A Rio en 1992, Le mouvement associatif vert s'est affirmé et, depuis la naissance du Forum social mondial (FSM) à Porto Allegre en 2001, il y eu une cohésion du mouvement à l'échelle planétaire, en tant que force de proposition.
Par Dr Salem Sahli*
Des messages alarmants se font entendre depuis quelques années sur l'état de la planète et son avenir. On nous signale pratiquement chaque semaine une nouvelle catastrophe écologique ou une nouvelle agression à la nature restée jusque là insoupçonnée. Une simple comparaison de l'état de la planète en 1970, 1980, 1990 et aujourd'hui illustre la vitesse croissante avec laquelle la situation se dégrade. On peut sérieusement se demander: si les choses continuent à ce rythme, combien de temps encore la planète restera-t-elle habitable?
Tous les clignotants sont au rouge
Notre planète est bien malade. Des commissions de spécialistes, à l'échelle mondiale, se sont réunies à plusieurs reprises. Une instrumentation sophistiquée a été mise au service de leurs enquêtes. Dans l'ensemble, les rapports concordent. Tous les clignotants sont au rouge.
Il serait difficile de sous-estimer la gravité de la situation. Les données de plus en plus précises sur la diminution de la couche d'ozone, sur l'accroissement du gaz carbonique dans l'atmosphère et sur la quantité de produits toxiques déversés dans la biosphère sont très préoccupantes. Même si on ne connaît pas avec certitude l'effet de ces modifications, on sait pourtant déjà qu'elles pourraient être graves. C'est suffisant pour justifier notre inquiétude. Un exemple : Les cinq années les plus chaudes du siècle dernier se situent toutes entre 1980 et 1990! Bien sûr, il peut s'agir tout simplement d'une «fluctuation statistique». Mais alors quelle fluctuation !
A la question «est-il trop tard?», il faut répondre d'un «non» volontaire. Les plaies que nous avons ouvertes peuvent encore guérir. Pour cela, il faut tout mettre en œuvre pour freiner le rouleau compresseur de la détérioration planétaire. Il faut maintenant beaucoup plus que de la bonne volonté. C'est une véritable croisade «d'assistance à planète en danger» qui doit rapidement se mettre en place.
Cohésion du mouvement associatif vert
Pour cette tâche urgente, toutes les forces vives doivent s'y atteler. Les gouvernements, les institutions, les scientifiques, les journalistes, les jeunes, les femmes, les responsables des villes, les entreprises, les syndicats et les ONGs. Le mouvement associatif vert était encore dans les limbes en 1972 lors de la Conférence de Stockholm. A Rio en 1992, il s'est affirmé et depuis la naissance du Forum social mondial à Porto Allegre en 2001, une cohésion du mouvement à l'échelle planétaire, en tant que force de proposition, s'est manifestée et les ONGs du nord comme du sud parlent d'une voix certes plurielle mais plus coordonnée. Il y a désormais aujourd'hui une prise de conscience de notre identité de «terriens» et rien ne vaut une cause commune pour rapprocher les gens.
La crise écologique contemporaine nous rappelle que cela ne pourra pas continuer indéfiniment. Malheureusement, les Etats-Unis continuent de faire cavalier seul tant sur les accords de Kyoto que sur l'aide au développement. Les dernières catastrophes naturelles qui viennent de les frapper les feront-elles changer d'avis? Espérons-le!
En attendant, pour survivre, le pauvre paysan africain continuera de couper les arbres de la forêt voisine. L'élévation du niveau de la mer, le réchauffement du climat, l'état de l'environnement aux Pays-Bas ou dans les Iles Maldives sont les derniers de ses soucis. Notre santé et notre avenir ne l'intéressent pas. Il a faim. Il est en situation de survie.
En d'autres termes, ce paysan africain, si on continue de l'ignorer, il pourrait bien nous empêcher de respirer. Voici une des leçons que les grands chefs d'Etats et de gouvernement des pays riches - qui alignent sommet sur sommet – devraient bien méditer. Pour l'instant, il semble qu'il y ait encore loin de la coupe aux lèvres.
Avant que le piège ne se referme
On ne compte plus les réunions et les sommets environnementaux souvent sponsorisés par ceux-là même qui polluent et qui nous bassinent avec le coup du robinet à fermer et de la lampe à éteindre. La plupart de ces grands-messes de l'écologie se sont terminées sur des échecs qu'il s'agisse du sommet de Kyoto en 1997 ou de celui de Copenhague en 2009, en passant par la conférence de Bali en 2007. Les «accords» y sont flous, sans chiffres ni contraintes, qui plus est, ne sont signés que par quelques états, souvent les plus riches et les plus pollueurs. Bref, que des vœux pieux et rien qui n'engage réellement personne.
Pour sauver les apparences, certains responsables politiques nous parlent de mini succès. Mais on ne nous fera pas prendre des vessies pour des lanternes. Il est manifestement plus facile de sauver la finance que de sauver la planète et le capitalisme forcené est en train de transformer la terre en une fosse commune. Les logiques économiques qui le sous-tendent sont incompatibles avec les lois naturelles et les mécanismes présidant à la reproduction du monde vivant.
En d'autres termes, l'écologie n'est pas soluble dans le capitalisme sauvage qui voit se retourner contre lui ses propres instruments. Le piège se referme sur nous, et faute d'un accord international, ambitieux, chiffré, équitable et juridiquement contraignant sur la réduction des gaz à effet de serre, nous allons droit au désastre. Les bouleversements climatiques risquant en effet de conduire à des points de non retour avec des impacts irréversibles sur les ressources naturelles: le sol, l'eau et l'air.
Pensez-vous que l'être humain est capable de vivre sans terres fertiles, sans eau et la tête dans un four? Assurément non.
* Président de l'Association d'éducation relative à l'environnement (Aere-Hammamet).