«Si vis pacem, para bellum» (Si tu veux la paix, prépare la guerre), dit le vieil adage latin que nos opérateurs des télécoms sont en train d’appliquer avec une farouche détermination à ne rien lâcher. Très touchant…

 


Les dernières nouvelles du front indiquent que Tunisiana et Tunisie Telecom sont en train de fourbir leurs armes et de finasser leurs plans de bataille pour contrer l’arrivée tonitruante sur le marché du troisième mousquetaire, Orange en l’occurrence, opérateur de téléphonie fixe et mobile 3G. Ce dernier, un dur à cuire adossé au savoir-faire de son partenaire français, ne fait pas mystère de ses ambitions de conquête, mais il essaie de ménager ses effets et de se livrer avec une parcimonie calculée. D’autant que la mise en place de son réseau a pris plus de temps que prévu. Selon les plans de départ, Orange devait en effet commencer à commercialiser ses offres en janvier dernier.

Buzzer idiot
Dans cette sorte de poker menteur, où les indiscrétions, distillées par médias complaisants et campagnes de publicité tapageuses, font monter la sauce, à défaut de ménager un improbable suspense, chacun essaie de cacher son jeu, de bluffer, de buzzer idiot, dans l’espoir de pouvoir battre ses cartes le jour J.
A la guerre comme à la guerre. La main sur le cœur et la fleur au fusil. C’est la lutte finale… pour quelques parts d’un marché que l’on sait exigu, à peu près saturé – le taux de pénétration du mobile est de 98% – et qui n’est pas extensible à souhait. Qu’à cela ne tienne ! Le jeu en vaut toujours la chandelle. Car, pour espérer réussir un jour une sortie à l’internationale, il serait judicieux de renforcer préalablement ses positions à l’intérieur et de se doter de la taille critique nécessaire à la réalisation d’un tel dessein.
Quoi qu’il en soit, et en attendant de voir ces chers généraux battre campagne, un nouvel épisode de la guerre des trois est en train de faire jazzer tout Tunis. Il concerne la campagne d’affichage lancée la semaine dernière par Tunisie Télécom pour "réchauffer" son offre dénommée «Ahlan» (Bienvenue), offre généreuse s’il en est, puisqu’elle consiste à facturer une heure pour «seulement» 1 dinar. Ce n’est pas donné, c’est offert. Le problème, car problème il y a, c’est que cette offre est (soufflez-moi le mot !) téléphonée. «Ahlan» est, par un pur hasard, le nom choisi par Orange pour les cartes de téléphone prépayées (de 5 à 30 dinars) qu’elle s’apprête à commercialiser. Cherchez l’erreur…

Ciel, ma barbichette !
Certes, et on ne le sait que trop : les Tunisiens sont des champions du copier-coller. Par facilité ou par mimétisme. Ils répugnent à se creuser les méninges. Pourquoi feraient-ils preuve d’imagination, quand ils peuvent imiter, singer, plagier, contrefaire, marcher sur les pas des autres et sur leurs platebandes ? C’est moins fatigant et, surtout, moins couteux…
Bon, mais cela ne répond pas à la question de savoir qui de Tunisie Télécom ou d’Orange a copié sur l’autre. Question pour un dinar…
En attendant de percer ce mystère, il est permis de gloser sur les synergies qui sont en train de se mettre en place entre les trois partenaires qui sont obligés, malgré la bataille qu’ils se livrent déjà à distance, à coopérer. Tunisie Telecom n’a-t-il pas signé un contrat de roaming national avec Orange ? Et ce dernier, n’a-t-il pas loué quelques fibres optiques chez Tunisiana ? A ce jeu de «Je te tiens, tu me tiens par la barbichette», il est à craindre que ce seront, au final, les clients qui trinqueront.

Malek Neili