Jusqu’à il y a moins d’une année, Mustapha Ben Jaâfar rejetait catégoriquement toute alliance avec les islamistes d’Ennahdha. Aujourd’hui, il est en passe de devenir leur guignol. Jeudi, il s'est (presque) transformé en chauffeur de salle, lors de leur 9e congrès...

Par Ridha Kéfi


Tous ceux qui cherchent à comprendre les raisons de l’alignement inconditionnel de Mustapha Ben jaâfar sur les positions d’Ennahdha et sa complaisance mielleuse vis-à-vis du parti islamiste au pouvoir, dont, hier encore, tout le séparait sur les plans idéologique et politique, ne trouvent qu’une seule explication plausible : le chef d’Ettakatol, qu’Ennahdha a intronisé président de l’Assemblée nationale constituante (Anc), espère être le prochain candidat… du parti islamiste à la présidence de la république, étant presque acquis que l’actuel titulaire du poste ne satisfait plus ses employeurs.

Si M. Ben Jaâfar est dans cet état d’esprit où les ambitions personnelles autorisent toutes sortes de concessions et d’abdications, on serait curieux de savoir ce qu’en pensent les militants d’Ettakatol, ou ce qui en restent qui, il y a à peine une année, juraient tous leurs dieux qu’ils ne s’allieraient jamais avec Ennahdha.

Petit rappel historique pour rafraîchir certaines mémoires trop oublieuses: en 2005, Ben Jaâfar et son parti, alors appelé Forum démocratique pour les libertés et le travail (Fdtl) avaient refusé de s’associer au Front du 18 octobre opposé à Ben Ali parce qu’il… comptait des islamistes.

A l’époque, quand il en coûtait de s’allier aux islamistes, Nejib Chebbi et Hamma Hammami faisaient partie, eux, de ce Front.

Comme quoi, le courage politique, on l’a ou on ne l’a pas. L’opportunisme aussi… Et M. Ben Jaâfar montre aujourd’hui qu’il en a à revendre. Pas le courage, l’opportunisme.

Jeudi, prononçant son discours à l'ouverture du 9e congrès d'Ennahdha, au Palais des Expositions du Kram, il a cru devoir jouer sur les sentiments, s'attardant sur les souffrances passées des militants islamistes et soulignant l'identité arabo-musulmane des Tunisiens, sous les applaudissements nourries des congressistes.

En matière de reniements politiques, on aura donc tout de vu, jusqu'à Ben Jaâfar chauffeur de salle pour les islamistes.