«Ce n’est qu’en donnant un espoir de réussite sociale aux jeunes que l’on tarira à terme les filières de recrutement tant des réseaux criminels que des groupes terroristes» au Maghreb, souligne un rapport intitulé «Pour une sécurité durable au Maghreb, une chance pour la région, un engagement pour l’Union européenne (UE)», réalisé par l’Institut Thomas More, basé à Bruxelles et à Paris.

 


Dans son rapport, rendu public, mercredi 7 avril, à Bruxelles, le think tank indépendant estime que le Maghreb ne peut plus être considéré uniquement comme un «bouclier» pour l’Europe, mais doit s’insérer dans un réel partenariat régional, puis dans une logique de coopération avec l’UE afin de faire face aux défis communs que sont la gestion de l’immigration, la lutte contre les trafics, l’insécurité au Sahel, ainsi que la résolution du conflit au Sahara Occidental.

S’attaquer au chômage des jeunes
Le rapport appelle l’UE à renforcer sa coopération avec les pays du Maghreb et du Sahel pour lutter contre le «terrorisme et les nouvelles formes de criminalité émergentes» dans la région. Il invite également l’UE à «renforcer les moyens de lutte contre ces nouvelles menaces dans leur dimension maghrébo-sahélienne élargie».
L’instabilité de l’ensemble de la zone sahélienne, «où se croisent trafiquants et groupes terroristes, est devenue un danger commun» pour les pays de la région comme pour l’UE, souligne le rapport, ajoutant que «la recrudescence d’enlèvements de ressortissants occidentaux contre le paiement de rançons est «révélatrice de cette tendance».
«Toutefois, le développement et la sécurité durables imposent de s’attaquer en parallèle aux causes du problème», relèvent les auteurs du document. Parmi ces causes, ils insistent sur le chômage des jeunes. «Selon la Banque mondiale, il faudrait créer dans la région, entre 2000 et 2020, 16 millions d’emplois de plus pour les nouveaux arrivants sur le marché du travail et, si l’on tient compte du niveau de chômage, 22 millions d’emplois. En 2006, le taux de chômage du Maghreb se situait en effet à 12,8%, avec des chiffres bien plus élevés chez les jeunes : 37% au Maroc, et 66% en Algérie et en Tunisie. Cette gravité du chômage, à laquelle s’ajoute d’importantes inégalités économiques (…), alimente les tensions sociales», notent-ils, estimant par ailleurs que «ce n’est qu’en donnant un espoir de réussite sociale aux jeunes que l’on tarira à terme les filières de recrutement tant des réseaux criminels que des groupes terroristes».

Développer la coopération régionale
L’Institut Thomas More est également d’avis que le conflit du Sahara occidental est «source d’instabilité dans la région et demeure un frein au développement d’une coopération régionale pourtant indispensable». Ce dernier sujet, estiment les experts de l’institut, constitue la principale pomme de discorde du Maghreb, et entrave toute tentative de coopération intra-maghrébine, qui est absolument nécessaire pour le développement de la région dans son ensemble. Et pour cause : «La Tunisie à elle seule perdrait environ 20 000 emplois par an du fait de la non-existence de l’UMA et le manque à gagner en termes d’Investissements directs étrangers (IDE) est estimé à 3 milliards de dollars par an pour l’ensemble de la région alors qu’ils devraient au contraire être attirés par une zone de presque 100 millions de consommateurs».
Le think tank conclut en faisant remarquer qu’en définitive, «la construction d’une sécurité durable dans la région implique une approche multidimensionnelle, incluant les aspects sécuritaires aussi bien que politiques et économiques,  dans une vision bilatérale et régionale qui soit «profitable à tous». Elle implique notamment un appui européen aux réformes sociales et économiques, ainsi que son soutien au développement économique et à l’acquisition de biens d’infrastructures.

I. Bahri