Tarak Arfaoui écrit – Quinze jours de gouvernance, et autant de jours de maladresses et de balbutiements. Qu’en sera-t-il du gouvernement Hamadi Jebali dans quelques mois ?
En temps normal, gouverner un pays n’est pas une promenade de santé, cela nécessite une stature, un bagage et une expérience politique qui ne sont pas à la portée du commun des mortels. Que dire alors de gouverner un pays en ébullition ou tout est à reconstruire ?
La recette miracle du populisme
Le gouvernement provisoire tunisien s’est courageusement mis à cette tâche extraordinaire en ayant le culot de ne présenter aucun programme politique. Cette coalition contre nature a «pacsé» politiquement pour cette noble cause de «maslaha watanya» (intérêt national), pilule magique d’abord, facilement avalée par une bonne partie de l’électorat mais qui commence rapidement à délivrer des soubresauts inquiétants.
Quinze jours après sa constitution, le gouvernement baigne dans la cacophonie ; le Premier ministre semble confondre son parti avec les institutions républicaines ; on s’est très vite découvert un clone de président présent à toutes les cérémonies officielles en jouant au gourou incontournable ; on s’est élu un président, un vrai, qui s’est rapidement fourvoyé dans des pitreries populistes et s’est couvert de ridicule.
Les hésitations, le laxisme sécuritaire, le sectarisme et le copinage politique risquent de mener à l’impasse d’un passé récent. La recette miracle du populisme ne trompe personne ni dans le langage des discours présidentiels ni dans les agissements, sachant que le machiavélisme politique ne peut nourrir le peuple.
D’une bévue à l’autre
Avait-on vraiment besoin de la visite de Haniyeh à ce moment précis en Tunisie ? Alors que le marasme social est endémique, on organise en son honneur des meetings sur fond de nationalisme arabe pour remotiver en vain les troupes et faire resurgir en passant les vieux démons de l’antisémitisme.
Avait-on besoin de laisser pourrir l’université tenue en otage par une poignée de Salafistes par solidarité idéologique ?
Avait-on besoin de tabasser des universitaires, des journalistes et des représentants de la société civile, qui manifestaient pacifiquement, pour montrer son intransigeance ?
Avait-on besoin de se payer la tête de tous les journalistes en leur désignant comme au bon vieux temps des patrons aux ordres du pouvoir et au passé ô combien douteux ?
Est-ce de l’ingénuité que de déléguer des ministres dans des meetings populaires se terminant en queue de poisson sous les huées ?
Avait-on besoin de ce spectacle désastreux des états-majors de la Troïka unis dans le gouvernement et se désavouant les uns des autres par communiqués de presse ?
Quinze jours de gouvernance et autant de jours de maladresses et de balbutiements. Qu’en sera-t-il dans quelques mois ?