Après la chute d’Abdelwaheb Abdallah, son ennemi intime, Ghazi Mabrouk, qui vient d’être nommé Conseiller spécial de l’Observatoire européen du Maghreb, espère pouvoir louer de nouveau ses services à son pays.
Lobbyiste spécialisé dans les relations euro-méditerranéennes, Ghazi Mabrouk a officiellement informé le gouvernement de transition que, «depuis ce 14 janvier 2011, les réseaux d’influence, d’opinion et les relais médiatiques sur lesquels Abdelwaheb Abdallah s’était appuyé en Europe – et notamment en France – sont discrédités» et que «la vulgarisation, depuis la France, que couvrait jusque-là le dernier ambassadeur auprès de l’Unesco, est désormais décrédibilisée».
Réactivation des réseaux de la Tunisie en Europe
Le lobbyiste a précisé, dans sa lettre, qu’il «serait fâcheux de décrocher en ce moment, face au flottement et au vide actuel dans cette région, qui est le principal business-partner de la Tunisie et dont les décideurs économiques et les leaders d’opinion ont besoin d’être rassurés».
Le poste à pourvoir d’ambassadeur de Tunisie à l’Unesco, après la très opportune démission de son dernier titulaire, Mezri Haddad, demeure un pivot pour des actions extraterritoriales immédiates de reprise en mains des vecteurs d’image et de messages de la Tunisie en France et en Europe.
Il va donc falloir passer par une réactivation restructurée des réseaux et relais, sur des bases adaptées aux données politiques nouvelles, pour soutenir le processus électoral futur, prévenir et pallier les carences éventuelles que l’économie tunisienne risquerait de connaître en 2011, en matière de tourisme et d’investissements, a expliqué M. Mabrouk à Kapitalis.
Possibles poursuites contre Abdelwaheb Abdallah?
Le lobbyiste affirme avoir fait l’objet d’un boycott professionnel constant en Tunisie initié par Abdelwaheb Abdallah, le ministre conseiller politique de l’ex-président, aujourd’hui en résidence surveillée. Que lui reprochait le Goebbels de Ben Ali? Son «bourguibisme», qu’il aurait hérité de son... oncle Hédi Mabrouk, un proche de Bourguiba et ancien ambassadeur de Tunisie en France.
Ce boycott avait amené M. Mabrouk à s’installer en Europe dès 1988 où il fonda le premier journal maghrébin gratuit ‘‘Maghreb Flash’’ www.maghrebflash.com qui a été interdit de diffusion en Tunisie dès son troisième numéro, «sous la censure de Abdelwaheb Abdallah», souligne l’éditeur.
M. Mabrouk avait ensuite dû retirer sa candidature pour le secrétariat général de l’Union Pour la Méditerranée (UpM), en novembre 2008, face au blocage initié par le même M. Abdallah.
Aujourd’hui, le secrétariat général de l’UpM – à revitaliser en corrélation avec le processus euro-méditerranéen – reste plus ouvert que jamais à la Tunisie, après la démission du Jordanien Ahmad Massa’deh, si le gouvernement de transition en saisit l’opportunité.
A la question de savoir s’il va maintenant engager des poursuites judiciaires en Tunisie contre l’ex-ministre conseiller politique, M. Mabrouk répond par l’affirmative. Mais, tout en précisant qu’il «constitue actuellement un dossier relatif aux partenaires en communications de ce dernier en Europe», laissant entendre de probables arrangements financiers, il souligne qu’il attend auparavant de voir quels seront les chefs d’accusation que le gouvernement tunisien va retenir par ailleurs contre Abdelwaheb Abdallah, «auquel cas, je les laisserais faire leur travail, car ne serais pas un charognard face à un cadavre politique».
Les voies insondables du lobbysme
Ghazi Mabrouk est docteur en sciences politiques de l’Université de Paris, spécialiste des fonds souverains, délégué général auprès des Institutions Internationales, vice-président de l’Alliance économique européenne, ancien président exécutif de la Convention Euro Méditerranée sur le libre échange, ancien vice-président de la Commission Méditerranée au Conseil fédéral européen.
M. Mabrouk s’est engagé dans le secteur du lobbying, qui était encore un concept nouveau et porteur au sein d’une Union européenne naissante, en pleine phase d’élargissement. Il se spécialise ensuite dans les relations euro méditerranéennes et entame dès 1990 un certain nombre d’initiatives en faveur des entrepreneurs et grands groupes économiques de cette zone. Il engage également une politique de «lobbying d’affaires» à haut niveau intégrant hommes d’affaires, leaders d’opinion et célébrités.
Le lobbyiste vient d’être nommé Conseiller spécial de l’Observatoire européen du Maghreb, qui vient d’être créé à Bruxelles par le premier réseau leader européen de Public Affaires au sein des Institutions européennes.
Imed Bahri