Nida Tounes Tunisie

Caïd Essebsi et les siens ne pourraient se passer plus longtemps d'une clarification définitive et convaincante à propos de l'identité du parti où se côtoient Destouriens, Rcdistes, libéraux et activistes de la gauche radicale.

Par Ridha Kéfi

Réuni, vendredi, à Tunis, le bureau exécutif du mouvement Nida Tounes affirme, dans une déclaration, avoir pris un ensemble de «mesures inhérentes à l'organisation interne du parti» sans pour autant en donner des détails. Contacté par l'agence Tap, le secrétaire général du mouvement Taieb Baccouche a préféré s'abstenir de donner des détails de ces mesures, se contentant d'affirmer que «les informations relayées autour d'un différend entre certains dirigeants du parti ont été considérablement amplifiées par les médias», précisant que les dirigeants de Nida Tounes ont décidé de ne pas se prononcer sur ce sujet.

Khemaies Ksila Faouzi Elloumi

La comédie du pouvoir.

Elloumi et Ksila à fleurets mouchetés

Cette réaction a minima – et qui sacrifie à la langue de bois habituelle des dirigeants politiques mis face à leurs contradictions – dénote, tout de même, une certaine gêne, tant il est vrai que les déclarations de l'homme d'affaires Faouzi Elloumi, dirigeant du mouvement, dans l'émission ''Saraha Raha'', samedi soir, sur Hannibal TV, a propos d'une certaine parenté (ou continuité) entre les partis du Néo-Destour et du Rassemblement constitutionnel démocratique (Rcd), anciens partis au pouvoir, et Nida Tounes, ont provoqué un petit séisme dans les rangs du parti, suscitant des réactions outrées, notamment de la part des députés du parti, et à leur tête Khemaïes Ksila.

Les médias n'ont, en réalité, rien amplifié: les noms d'oiseaux échangés entre MM Ksila et Elloumi sont là pour attester de la gravité de l'épisode.

Par ailleurs, les images diffusées par le parti sur sa page Facebook, où l'on voit tout le monde embrasser tout le monde, dans une comédie politique évidente, sont une opération de communication cachant mal un malaise profond, et qui risque de se poursuivre, tant qu'on n'a pas réglé définitivement la question de l'identité, du programme et des références historiques et politiques de ce parti qui ressemble à une auberge espagnole*.

La personnalité et le charisme du leader du parti, Béji Caïd Essebsi, ne sauraient, à eux seuls, cacher indéfiniment les contradictions idéologiques internes qui couvent au sein du parti ou les incompatibilités d'humeur entre certains de ses membres dirigeants.

Nida Tounes

Les opérations de Com'  sauraient-elles tenir compte de politique?

Une mise au point rapide s'impose

Selon le texte de la déclaration rendue publique vendredi, le bureau exécutif du parti Nida Tounes a mis l'accent sur la nécessité de poursuivre la mise en place des structures locales, régionales et nationales du parti, de manière à en faire «l'espace démocratique naturel et unique pour la diversité, le dialogue et l'unité partisane». Il a, également, souligné l'engagement à poursuivre l'action, aux côtés de ses partenaires à «l'Union pour la Tunisie», afin de relever les défis cruciaux auxquels fait face le pays.

Ces mots rassurent-ils vraiment les militants du parti et ses éventuels électeurs? Rien n'est moins sûr. Car en bottant ainsi en touche, faisant endosser aux médias la responsabilité de leurs propres problèmes, les dirigeants de Nida Tounes ne font que retarder de nouvelles secousses qui pourraient faire imploser leur parti.

A cet égard, rien ne vaut une mise au point rapide, définitive et convaincante sur l'identité du parti – qualifiée hier de «peu claire» par Rached Ghannouchi, président du parti Ennahdha – où se côtoient des gens venus d'horizons divers : Destouriens de longue date, Rcdistes contraints, libéraux pur jus, activistes de la gauche radicale, indépendants...

* - Une auberge espagnole est un endroit où chacun arrive avec ses provisions, ce qu'il aime, ce qu'il a prévu. On ne partage pas tous la même nourriture : il n'y a pas un menu, mais chacun mange ce qu'il a pris avec lui. Et l'expression désigne, par exemple, une idée où chacun comprend le sens qu'il amène.