Interviewé jeudi matin par Express FM, Allain Jules, journaliste français ayant révélé l’arrestation, à l’aéroport de Paris-Orly, du dirigent d’Ennahdha Belgacem Ferchichi, a affirmé que ce dernier transportait des centaines de milliers de dollars dans plusieurs sacs.
Allain Jules, invité de la matinale Expresso, animé par Wassim Ben Larbi, s’est référé à des sources douanières et policières française pour affirmer que «Belgacem Ferchichi a été arrêté, le 18 août, durant deux heures au moins, à l'aéroport de Paris-Orly, alors qu’il débarquait d’un avion en provenance de Ryad (Arabie Saoudite), un avion qui assurait le vol Doha-Ryad-Paris, pour transport frauduleux de devises, des coupures de gros billets de 100 dollars estimés selon les sources du journaliste à des centaines de milliers de dollars fourrés dans plusieurs sacs.»
En réponse aux questions des douaniers français, M. Ferchichi aurait déclaré, selon Allain Jules, que «l’argent était destiné aux militants de son parti Ennahdha à l’extérieur du pays».
Le journaliste, qui a tenu à préciser que «ses sources ont bien vérifié, au moment de la garde à vue, que Belgacem Ferchichi ne figurait pas sur une quelconque liste d’Interpol», contrairement à ce qu’a annoncé le parti Ennahdha dans un communiqué publié dimanche pour justifier cette arrestation, a affirmé ignorer «tout de l’usage dont les douaniers français ont fait de l’argent saisi», s’interrogeant si ces derniers ont gardé les sacs pleins d’argent ou s’ils l’ont remis à M. Ferchichi, qui aurait alors poursuivi sa mission de transport de fonds.
«Selon le récit d’Allain Jules, Belgacem Ferchichi a été ensuite relâché après qu’il eut montré son passeport diplomatique et après des contacts entre le Quai d’Orsay et le ministère tunisien des Affaires étrangères», écrit Express FM.
Si ces informations se confirmaient, cela aurait de lourdes significations. Conclusions préliminaires, qui restent à vérifier après qu'Ennahdha et le gouvernement Hamadi Jebali auront clarifié cette affaire, ce qu'ils devraient faire incessamment pour éviter que l'affaire ne pue davantage:
- Ennahdha et le gouvernement recourraient donc au mensonge le plus plat pour tromper les Tunisiens et masquer leurs bêtises. Or, on le sait, qui ment une fois peut mentir tout le temps. Peut-on, par conséquent, continuer de faire confiance à ces «gens-là»?
- la confusion Etat-parti (ici gouvernement Jebali et parti Ennahdha) est déjà une réalité. La preuve: M. Ferchichi, conseiller du président du gouvernement Hamadi Jebali, assurerait, dans cette affaire, une mission au profit du parti Ennahdha dont il est l’un des hauts dirigeants;
- l’affaire confirmerait les soupçons de financements occultes et donc illégaux du parti Ennahdha par une partie étrangère, ici en l’occurrence l’Arabie saoudite. Si cela venait à se confirmer, les Tunisiens ne manqueraient pas d'en tirer les conclusions qui s'imposent;
- si l'Arabie saoudite faisait un don de plusieurs centaines de milliers de dollars pour les militants d'Ennahdha à l'étranger, à quels montants s'élèveraient ses dons aux militants d'Ennahdha à l'intérieur du pays?
- si l'Arabie saoudite, allié secondaire d'Ennahdha, donnait autant d'argent, combien le Qatar, le principal allié et probablement aussi le principal donateur d'Ennahdha débourserait annuellement au profit du parti islamiste Ennahdha?
On pourrait multiplier les interrogations, sachant que les réponses n'aideraient pas à faire reluire l'image, déjà largement ternie, de ce parti. Reste qu'Ennahdha et le gouvernement Jebali sont tenus de répondre à ces accusations, leur silence ainsi que celui du gouvernement français sur ce qui s'apparente à une affaire d'Etat n'aideraient pas à dissiper les soupçons et les rumeurs.
R. K.