Si les Egyptiens ont échappé au cauchemar islamiste, en jetant leur dévolu sur le général Al-Sissi, il leur reste encore à parachever leur révolution volée.
Par Rachid Barnat
Le résultat de l'élection présidentielle égyptienne était attendu... et les méthodes d'y parvenir aussi! Dommage pour nos amis Egyptiens que les choses se soient passées de la sorte!
Devant la catastrophe qui ramenait le pays à des siècles en arrière et devant l'islamisation de la société qu'imposaient les Frères musulmans arrivés au pouvoir, qui en voudrait à un militaire d'avoir voulu mettre un terme à cette régression?
Si les égyptiens ont dû choisir entre la peste et le choléra, acceptant qu'un militaire couronne leur révolution, c'est que celle-ci leur a été volée par les pétro-monarques et plus particulièrement par celui du Qatar qui a joué un grand rôle agressif pour imposer les Frères musulmans, ses protégés, en les finançant et en leur faisant une propagande inégalée grâce à sa chaîne de télévision Al-Jazira.
Al-Sissi un vainqueur piégé
D'ailleurs, à voir les résultats des élections présidentielles d'Egypte commentés par Al-Arabia, chaîne des Ibn Saoud, et par Al-Jazira, chaîne de l'émir du Qatar, on ne peut que constater la quasi-«jubilation» des journalistes de la première et l'amertume voire l'aigreur de ceux de la seconde!
L'une et l'autre invoquant les règles démocratiques et les droits de l'homme, respectés pour la première, bafoués pour la seconde... alors que les deux sont les porte-paroles de deux régimes monarchiques absolus, ne pratiquant ni la démocratie et ne respectant pas les droits de l'homme! Grotesque mais rageant de la part de ces donneurs de leçons!!
Le comble est que le général Al-Sissi rejetait violemment l'islamisme des Frères musulmans mais semble admettre celui du parti Nour qui lui apporte son soutien... alors que ce parti salafiste est né du néant par la magie des pétrodollars des Ibn Saoud pour contrer Morsi, le poulain de leur frère ennemi, l'émir du Qatar.
Mais a-t-il le choix, lui que les Ibn Saoud soutiennent et auquel ils promettent une aide financière triple de celle des Etats Unis, qu'Obama menaçait de suspendre? En échange de quoi, ils exigent de lui de neutraliser, voire d'exterminer les Frères musulmans devenus trop dangereux pour eux.
Et voilà Al-Sissi piégé: car s'il a combattu les Frères musulmans de peur de l'islamisme qu'ils veulent diffuser dans la société égyptienne, il n'échappera pas pour autant à celui des Ibn Saoud, qui prendront le relais pour diffuser leur poison: un wahhabisme pur jus, pur et dur, puisqu'ils sont les détenteurs officiels de cette doctrine.
Une révolution inachevée
Si l'Egypte a réchappé à la catastrophe, il est certain que la révolution des égyptiens a le goût amer... celui d'une révolution inachevée par la faute des bédouins d'Arabie qui se sont invités avec fracas dans «le printemps arabe» pour avorter toutes les révoltes dans les républiques et toutes les révolutions, de peur de la contagion qui leur coûterait leur trône!
On ne peut que dire patience aux Egyptiens: s'il ont échappé au cauchemar islamiste, il leur reste encore à refaire une autre révolution pour parachever la première, au cas où Al-Sissi tomberait dans les mêmes travers que ceux des deux tyrans qu'ils ont dégagés: Moubarak et Morsi !
Il faut aussi constater que le peuple égyptien, tenu depuis des siècles dans l'ignorance par des régimes corrompus, n'était pas suffisamment éclairé pour faire un choix sage. Il était sûr qu'il tomberait soit sur la dictature des Frères musulmans, la pire à tous égard, soit sous celle des militaires.
Tant que l'instruction ne se développera pas largement dans ce pays (et il y a beaucoup à faire!), on ne doit pas s'attendre à autre chose.
Al-Sissi sera-t-il assez patriote pour s'associer à la société civile en vue d'oeuvrer ensemble à développer son peuple et à l'instruire pour le soustraire à l'obscurantisme islamiste qui le menace?
On ne peut que l'espérer, sans grandes illusions.
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