Les 10 individus exécutés suite à leur condamnation dans le procès du coup d’Etat de 1962 contre le président Habib Bourguiba peuvent-ils être considérés comme des «martyrs»?
Khaled Abid, porte-parole de la «Coordination vérité et justice», mais aussi historien du mouvement national, a, contre toute attente, utilisé le qualificatif de «martyrs» pour parler des ces putschistes menés par Lazhar Cheraïti, un ancien fellaga qui aurait espéré avoir plus d’égards au lendemain de l’indépendance du pays en 1956.
S’ils avaient réussi leur tentative de coup d’Etat, ces putschistes n’aurait-il pas plongé la Tunisie dans un cycle de violence politique qu’elle aurait eu du mal à se remettre, alors qu’elle se remettait difficilement de la bataille de Bizerte, en 1961?
Ce dérapage, de la part d’un historien, censé être un homme de science et de conscience, est très grave. Et on comprend que le ministère de la Défense nationale, qui vient de retrouver les restes de dépouilles de 5 parmi les 10 putschistes, ait démenti formellement l’inhumation de ces dépouilles au carré des martyrs du cimetière Essijoumi, comme l’avait annoncé, jeudi, M. Abid.
«Les déclarations de M. Abid n’engagent que lui-même», a en effet averti le ministère dans un communiqué, soulignant que cette personne ne fait pas partie de la commission militaire ad hoc chargée «pour des raisons humanitaires» de retrouver les dépouilles, et n’a aucun rapport avec le ministère de la Défense nationale.
Les dépouilles retrouvées, grâce aux efforts et moyens déployés par le ministère de la Défense nationale, dont l’analyse Adn, sont celles de Salah Hachani, Kbaeir Mahrezi, Hédi Gafsi, Ahmed Rahmouni et Abdelaziz Akremi, exécutés le 24 janvier 1963.
Leurs familles peuvent désormais faire leur deuil en leur offrant des sépultures dignes de leur mémoire. Mais le titre de martyr ne saurait sérieusement leur être attribué par la nation tunisienne. Ce serait vraiment dévoyer la mémoire de tous les vrais martyrs de la nation qui, eux, se sont sacrifiés pour la cause nationale et la libération de leur peuple. Et non pour… le pouvoir. N’est-ce pas M. Abid?
Imed Bahri