Selon le lobbyiste tunisien Lyès Ben Chédli, les choses se sont compliquées pour le journaliste tunisien Lotfi Messaoudi et ses trois coéquipiers d’Al-Jazira retenus en Libye.


Cette information est d’autant plus inquiétante que l’ambassadeur de Tunisie en Libye, Slaheddine Jemmali, qui avait annoncé, le 23 mars, au journal de 20 heures de la 1ère chaîne nationale, que les autorités libyennes lui auraient promis de libérer «sous 24 heures» le journaliste tunisien et ses trois collègues (le Mauritanien Ahmad Val Ould El-Dine, le Norvégien Ammar Al-Hamdane et le Britannique Kamal Ataloua), n’a plus fait de déclaration depuis.

Les Libyens ont changé d’attitude
M. Ben Chédli, consultant international, patron de ‘‘LBC Consulting’’, basé entre Londres, Genève et Tunis, qui a ses entrées dans l’entourage du leader libyen Mouammar Kadhafi, a tenté une médiation auprès des Libyens pour essayer de libérer les journalistes de la chaîne qatarie.
«Les Libyens ont changé d’attitude vis-à-vis de notre frère et compatriote», a-t-il affirmé à Kapitalis, ajoutant que Messaoudi et ses collègues sont sous interrogatoire et qu’il na pas été «en mesure de lui parler par téléphone» comme les autorités le lui avaient promis.
«Il se trouve actuellement dans un lieu tenu secret sous l’autorité de Seïf-El-Islam Kadhafi. Visiblement les Libyens reprochent à l’équipe d’Al Jazira d’être entrée sur leur territoire depuis l’Egypte et d’avoir filmé voire propagé des informations sans autorisation préalable», explique Ben Chédli.
Selon lui, les Libyens reprocheraient à la chaîne qatarie «la diffusion d’informations erronées à la communauté internationale portant atteinte au peuple libyen». «Il semblerait aussi qu’ils puissent leur coller aussi le chef d’accusation d’espionnage», souligne le lobbyiste. Qui ajoute «C’est du copier-coller de l’affaire des ‘‘infirmières bulgares’’».

Un état d’extrême nervosité
«J’ai trouvé aujourd’hui [dimanche, Ndlr] mes interlocuteurs dans un état d’extrême nervosité et très impatients, parfois moi même remontés contre notre pays. Je crois qu’ils nous en veulent de n’avoir pas pris une position officielle contre l’attaque militaire de la communauté internationale, mais également ils désapprouvent le fait que certains opposants au régime Kadhafi aient pu agir contre leurs intérêts depuis la Tunisie», explique encore M. Ben Chédli.
Le lobbyiste va plus loin en affirmant: «Le danger c’est que les Libyens sont extrêmement bien renseignés sur notre situation intérieure. Ils m’ont cité quelques noms et des adresses où auraient lieu ces réunions contre leur régime tout en m’indiquant qu’ils avaient posté plusieurs de leurs hommes sur tout notre territoire et qu’il y aurait même des groupes armés sans plus de précision. Il semblerait aussi qu’ils soient à court d’approvisionnement énergétique et voudraient acheter en Tunisie», précise encore Ben Chédli.
Le Franco-tunisien, qui a des liens de parenté avec l’ancien président Habib Bourguiba, affirme que ses discussions avec les autorités libyennes vont reprendre aujourd’hui et qu’il a mis un point d’orgue à sa coopération avec elles: avoir la possibilité de parler à Lotfi Messaoudi «avant de pouvoir continuer à agir pour eux dans les milieux politiques, économiques et artistiques occidentaux pour favoriser un dialogue diplomatique», précise Ben Chédli.

Créer des comités pour la libération de Lotfi Messaoudi
Le lobbyiste, qui avoue ainsi, sans précaution aucune, faire du lobbying politique pour un régime aux abois, au ban de la communauté internationale et qui risque de tomber d’un moment à l’autre, ne se gêne pas de conseiller aussi aux médias en Tunisie de cesser «absolument» et «immédiatement», toutes «attaques directes contre Mouammar Kadhafi» et, dans le même temps, de «créer des comités de soutien à travers tout le pays pour la libération de Lotfi Messaoudi sans aucune hostilité au régime libyen». Et pour cause, explique-t-il: «Les libyens sont extrêmement sensibles au sentiment de la rue tunisienne, le colonel Kadhafi avait beaucoup investi en terme d’image auprès des milieux tunisiens (politiques et économiques).»

Kapitalis publie ces informations avec toutes les précautions d’usage, tout en espérant que certaines positions, attribuées par le lobbyiste aux autorités libyennes, ne sont, en réalité, que des messages codés visant à influencer la position tunisienne dans le conflit qui oppose désormais la Libye de Kadhafi à la communauté internationale.

Imed Bahri

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