Le mégaprojet TuNur qui va occuper 100 Km² de nos terres aux fins de produire l’électricité verte à exporter vers l’Europe voisine pourrait aussi aider à produire 6 Km3 d’eau dessalée pour développer la céréaliculture irriguée.
Par Mohamed Habib Cheikh Khalifa*
La production céréalière tunisienne subit les aléas climatiques de plein fouet. Depuis la fin des années quatre-vingts, la seule certitude qu’elle a pu assurer c’est garantir la disponibilité des semences locales par le recours à l’irrigation! Par ailleurs, ceci n’est plus le cas puisqu’on a introduit les semences d’importation pour le blé dur, notre emblème national!
A- Une céréaliculture de subsistance :
Le tableau suivant, établi sur la base des statistiques de l’Ins, donne un aperçu de la production moyenne pour le quinquennat 2006/2010. Celle-ci couvre 45% de nos besoins!
Produits |
Prod. en 1000 T |
Superf. en 1000 ha |
Rendement |
en Q/ha |
Tn/Fr% |
Tunisie |
France |
||||
Blé dur |
990 |
702 |
14 ,10 |
50,3 |
29,82 |
Blé tendre |
226 |
128 |
17,65 |
72,5 |
24,55 |
Orge |
446 |
540 |
8,25 |
64,1 |
14,35 |
Totaux |
1 662 |
1 370 |
Les rendements constatés sont très faibles et erratiques et leurs rapports à ceux de la France sont très parlants. On peut dire qu’on est en présence d’une céréaliculture de subsistance qui ne peut suffire à nourrir la population!
B- Les importations de céréales:
Pour faire face aux 55% manquant à nos besoins de consommation locale, on fait recours régulièrement aux importations. L’incidence de la facture en coût et frets pesant sur notre balance de paiement dépasse largement le milliard de dinars par an. Les importations moyennes pour le même quinquennat 2006/2010 sont détaillées au tableau suivant:
Produits |
Importation en 1 000 T |
Facture en 1000$ |
|
Blé Dur |
570 |
347,70 $/t |
198 189 |
Blé Tendre |
1 036 |
282,88 $/t |
293 064 |
Orge |
406 |
270,46 $/t |
109 807 |
Total |
2012 |
|
601 060 |
Soit au cour du même jour 1 000 $ = 1.596.2 TND = 959 411 000 TND Fob |
Champ de blé sur la route de Bizerte. Ph. Nachoua.
C- Irrigation d’appoint :
Pour parer aux besoins du pays, il y a lieu d’améliorer et réguler les rendements par le recours à une irrigation d’appoint systémique en suivant les besoins des plants selon le cycle végétatif afin de parer aux insuffisances hydrométriques constatées. Un important gap de productivité à gagner! Les besoins d’eau d’irrigation nécessaire sont déterminés selon l’empreinte hydrique de ces cultures sous nos latitudes comme suit:
Besoin en eau pour améliorer les rendements
Production supplémentaire |
Eau en m3 pour produire/1T |
Demande d’eau d’irrigation en km3 |
570 |
2 550 |
1,453 |
1 036 |
2 250 |
2,331 |
406 |
3 810 |
1,547 |
Total d’eau à mobiliser de sources non conventionnelles pour assurer l’autosuffisance |
5,331 Km3 |
D- Une céréaliculture d’autosuffisance:
La consommation des céréales du pays s’élevant à 3.674.000 tonnes peut être assurée par une production locale de qualité à condition de garantir la fourniture de l’eau nécessaire à cet effet.
Comment développer les surfaces irriguées pour la créréaculture.
En 2009, les responsables de l’Union tunisienne de l’agriculture e de la pêche (Utap) avançaient que les excellents résultats de l’irrigué ont dépassé la moyenne de 50 quintaux à l’hectare. «On a même obtenu dans quelques parcelles irriguées du côté d’Oued Souani dans le gouvernorat du Kef des résultats atteignant 90 quintaux à l’hectare de blé dur et 95 quintaux à l’hectare de blé tendre», affirmaient-t-ils. Les rendements moyens auxquels on aspire restent, somme toute, à la portée et n’ont rien d’exceptionnel par rapport à la production en irrigué comme explicités au tableau suivant:
Culture |
Autosuffisance en 1000T |
Rendement escompté Q/ha |
Superficie en 1000 ha |
Blé dur |
1 560 |
30 |
520 |
Blé tendre |
1 262 |
40 |
315 |
Orges |
852 |
20 |
426 |
Totaux |
3 674 |
|
1361 |
E- Gisement de 300.000 emplois:
En matière de création d’emploi, les productions végétales permettent de mobiliser en moyenne 17 journées de travail par 1.000 m3 d’eau d’irrigation consommée.
L’injection des 5.331 millions de m3 d’eau dans nos champs à céréales va permettre la création de pas moins de 90.627.000 journées de travail, soit 302.000 postes d’emploi permanant. Le tiers de nos chômeurs de longues durées seront employés et ce en plus de l’économie en devises attendue! Le Graal en somme est à portée de la volonté politique de la «troïka», la coalition tripartite au pouvoir, lors de sa négociation d’avec les promoteurs du projet TuNur
F- Les sources d’eau non conventionnelles:
Il s’agit de d’eau dessalée en sous-produits de la production d’électricité solaire par les centrales thermique solaire (Concentrated Solar Power, Csp).
En effet, chaque km² de nos terres, équipé de la sorte, peut produire 250 millions de kWh et 60 millions de m3 d’eau dessalée.
Il faut produire davantage d'eau pour l'irrigation.
Le mégaprojet TuNur que les pouvoirs publics postrévolutionnaires sont en train d’étudier le dossier pour lui permettre d’occuper 100 Km² de nos terres aux fins de produire l’électricité verte à exporter vers l’Europe voisine, doivent en exiger qu’il adopte le procédé de cogénération en assurant ainsi la production des 6 km3 inhérente au processus de refroidissement des centrales solaires. Il faut même en faire la condition sine-qua-none de l’octroi des autorisations nécessaire à son implantation sur nos terres aussi bien pour lui ou pour tout prétendant de son acabit. Il y va du plein-emploi de nos jeunes.
Ce volume représente le tiers des besoins de notre économie en matière de ressource hydrique qui lui manquaient.
En effet, outre les 5,331 Km3 pour assurer notre autosuffisance alimentaire en céréales, le solde 0,669 km3 sera très utile à la Sonede pour assurer la fourniture à la population d’eau en quantité suffisante et aux normes de l’Organisation mondiale de la santé (Oms).
Ainsi le projet, s’il pourrait-être agréé en prenant en compte les intérêts de notre chère patrie, par la pugnacité des fins négociateurs que sont nos nationalistes et vaillant gouvernants armés de la légitimité des urnes, assurera de la sorte une ère nouvelle d’échange équitable: eau contre lumière. Le mégaprojet nous permettra l’emploi de plus de 300.000 de nos jeunes!
On réalisera ainsi les objectifs majeurs de notre glorieuse révolution: l’emploi et la dignité!
* Ancien Pdg.
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