Tunisie. Lettre ouverte à Mohamed Abbou, un dictateur en herbe

Lettre ouverte à un ancien opposant à Ben Ali qui se met cœur et âme au service d'une nouvelle dictature, celle du parti islamiste Ennahdha, et sombre dans une espèce de dérive autoritaire.

Par Boussaadia Habib*

En tant que citoyen tunisien fier et orgueilleux des acquis de notre révolution, je me dois de vous écrire pour vous rappeler vos devoirs de citoyen et vos obligations de politicien et chef de parti.

Après avoir été un éphémère ministre de la «troïka», la coalition au pouvoir dont fait partie votre parti, le Congrès pour la République (CpR), vous avez démissionné avec fracas et amassé un capital de sympathie inégalable pour un politique.

Malheureusement pour vous, plus le temps passe et puis vous sombrez dans une espèce dérive autoritaire digne des dictateurs qui ont terni l'image de la Tunisie.

Il suffit de vous rappeler votre menace et votre déclaration intimidante concernant la date fatidique du 23 octobre et la sentence qui frappera ceux qui oseront défier la constituante et la privation de sa légitimité.

Ensuite vous faites de l'équilibrisme pour être en adéquation avec le parti Ennahdha, qui conduit la «troïka», au point de devenir sa caisse de résonnance ou la voix du maitre; et vous voilà parti pour attaquer sans raison le parti Nida Tounes, comme si c'était le mal ou l'affliction qui ronge la Tunisie, comme si vos amis de la «troïka» étaient des anges descendus du ciel pour sauver la Tunisie mais se heurtent à des démons de l'ancien régime!

Ennahdha et le CpR dans la voie de l'autisme politique

Pour moi, simple citoyen, Nida Tounes regorge de patriotes alors que votre «troïka» ou, surtout, l'axe Ennahdha-CpR est un nid d'opportunistes. Pour preuve: Béji Caïd Essebsi a mené à bon port la Tunisie à un moment hyper délicat avec un gouvernement réduit à 15 ministres, qui ont mis en veilleuse leurs ambitions politiques, alors que la «troïka» avec ses 80 membres, leurs émoluments, leurs privilèges et ce que cela coûte au budget de l'Etat n'a pas rempli son contrat moral avec le peuple! Alors ça passe mal pour l'opinion publique qui n'est plus dupe des tractations entre Ennahdha et ses affidés qui ont décidé de la suivre dans la voie royale de l'autisme politique!

Non, M. Abbou, on ne peut dire que vous avez déçu, mais pas simplement, car vraiment, vous avez mis à bout les nerfs des gens adroits et éveillés. On remarquera aussi que, de son temps, Ben Ali, dans sa folie destructrice de toute contestation, vous a donné l'habit d'un opposant et d'un résistant; et il s'avère que vous n'êtes ni l'un ni l'autre.

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Mohamed Abbou ou quand l'ivresse du pouvoir fait tourner les têtes les mieux faites.

Vous êtes avocat et vous oubliez le droit dans vos déclarations, à telle enseigne que lors de votre dernière sortie médiatique, vous avez presque sommé les juges d'arrêter Kamel Eltaief! Est-ce une incitation à la subordination de la justice qu'on veut indépendante, émancipée et insoumise?

Non, M. Abbou, je vous suggère sincèrement de revoir votre copie, celle-là est plutôt pâle! Revoyez vos anciens principes que vous avez jetés aux orties pour plaire à vos mentors d'Ennahdha !

Relevez-vous et soyez digne, je vous le répète, car, à ce train là, votre CpR risque d'être baptisé Compromission pour la présidence de la république.

A bon entendeur salut !

• Médecin de pratique libre, musulman pratiquant, ayant accompli son pèlerinage.

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