Un véritable phénomène l’ancien premier ministre tunisien. A 86 ans, il est frais comme un jeune coq. On dirait un jeune de 20 ans de Jebel Lahmar prêt à boxer son prochain pour une parole de travers. Un véritable Mohammed Ali de la politique.

Par Jamel Dridi


 

S’il y avait une agence de notation pour les hommes politiques, il aurait un triple A. Ce compatriote te cloue le bec en moins de deux. Il n’y a pas si longtemps, il a même traité des fonctionnaires de police de singes car il les trouvait trop agités. Qui d’autre que lui peut faire ça en Tunisie ? Hein, qui d’autre sauf un vieux de la vieille ayant bourlingué dans une dictature comme un poisson dans l’eau ?


Caid Essebsi avec Angela Merkel

Le Mohamed Ali de la politique

Vraiment, il a une pêche d’enfer à rendre jaloux n’importe quel politicien du monde entier. Généralement, à 60 ans les politiciens sont fatigués, à 70 ans ils prennent leur retraite et à 80 on n’entend plus parler d’eux. Même cet escroc de Berlusconi ne lui arrive pas à la cheville à si Beji.

Mais les talents de si Beji ne s’arrêtent pas là. Ce jeune homme a un jeu de jambes politique incroyable. Il te feinte sans que tu t’en aperçoives. Dernièrement, alors qu’on le pensait à la retraite, il a décidé de remettre le bleu de travail pour fourrer son nez dans la jeune démocratie tunisienne afin de coaliser quelques partis libéraux sortis du placard.

Tous les grands hommes politiques du monde ont une photo de si Beji dans leur bureau un peu comme du temps de Ben Ali dans tous les «hanouts» (petits commerces) de Tunisie. Mais pour Si Beji, contrairement à Ben Ali, c’est volontaire car tous les politiciens du monde entier rêvent de faire un stage en Tunisie avec si Beji pour prendre un peu de cet électricité qui déborde de lui et de ce sophisme qui fait tourner la tête aux peuples. Tous aimeraient être increvables comme si Beji. Ils aimeraient tant ne pas laisser la place aux jeunes qui se bousculent au portillon et durer, durer, durer, durer…


Caid Essebsi avec le petit jeune Zapatero

Une référence pour les plus grands

D’ailleurs tiens, Obama, en baisse dans les sondages il y a quelques mois, l’avait appelé pour une séance de re-motivation et pour avoir des conseils pour durer longtemps en politique. Le résultat est aujourd’hui là. La semaine dernière, un sondage a montré que si l’élection avait lieu aujourd’hui, Obama écraserait haut la main son opposant républicain, Newt Grighrinch.

Mieux, on vient d’apprendre que si Beji allait se rendre en France dans quelques jours afin de coacher Sarkozy dont la défaite électorale aux prochaines élections est annoncée par toute la presse. Vas-y Si Beji, à défaut de nous rapporter des contrats, des crédits qui ramèneraient le calme en Tunisie, vas le coacher ce petit jeune.

Bejinator le retour

Mais Si Beji ne veut pas s’arrêter là comme dit plus haut. Dernièrement, on l’a vu s’entraîner dur dans une salle de musculation dans la banlieue nord de La Soukra. Une salle où s’entraîne tous les jeunes espoirs du plus important promoteur de boxe politique tunisien, alias the petit-marionnettiste. Pectoraux gonflés, corps en V, Beji aurait dit face au miroir où il se regardait et devant tous les autres prétendants plus jeunes qui s’entraînent aussi dans cette salle, qu’il allait faire son come-back sur la scène politique tunisienne et qu’il allait montrer aux amateurs de la politique ce que c’était qu’un vrai «zaïm». Depuis, ces copains l’appellent amicalement Bejinator, le retour, tout en se faisant des clins d’œil.


Caid Essebsi avec le petit Nicolas

Attention, jeunes politiques démocrates, Beji n’a donc pas dit son dernier mot. Ça va swinguer à Tunis. Les démocrates n’ont qu’à bien se tenir. Beji, le vrai, le mad in tunisa, 1 million de km au compteur, le tout terrain de la politique, mieux que la meilleure des voitures allemandes made in Allemagne, va pimenter la jeune démocratie tunisienne et nous refaire goûter aux voluptés beylicales, bourguibiennes et benalienne. Souvenez-vous, c’était un temps où il n’y avait aucun problème en Tunisie. Pas de débats, pas de manifestations, pas de sit-in. Normal, c’était le temps de l’autocratie et de la dictature. Un autre temps. Un temps du passé pour ne pas dire dépassé.

Mais tout cela, Si Beji, il s’en fout. Pour lui, les politiciens d’aujourd’hui sont trop mous. Des politiciens «nouvelle génération», pleins de malfaçons. Ils hésitent, ils ne veulent pas envoyer la police à tout va, ils réfléchissent tout le temps, bref, ils sont trop lents et trop démocrates. De son temps Si Beji, comme quand il était chef de la sûreté, il n’y avait pas d’hésitation. Il y avait de l’action et pas grave s’il y avait un peu d’hémoglobine ici ou là. Au contraire, c’était le signe qu’on tenait bien le pays. De son temps à si Beji, la démocratie c’était pour les petits timides.


Beji Caid Essebsi

La dernière blague de Si Beji

Ou est-ce une façon de prendre ta retraite Si Beji ? Une façon par l’absurde et le contraire de nous montrer à quel point la Tunisie a avancé en rejetant les one man shows d’hommes forts comme toi aidés de marionnettistes professionnels cachés dans l’ombre de leur bureau. Ah Si Beji, on reconnaît là ton goût pour la provocation. Tu es vraiment un vieux de la vieille même si tu n’es plus en phase avec ton temps.

Allez bonne retraite l’ancien – le vrai Mad in Tunisia –, il faut que l’on s’occupe des jeunes qui se bousculent aux portes du pouvoir. Eux sont en apprentissage de la démocratie et font faire, comme tout jeune qui apprend, quelquefois des sorties de route – pas si graves – à la toute nouvelle Tunisie démocratique.