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Malgré la volonté des pouvoirs publics et les approches plus ou moins fructueuses dans le passé, le partenariat économique entre les États-Unis d’Amérique et la région du Maghreb arabe est resté timide. Les Américains prennent les choses en main...


Après l’échec à plusieurs reprises, et pour des raisons diverses, du renforcement des liens économiques et des échanges commerciaux, les États-Unis donnent aujourd’hui l’impression de préparer un «forcing» sur le marché du Maghreb arabe.
La visite de José W. Fernandez, secrétaire d’Etat américain adjoint chargé des Affaires économiques, de l’Energie et du Commerce, à quatre pays de la région (respectivement, l’Algérie, la Tunisie, la Libye et le Maroc), le lancement le 1er décembre à Alger du Partenariat nord-africain pour les opportunités économiques (Napeo) et la récente Conférence EU-Maghreb sur l’entreprenariat ne peuvent être conçu que sur cette logique.
M. Fernandez, le plus haut responsable économique américain à visiter la Tunisie depuis trois ans, était à Tunis pour promouvoir le Napeo et prospecter les possibilités d’investir dans un marché vaste et encore assez vierge.

«Forcing» à l’américaine
fernandezM. Fernandez a reconnu devant la presse tunisienne que les «sociétés américaines n’ont pas pénétré comme il le fallait la région». Soulignant que son gouvernement tient énormément à «améliorer les échanges commerciaux avec la Tunisie», le responsable américain a fait savoir que toute initiative sera basée sur un partenariat privé-public (Ppp), la formule qui plait (évidemment) le plus aussi bien aux décideurs politiques qu’aux investisseurs américains.
De ce fait, la stratégie qu’adoptera le gouvernement des États-Unis à cet effet sera typiquement américaine. Un think-tank de renom, l’Aspen Institute, et Intel, le géant des Gpu, seront des partenaires à plein temps de l’initiative.


Au milieu, de gauche à droite : MM. Gordon Gray, l’ambassadeur des Etats Unis à Tunis, et José W. Fernandez au cours de la conférence de presse à Tunis, le 3 décembre.

Aspen s’occupera de la gestion quotidienne (le «secrétariat», selon Fernandez) et apportera son expérience en matière de Ppp. Intel apportera son savoir-faire dans le domaine de l’encadrement et de la formation des formateurs.
La Conférence d’Alger, la première d’une série de conférences annuelles sur l’entrepreneuriat, «vise à renforcer les capacités des entrepreneurs à travers des ateliers de formation et des opportunités de réseautage», souligne Fernandez.
«Les États-Unis soutiennent cette initiative par l’identification des intervenants principaux, des participants et des entrepreneurs américains qui pourront aider à faire progresser nos objectifs communs de partenariat économique pour l’entreprenariat, l’innovation et la création d’emploi dans le Maghreb».

Problème culturel plutôt qu’économique
Les peuples des pays du Maghreb, les marchés aussi, ne veulent aujourd’hui que du concret. Marre des promesses et des discours politiques peu applicables, voire inapplicables, sur le terrain.
«Nous n’avons pas d’idées reçues, réplique José Fernandez. Nous sommes ouverts aux propositions du gouvernement tunisien et nous ne visons que la création d’emplois ainsi que le développement des échanges commerciaux».
Il poursuit: «Notre but est de créer des emplois. Aussi bien au Maghreb qu’aux États-Unis ».
Les États-Unis sont le sixième partenaire commercial de la Tunisie. «Ce n’est pas mauvais, estime Fernandez, mais nous espérons faire beaucoup mieux».
Gordon Gray, l’ambassadeur américain à Tunis, a rappelé à l’occasion les efforts déployés par son gouvernement et par les services de son ambassade dans le but de «convaincre les sociétés américaines de venir investir en Tunisie et dans la région en général».
Cependant, il faut faire face à un problème culturel, souligne Fernandez. «Les sociétés américaines se contentent généralement du marché américain et celles qui s’intéressent à l’export ne représentent que 1% uniquement, dont la moitié vers un seul pays, le Mexique». Étonnant, mais c’est la réalité.
Ceci dit, les Américains sont conscients qu’il faudra désormais se concentrer sur ce qu’ils savent faire le plus. «Le Maghreb accuse un manque énorme dans l’infrastructure. Il constitue donc un marché grandiose pour nos sociétés de travaux publics et de construction, pionnières mondiales dans le secteur. Nous devons d’abord les convaincre de venir y investir».

Cette fois serait-elle la bonne?
Les États-Unis sont-ils cette fois-ci sérieux dans leurs efforts d’investir dans les pays du Maghreb? L’initiative est-elle venue au moment opportun ou est-ce que les Américains sont en retard par rapport à leurs concurrents (économiques et politiques) potentiels dans la région?
«Les investisseurs européens et arabes (des pays de la Conseil de coopération du Golfe (CCG) ne nous font pas peur, nous dit M. Fernandez. Nos sociétés sont capables de faire face à n’importe quel genre de concurrence dans la région».
Leur volonté, et des techniques de prospection adaptées à la réalité et l’histoire du Maghreb, suivront-elles ? Wait and see !

M. T.

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