Est-il permis de critiquer Iadh Ben Achour sans être traité de tous les noms et surtout sans être traité de non-démocrate? La question mérite plus que jamais le détour! Par Jamel Heni, Paris
La réaction du dignitaire de la deuxième chambre au communiqué d’une douzaine de membres mécontents de son tropisme pro-tajdid est pour le moins étrange! Le juriste le plus reconnu de la place, tape du poing sur la table, fait du mauvais sang et dénonce une diffamation! Il ne serait ni tajdidiste ni partial encore moins mentor des Femmes Démocrates!
Le recours absurde des personnalités publiques
Nous n’avons pas tous les éléments pour en juger et nous n’en avons aucune intention, mais l’ambiance dans les travées de la chambre des conseillers était prévisible! On voyait venir le pire en l’absence d’élection et suite à l’absurde recours au concept pré-démocratique et quasi royaliste des «personnalités publiques»!! Qu’est-ce en fait la légitimité de ce recours dans une institution représentative? En quoi une personne – fut-ce un génie – peut-elle représenter autre chose qu’elle même? L’unique critère de célébrité serait-il une garantie de compétence en matière constitutionnelle?
La commission de Ben Achour, désignée par fait de prince sous Ben Ali puis remisée par décret postérieur sous Ghannouchi 2, devait plancher sur une nouvelle constitution en définissant un code électoral et en élisant une commission ad hoc! Qu’est-ce qu’une actrice a à voir là-dedans? Ne voilà-t-il pas le malentendu fondamental remarquablement conçu par Pierre Bourdieu: la compétence culturelle autorise souvent son auteur à se croire dépositaire d’une compétence politique! Eh bien non! Comme tout, la constitution est une spécialité! On peut consulter des artistes et tout, c’est même nécessaire, mais que ces derniers en viennent à définir notre mode électoral et les normes constitutionnelles de notre assemblée, c’est une mauvaise blague, une usurpation pathétique! C'est un peu Ben Achour dans un vaudeville au théâtre municipal!
Deux légitimités irréconciliables
Acculé à une désignation et pour faire les choses dans les règles de l’art, n’aurait-il pas mieux valu de faire plus simple et plus indiqué! Choisir des constitutionnalistes et conduire une une série de consultations avec nos fameuses actrices puisqu’on y tient! (Je n’ai jamais compris pourquoi Jalila Baccar et pas Mouna Noureddine, pourquoi Sghaier Aoulad Ahmed et pas quelqu’un d’autre, qui au fait a décidé une fois pour toutes de la popularité des uns et des autres!)
Les artistes ne sont pas plus compétents que les autres en matière de constitution, ils sont des citoyens comme vous et moi et doivent être invités dans l’auditoire et non dans les travées pendant que les spécialistes de la constitution travaillent!
Nous pensons que l’origine des hostilités ouvertes dans la commission de Ben Achour réside dans ces légitimités irréconciliables: les spécialistes et les autres! Or ces «autres» sont largement plus bavards et plus nombreux! Peut-être pour cacher leur incompétence!