Ben Ali, d’avoir retourné la veste juste parce qu’elles mènent une enquête sur une personnalité politique tunisienne honni!
Où va-t-on? Au nom de quoi, ne peut-on être informé librement? Si un blogueur ou un journaliste fait un article sur un personnage que l’on estime corrompu ou je ne sais quoi, libre ensuite au lecteur de faire son jugement, de considérer que le journaliste ou blogueur est un mercenaire de la plume qui fait plus de la propagande qu’un simple article. Libre au lecteur, s’il a des preuves contre le personnage, de les avancer afin d’informer les lecteurs de la supercherie. Un blog, ça se fait en cinq minutes et c’est gratuit! Il peut même saisir la justice et déposer plainte contre ledit personnage. Par contre, s’il n’y a pas de preuves contre le lui, alors jouons le jeu de ne pas tomber dans le délit d’intention. Quelqu’un connaît il les intentions intérieures des gens, peut-il lire dans la pensée des autres?
Il ne s’agit pas ici d’être naïf mais simplement de bâtir un système où seuls les faits comptent. Nous sommes sortis d’un temps où le délit d’intention était la norme. Est-ce pour y revenir au nom de la révolution? Staline avait fait la même chose au nom des principes révolutionnaires léninistes pour au final donner lieu à une période pire que celle que les Russes connaissaient sous le Tsar.
Insultes, faux témoignages et rumeurs calomnieuses
Ce qui est le plus injuste, ce sont ces soi-disant révolutionnaires qui profitent de l’anonymat d’internet. Ils confondent champs de bataille médiatique et débat d’idées. Ainsi, sans parler des insultes, invectives et diffamations, voilà que de graves et fausses informations circulent sur des personnalités voire même des inconnus. Je dis grave car cela peut déraper à tout moment. Ces fausses informations étant, par les temps qui courent, où beaucoup de Tunisiens ont la haine de l’ancien régime, de véritables appels au crime.
Ainsi, dernièrement, en surfant sur internet, je suis tombé sur un article où l’on montrait la photo, le nom et le prénom d’un internaute tunisien en indiquant que c’était un ancien du Rcd, qu’il militait dans tel parti politique et qu’il fallait donc s’opposer à lui à tout prix. Quand on recherche sur internet, on ne trouve rien sur la cible de cette mauvaise blague.
Je prends cet exemple anecdotique car l’individu concerné est un gars du peuple sans aucune importance. Qui nous dit alors que tout cela n’est pas plus qu’un règlement de compte entre voisins. Le voisin accusateur profitant de l’air du temps pour se venger en accusant l’individu montré d’être un ancien du Rcd et lui causer des ennuis?
Est-ce pour cela que la révolution a été faite, accuser, comme sous l’ancien régime, des innocents? Dès qu’une personne a été accusée sur internet, vu la rapidité de circulation de l’information, il est très difficile de réparer l’erreur si l’information est fausse. Ceux qui se sont sacrifiés durant cette révolution nous ont donné un cadeau précieux, un puissant pouvoir. La possibilité de dire aux autres nos pensées, de nous exprimer. Va-t-on se servir de ce trésor pour ne débiter qu’insultes, faux témoignages et rumeurs calomnieuses!
Passé le quart d’heure de défoulement dû à 23 ans de mutisme forcé, le mitraillage médiatique qui part dans tous les sens n’a plus lieu d’être. Attention aux dérapages, cela pourrait d’ailleurs servir de prétexte aux vrais antirévolutionnaire pour re-verrouiller le système de l’information au prétexte qu’il y a trop de débordements, de diffamations, de menaces, etc.
A suivre :
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