Le tribunal de Premier instance de Tunis a condamné Abdelaziz Jeridi, directeur du journal ‘‘Kol Ennas’’, à 4 mois de prison ferme et à une amende de 10.000 dinars.


M. Jeridi a été condamné pour des faits de diffamation à l’encontre de son confrère Mohamed Krichen, journaliste vedette d’Al-Jazira. Le patron de ‘‘Kol Ennas’’ et ‘‘Al-Hadath’’ avait pris l’habitude, au cours des dix dernières années, et à la demande des appareils sécuritaires de l’ex-président Ben Ali, de diffamer M. Krichen dans des articles dignes d’une presse de caniveau.

Dans une conférence de presse, le 15 avril, au siège de l’Instance nationale pour la réforme de l’information et de la communication (Inric), à Tunis, Mohamed Krichen avait affirmé que le premier article diffamatoire de M. Jeridi à son égard a été publié en 1989 par le journal ‘‘Les Annonces’’. Le journaliste d’Al-Jazira a eu droit depuis à une dizaine d’autres articles tout aussi calomnieux, dans ‘‘Al Hadath’’ et ‘‘Kol Ennas’’, du même Jeridi. «Tout les ans ou tout les deux ans, j’avais droit à un article diffamatoire dans ces journaux, avec mon nom, ma photo et parfois une caricature me présentant dans diverses postures. Je suis attaqué en tant que journaliste d’Al-Jazira et je suis souvent décrit comme l’un des dirigeants d’un dangereux groupe terroriste appelé Al-Jazira et, à ce titre, attaqué par des missiles journalistiques», a ironisé M. Krichen. Le dernier article en date était paru le 1er janvier dernier à deux semaines de la fuite du président déchu. Dans ces écrits, dont plusieurs portaient la signature du patron de presse, le journaliste était traité tantôt de «traître» tantôt «d’agent des islamistes».
Le prévenu menait une campagne de dénigrement également contre les défenseurs des droits de l’Homme et les opposants. Après la chute du régime de Ben Ali, il avait fait son mea culpa en pleurant sur le plateau d’une chaîne de télévision privée, avançant que les articles incriminés lui parvenaient directement du ministère de l’Intérieur. Mais au cours du procès, il s’est gardé de nommer les services ou les personnes qui lui faisaient parvenir les articles diffamant qu’ils publiaient sous sa signature. «Il avait eu des promesses de la part de certaines parties qu’il n’aurait pas de peine de prison s’il ne citait pas les noms de ses commanditaires. La peine de prison ferme a montré que la justice est aujourd’hui indépendant», a expliqué Me Chawki Tabib, avocat de M. Krichen.
Ce dernier s’est déclaré «satisfait» de ce jugement qu’il considère comme «un signe positif quant au recouvrement par la justice de son intégrité». «C’est aussi un message rassurant qui signifie que nul ne pourra désormais bénéficier de l’impunité en cas d’atteinte à l’éthique de la profession journalistique», a-t-il dit l’Associated Press.
«Avant le 14-Janvier, les plaintes contre les éditeurs des journaux spécialisés dans la diffamation des adversaires de Ben Ali n’étaient même pas retenues par les tribunaux. Car ces éditeurs émargeaient sur les services de l’ex-dictateur et bénéficiaient d’une sorte d’immunité. Ils étaient protégés par le régime et les juges n’osaient même pas retenir les plaintes qui étaient déposées contre eux», a expliqué le journaliste d’Al-Jazira au cours d'une conférence le 16 avril à Tunis. Il a donc dû attendre la chute de l’ex-dictateur et protecteur de Jeridi pour intenter un procès contre ce dernier devant une justice tunisienne enfin indépendante.

Imed Bahri

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Il est notamment accusé de complot contre la sécurité de l'Etat, homicide prémédité et trafic et usage de stupéfiants.
Dans un premier temps, la justice s’intéressera à une affaire portant sur «la découverte d'armes et de drogues dans le palais présidentiel de Carthage», a précisé le ministère tunisien de la Justice. La suivante portera sur les 27 millions de dollars en liquide découverts en février par la commission anticorruption dans un palais de Sidi Dhrif, à Sidi Bou Saïd, dans la banlieue nord de Tunis.
Depuis le 14 janvier, l’ex-chef d’Etat n’a fait aucune apparition publique. Il était toutefois sorti de son silence le 6 juin dernier, qualifiant de «mascarade», par l’intermédiaire de son avocat français Jean-Yves Le Borgne, le procès instruit à son encontre à Tunis et les perquisitions menées dans ses bureaux. Selon lui, «les perquisitions effectuées dans ses bureaux officiels et personnels ne sont que des mises en scène destinées à le discréditer» et «le procès que la Tunisie instruit à son encontre n’est qu’une mascarade dont le seul sens est d’illustrer une rupture symbolique avec le passé». L’ex-président affirmait également par le biais de son conseil parisien «qu’il ne possède ni biens immobiliers ni avoirs bancaires en France, non plus que dans un autre pays étranger».
Selon le ministère de la Justice, les enquêtes en cours visant le couple Ben Ali, sa famille et d’anciens ministres et responsables du régime déchu concernent des cas d’homicides volontaires, abus de pouvoir, malversation, trafic de pièces archéologiques, blanchiment d’argent et violation de la réglementation sur les marchés publics.
Plusieurs pays européens ont gelé les avoirs de l’ex-président tunisien et ceux de sa famille, qui s’était considérablement enrichie pendant ses 23 ans de pouvoir.