La bonne graine semée par le gouvernement Caid Essebsi pourra bien faire fleurir, dans un avenir proche, la plante verte de la prospérité sur le sol fertile de la Tunisie.
Par Tarak Arfaoui
Béji Caied Essebsi, l’ex-Premier ministre du gouvernement transitoire -et qu’on n’a plus besoin de présente-r, nous a gratifiés, lors de son récent passage sur Nessma TV, d’un moment de pur bonheur de communication politique, où la vivacité du verbe dans un langage purement tunisien accessible à tous, les réflexions pertinentes, les réponses pondérées et la vision politique d’un grand commis de l’Etat, ont amèrement mis à nu, par l’effet de comparaison, le fossé qui le sépare de nos gouvernants actuels, qui n’en finissent pas de patauger dans leur traditionnel double langage, leur amateurisme, et l’absence de toute vision politique claire et précise dans laquelle les citoyens peuvent à l’avenir se projeter.
M. Caid Essebsi et les invités présents qui ont participé au débat – même si on peut regretter qu’ils soient tous acquis à sa cause et fascinés par son personnage, ce qui a réduit la crédibilité de l’émission – ont montré que la Tunisie est capable d’enfanter une élite politique responsable, moderne et progressiste, tout en étant attachée à ses racines culturelles, sans étroitesse d’esprit ni extrémisme.
Le gouvernement provisoire, qui avait conduit les affaires du pays en une période révolutionnaire critique, a su tenir le cap en gérant les conflits urgents, et engager progressivement le pays sur le bon chemin en préparant des élections démocratiques, ce qui était déjà un exploit.
Les vainqueurs de ces élections, les islamistes d’Ennahdha, une fois passée l’euphorie de la victoire, sont en train de réaliser, même en s’alliant à d’autres partenaires, que l’exercice du pouvoir sans expérience, sans compétence ni de vrais hommes politiques dignes de ce nom aux commandes, risque de les conduire vers la banqueroute.
Beji Caïd Essebsi
On n’a pas le droit de nommer n’importe qui comme ministre quel que soit son militantisme et ses sacrifices passés. L’expérience de l’Etat et de ses rouages administratifs est cruciale pour un homme politique. De même que la culture politique s’acquiert par l’exercice et non pas seulement par l’activisme à partir de l’étranger ou dans les geôles.
Le corporatisme transposé au sein du gouvernement est une maladie pernicieuse qui finira par gangrener ses fondements et l’amateurisme criard de certains membres du gouvernement qui n’ont aucune carrure et aucune compétence, ainsi qu’au plus haut sommet de l’Etat, devient inquiétant.
La Tunisie n’a pas besoin actuellement de calculs politiques étroits à visées partisanes et électoralistes. L’ivraie arrosée par la haine et l’extrémisme ne peut rien faire pousser. L’exemple typique de l’extrême indulgence du pouvoir vis-à-vis des graves exactions des Salafistes est caricatural de l’état d’esprit de nos gouvernants actuels.
A ce rythme-là et sans une prise de conscience rapide de la «troïka» (la coalition tripartite au pouvoir formée d’Ennahdha, du Congrès pour la république et d’Ettakatol) de la gravité de ses tergiversations, force est de constater que la bonne graine semée par le gouvernement provisoire de M. Caid Essebsi, pour peu que le peuple le lui permette, pourra bien faire fleurir dans un avenir proche la plante verte de la prospérité sur le sol fertile de notre chère Tunisie.