L'Union européenne (UE) cherche à rendre plus lisible sa politique envers la Tunisie, tant l'incompréhension a paru s'installer dans l'esprit des Tunisiens.
Par Fathi B'Chir*
L'UE et la Tunisie feront, lundi 14 avril à Luxembourg, en marge du Conseil Affaires étrangères, un point complet de leurs relations dans le contexte des bouleversements que vit ce pays partenaire depuis 2011 et qui ont mis à mal son économie et sa sécurité.
Le point essentiel de cette dixième session du Conseil d'association sera de mesurer l'ampleur de l'appui apporté à la Tunisie par une UE qui s'était montrée à la fois circonspecte et qui est perçue comme peu prodigue ou pas suffisamment, en tout cas, pour aider ce pays à sortir de la double ornière politique et économique.
Une «vitrine démocratique»
L'UE s'efforcera surtout, lors de cette session, de rendre plus lisible sa politique envers ce pays, laquelle a frisé le «ratage», tant l'incompréhension a paru s'installer dans l'esprit des Tunisiens.
La récente visite du commissaire Stefan Füle (13-14 mars 2014) a permis de clarifier la position européenne. La levée des malentendus politiques était essentielle avec ce pays, dont l'UE veut faire la «vitrine démocratique» de son action dans une région en ébullition, marquée par l'émergence d'un courant se réclamant de la loi divine et paraissant, à ce titre, peu susceptible de s'insérer dans un jeu démocratique.
L'UE, surtout son service extérieur, comme quelques États membres (France et Allemagne), avait pris le pari de «démocratiser» les «islamistes» et de faire la démonstration de cette option en Tunisie (en comparaison de l'échec patent de ce courant en Égypte en particulier).
L'incompréhension que sa démarche a rencontrée a eu pour résultat de faire douter la société civile tunisienne de l'intérêt de la relation avec une Europe plus encline, lui a-t-il semblé, à «donner des leçons», qu'à proposer des appuis en monnaie sonnante et trébuchante.
Calmer les appréhensions tunisiennes
L'UE semble toutefois avoir tempéré ses ardeurs depuis. Elle entend corriger cette perception et devrait promettre, lundi à Luxembourg, qu'elle s'efforcera, dans l'ensemble des chantiers ouverts, de mieux entendre et d'interpréter plus finement la parole des citoyens tunisiens et d'expliquer les opportunités qu'elle offre à moyen et à long termes, plus que sur le court terme. Le cadre d'action sera le «plan d'action» en cours de négociation, au sujet duquel la Commission est prête à s'investir dans un «débat public ouvert», afin de calmer les appréhensions tunisiennes.
La réponse européenne serait ainsi plus en regard des attentes de ses interlocuteurs tunisiens, pour qui il est urgent de faire face à l'ampleur de la crise économique et sociale. L'UE en convient et note, elle aussi, dans une analyse communiquée aux États membres, que la crise est profonde et, pour en sortir, la Tunisie a besoin d'appuis, mais aussi de grandes réformes et d'accentuer son ancrage au marché intérieur européen. Outre l'aide «classique» (150 millions d'euros de crédits budgétaires environ par an), un appui macro-économique de 300 millions d'euros est envisagé et le «feu vert» du Parlement européen est attendu, probablement dès la session d'avril.
Son analyse porte aussi sur le champ politique, que l'UE voit comme un passage difficile. Elle promet de contribuer à la sortie de l'ornière par des appuis au processus électoral à venir (promis pour la fin 2014, mais le délai serait intenable), à la sécurité (un appui direct à la formation et la logistique est à l'étude). La Tunisie a tendance à devenir un pays de transit fréquemment en butte à des contraintes techniques et financières.
* Journaliste tunisien basé à Bruxelles.
Source : Agence Europe.
* Les titres et intertitres sont de la rédaction.
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