Pour célébrer le 2e anniversaire de l'assassinat du dirigeant de gauche Chokri Belaïd, Kapitalis publie la traduction de ses dernières interventions médiatiques.
Traduit de l'arabe tunisien par Abdellatif Ben Salem
Accusé le 29 novembre 2012 par Ali Larayedh d'être à l'origine des désordres que connait Siliana, Chokri Belaïd répond à son retour du Maroc, le 2 décembre 2012, au ministre de l'Intérieur, avec une rare énergie, réduisant à néant ses accusations et pulvérisant au passage toutes les tentatives de la Troïka et d'al-Nahda de faire porter à la formation politique de Belaïd la responsabilité des tous les maux que vit le pays...
Zied Lakhdar, Hamma Hammami et d'autres responsables et militant-e-s du Watad (unifié) et du Front populaire étaient venus l'attendre à l'aéroport pour lui témoigner leur solidarité contre la campagne haineuse orchestrée depuis des mois contre lui.
De nombreuses pancartes sont brandies sur lesquelles on pouvait lire: «Le Front Populaire ne permet pas qu'on salisse ses militants»; «Nous te défendrons Siliana»; «Les Nahdhaouis agents du colonialisme, réactionnaires et entremetteurs».
وكلاء الإستعمار نهضاوي رجعي سمسار
«Les militant-e-s du Front populaire constituent une nouvelle fois un facteur de trouble et de déstabilisation pour le gouvernement de la récupération de la Révolution. Le Front les dérange parce qu'il est résolu a fusionner avec le peuple et parce qu'il est déterminé à se ranger aux côtés de nos gens et de nos familles à Siliana, comme il l'a déjà fait à Sidi Bouzid, à el-Omrane, à Mateur, à Bousalem, à Gafsa, à Kasserine, à Gabès et comme il le fera dans toutes les batailles que mènera notre peuple.
Terminée l'ère du mépris (hogra) et de la peur. La peur a disparu, elle n'est plus dans le camp du peuple. Elle est au contraire dans celui du gouvernement de la honte. C'est bien ce gouvernement injuste et oppresseur aux ordres du Qatar qui panique aujourd'hui. Nous disons que ceux qui ont ordonné de tirer sur nos enfants à la chevrotine, qu'ils sont des assassins. Nous les traquerons et nous les traineront devant les tribunaux, nous leur ferons rendre gorge.
Ceux qui étaient, il n'y pas si longtemps, victimes sont devenus aujourd'hui les bourreaux du peuple tunisien. Dans l'hémicycle de l'Assemblée Constituante, Ali Larayedh se vantait en affirmant que ceux qui ont tiré ont accompli leur mission dans le cadre de la loi. Cela ne vous rappelle-t-il pas Béchir Tekari quand il a annoncé un certain 13 janvier 2014 à la télévision que les ordres de tir [contre nos martyrs] étaient conformes aux dispositions de la loi?
Nom : Ali Larayedh, profession : Rafik Haj Kacem.
Les militants crient à l'unisson:
"رش وكرتوش، التوانسة ما يخافوش"
(«Chevrotine, balles, les Tunisiens n'ont pas peur»)
«En guise de réponse nous leur disons que ces accusations ne sont pas nouvelles. Ils nous ont mis sur le dos la responsabilité de mouvements de protestation à Makthar, rebaptisé ironiquement par leurs propagandistes en Makthargrad (allusion à la résistance héroïque de Stalingrad), nous leur avons répondu qu'au Front populaire nous prenons cela pour un hommage involontaire. Souvenez-vous: le gouvernement provisoire d'Essebsi nous a fait porter, bien avant eux, le chapeau des événements de Siliana, et nous lui avons répondu. Ils ont prétendu également que nous sommes derrière les mouvements de Bousalem et de Sidi Bouzid, mais nous continuerons à voir dans ces imputations des médailles accrochées fièrement à nos poitrines. Y a-t-il en effet meilleures accusations contre le Front populaire que celles-ci? Cela ne prouve-t-il pas que nos bases, nos cadres et nos dirigeants se sont toujours rangés aux côtés du peuple.
Ce gouvernement est en train d'être jugé par le peuple de Tunisie, non par les tribunaux de Noureddine Bhiri (ministre islamiste de la Justice) mais par les tribunaux du peuple : il est jugé à Gabès lors de l'insurrection qui a duré trois semaines; à Kairouan et ses campagnes; à Sidi Bouzid, à Gafsa l'insurgée, à Siliana qui s'est soulevée contre la dictature durant une semaine en 1990, au même moment où le mouvement al-Nahda chantait encore les louanges de Ben Ali. A Siliana l'héroïque et à Makthar, qui avaient volé au secours de Tala et de Kasserine assiégées et sous le feu, tandis que ces gens étaient occupés à envoyer de Londres et de Paris des télégrammes d'appui et d'allégeance à Sakhr el-Matri. Gouvernement de traîtres et des valets, il vous reste beaucoup d'efforts à faire pour que vous soyez capables de menacer le dernier des lionceaux du Front populaire.
"الشعب يعاني في الأرياف يا حكومة الإلتفاف"
(«Le peuple souffre dans les régions rurales, gouvernement de la récupération»).
Camarades, il s'agit d'une nouvelle page du livre, d'une nouvelle bataille. Aujourd'hui comme hier et comme avant-hier, ils nous trouverons en travers de leur chemins à Siliana, au Kef, à Jendouba, à Sousse, à Monastir et dans la capitale, une épine dans leur gorge et un étendard claquant au vent, défendant le peuple, la liberté, le progrès, la démocratie et la justice sociale. Tant que nous demeurons unis, main dans la main, Front populaire, étendard haut levé, nous ne serons jamais vaincus parce que nous sommes la voix de ce peuple.»
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