Puisqu’on veut indemniser les victimes de la dictature de Zaba, ne doit-on pas penser aussi aux victimes qui ont payé de leurs vies les dérives terroristes du mouvement islamiste Ennahdha?
Par Tarak Arfaoui
Le jackpot du terrorisme «halal» (licite) est bien d'actualité en Tunisie. La polémique engendrée par la discussion autour du dédommagement matériel des victimes de la dictature de Zaba me laisse vraiment perplexe, tant elle est teintée d’hypocrisie et de mauvaise foi.
Militants politiques ou mercenaires?
En effet, grâce à Ennahdha, le militantisme politique est devenu sous nos cieux une véritable entreprise juteuse que l’on peut assimiler, en pesant bien les mots, à du mercenariat noyé pour la circonstance, pour être facilement avalé par le contribuable qui va payer des centaines de millions de dinars, dans une véritable potion de culpabilisation, de pitié et de martyrisation.
Mais en parlant de victimes, puisque le sujet est d’actualité, a-t-on pensé aux victimes des soi-disant victimes de la dictature qui ont payé de leurs vies les dérives terroristes du mouvement islamiste Ennahdha? La question, éminemment morale, qui se pose ouvertement est la suivante: peut-on dédommager matériellement les criminels et ignorer les victimes?
Ce sujet d’une gravité extrême gêne au plus haut point les dirigeants d’Ennahdha qui, sans présenter officiellement des excuses à leurs victimes ont eu, pour certains d’entre eux, l’honnêteté de reconnaitre officiellement leurs méfaits. Me Abdelfattah Mourou, l’un des fondateurs du Mouvement de tendance islamiste (Mti), ancienne dénomination d’Enahdha, en fait d’ailleurs un point d’honneur. Si tel est le cas, Ennahdha a le devoir absolu de dédommager les victimes de ses actes criminels et aussi le devoir de se la boucler définitivement sur le dossier des dédommagements des victimes de Zaba. Et encore faut-il que la justice joue vraiment son rôle dans ce cas précis.
Basses manœuvres de diversion
A ma connaissance, aucun procureur digne de ce nom n’a jusqu’à présent ouvert ce dossier brulant. Il est inadmissible dans la Tunisie post révolutionnaire que des criminels se pavanent aux devants de la scène politique en occupant des postes de grande responsabilité, sans rendre compte de leurs actes à qui que ce soit, en ayant en plus le culot de donner des leçons de morale à leurs détracteurs. Il n’est pas facile d’effacer complètement de notre mémoire collective les actes criminels des islamistes qui essayent par de basses manœuvres de diversion de noyer le poisson dans l’eau en les attribuant aux milices de Zaba alors que tous les éléments de l’enquête prouvent indiscutablement que la planification, la logistique et l’exécution des attentats de Sousse, de Monastir et de Bab Souika dans les années 1980-1990 sont bien planifiés par des dirigeants d’Ennahdha. L’islam, la morale, la civilité et j’en passe ne laissent indiscutablement aucune place à la justification de ces actes.
Un dédommagement moral suffit
Quant au dédommagement des victimes de Zaba, il devrait être surtout moral, par la reconnaissance officielle et solennelle de l’Etat de ses dérives, et la reconnaissance matérielle, comme cela se fait partout dans le monde, des sacrifices des victimes sous forme de priorités sur le marché du travail, de prestations sociales gratuites comme, par exemple, les soins de santé, de la couverture sociale, du transport et de l’enseignement. Tout autre dédommagement matériel serait vraiment indigne des sacrifices consentis par ces militants qui n’ont été mandatés par personne.
Hammma Hammami, leader du Parti des travailleurs avait parfaitement résumé la situation en affirmant que le meilleur dédommagement qu’il avait reçu pour ses quarante années de combat contre la dictature était bel et bien la chute de la dictature de Ben Ali, et rien d’autre.
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