La constituante Nadia Chaabane est indignée par la poursuite de l’application de la circulaire Mzali qui remonte à 1981 et qui contraint les cafés et restaurants à fermer durant les horaires du jeûne, pendant ramadan.
A chaque ramadan, cette fameuse circulaire fait parler d’elle. Cette année encore, l’Association tunisienne de soutien des minorités (ATSM) a appelé les autorités à ne plus l’appliquer et l’Association des libres penseurs (ALP) va manifester dans une semaine contre la fermeture des cafés et des restaurants pendant la journée.
C’est au tour des politiques de s’intéresser aussi au sujet. Pas tous, mais quelques uns. Plutôt rares. Les plus courageux parmi eux et les moins opportunistes. C’est le cas notamment de Nadia Chaabane qui a fait part de son étonnement face à la poursuite de l’application de ce texte de loi obsolète et qui est en contradiction avec la constitution.
Selon Mme Chaabane, la circulaire Mzali ne devait plus être appliquée, étant donné que l’ancien président de la république, Habib Bourguiba, avait, à l’époque de sa promulgation, ordonné aux autorités de ne pas l’appliquer. Cette décision a été prise par l’ancien chef d’Etat, suite à une forte mobilisation populaire contre ce texte.
«Aujourd’hui, la réglementation à ce sujet semble peu claire. Est-ce-qu’on est en train d’appliquer une circulaire annulée? De plus, la constitution interdit toute circulaire qui porterait atteinte à la liberté de croyance et de conscience», a-t-elle écrit dans un post publié sur son compte Facebook, jeudi 17 mai 2018.
L’article 6 de la constitution de 2014 prévoit, en effet, que l’Etat garantit la liberté de conscience et de croyance, le libre exercice des cultes et la neutralité des mosquées et des lieux de culte de toute instrumentalisation partisane.
Ce n’est visiblement pas là le point de vue du ministre de l’Intérieur, Lotfi Brahem, qui, interrogé à ce sujet, hier, vendredi 18 mai, a cru devoir défendre l’application de ladite circulaire, en expliquant que les minorités religieuses doivent respecter le jeûne des musulmans durant ramadan, justifiant ainsi, officiellement, la fermeture des cafés et des restaurants pendant les horaires du jeûne.
«Ces minorités doivent respecter les 99% des Tunisiens qui pratiquent le jeûne. Comme nous protégeons ces minorités, celles-ci doivent elles aussi respecter les croyances de la majorité, et ce dans le cadre de l’application de la loi», a indiqué M. Brahem, contentant ainsi les islamistes, qui tiennent en lui désormais un fervent défenseur de leurs positions, et braquant contre lui les forces progressistes et libérales qui ont moyennement apprécié (c’est un euphémisme) cette maladroite intrusion du ministre de l’Intérieur dans ce qui est censé être du ressort de la conviction de tout un chacun.
M. Brahem, qui manque visiblement de sens politique, a manqué là, sans doute, une occasion de se taire.
E. B. A.
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