Pourquoi Belgacem Ferchichi a-t-il été arrêté et interrogé pendant deux heures par les douanes françaises à l’aéroport d’Orly? Les versions de l’intéressé, du parti Ennahdha et du ministère des Affaires étrangères sont contradictoires!
Les autorités tunisiennes ont informé, depuis des mois, plusieurs pays étrangers de la décision d’annuler la liste des Tunisiens recherchés sous l’ancien régime, a indiqué, jeudi, dans un communiqué, le ministère des Affaires étrangères.
Ces personnes ne doivent plus être soumises aux mesures de contrôle et d’interdiction d’entrée ou de transit dans les pays étrangers, non émises par la justice tunisienne.
Réactualiser les listes des personnes recherchées
Cette décision intervient à la suite «de l’arrestation de citoyens tunisiens, de personnalités nationales et de hauts cadres de l’Etat lors de leurs passages par plusieurs postes de transit du fait que leurs noms figurent dans les fichiers des personnes recherchées considérées comme des opposants politiques au régime en place en Tunisie avant la révolution du 14 janvier 2011».
Le ministère, qui ne donne pas de précisions sur l'identité des personnalités interpellées, explique que des contacts sont actuellement entrepris avec ces pays pour l’actualisation de la base de données relative à cette question et ce afin d’éviter que «pareils incidents déplorables ne se reproduisent à l’avenir et de préserver les droits et la dignité des Tunisiens».
Les précisions du ministère des Affaires étrangères interviennent à la suite d’une information publiée dans certains médias tunisiens à propos de l’arrestation, dimanche dernier, à l’aéroport de Paris-Orly d’un militant du parti Ennahdha et conseiller auprès du chef du gouvernement Hamadi Jebali.
L’information a été révélée par un journaliste français Allain Jules qui, se référant à des sources douanières et policières françaises, affirme que «Belgacem Ferchichi transportait illicitement des fonds». Le dirigeant d’Ennahdha (au pouvoir) aurait été arrêté durant deux heures à l’aéroport Paris-Orly alors qu’il débarquait d’un avion en provenance de Riyad (Arabie Saoudite).
Mandat d’amener d’Interpol ou «contrôle de routine»?
Selon une mise au point publiée samedi 18 août sur son site officiel, Ennahdha a expliqué que «Belgacem Ferchichi avait passé plus d’une vingtaine d’années en tant qu’exilé politique à Paris et avait fait l’objet d’un mandat d’amener lancé par Interpol à la demande de l’ancien régime, lequel mandat n'a pas été annulé».
Ennahdha dément les informations relayées par les réseaux sociaux sur les raisons de l’arrestation qu’elle a qualifiées «d’allégations visant à ternir l’image d’un militant».
Tout cela aurait pu avoir un sens – le démenti d’Ennahdha et le communiqué très actuel et très opportun du ministère des Affaires étrangères – si l’intéressé, M. Ferchichi en l’occurrence, n’avait pas démenti lui-même, vendredi, sur Express FM, son parti et son gouvernement, en affirmant que son nom ne figurait pas sur une liste de personnes recherchées émises par l’ancien régime via Interpol. M. Ferchichi s’en est pris aux médias qui ont diffusé les informations relatives à cette affaire sans démentir formellement les allégations selon lesquelles il transportait des fonds. Simple omission? Sans doute. Son arrestation aurait été, selon ses termes, «un simple contrôle de routine».
«Contrôle de routine» infligé à un responsable étranger muni d’un passeport diplomatique? Peut-être bien, sauf que l’on ne sait plus qui croire, M. Ferchichi ou son parti? En d’autres termes: entre les deux il y a forcément quelqu’un qui ment: lequel?
Seules, finalement, les autorités françaises peuvent donner la version exacte des faits. Pourquoi se taisent-elles? Raison d’Etat?
I. B.
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