APOCAPDes extraits d’ouvrages, articles et entretiens du chef d’Ennahdha, parti islamiste qui domine la «troïka», la coalition actuellement au pouvoir en Tunisie… afin de mieux cerner sa personnalité et sa pensée.

Florilège réuni par Abdelwaheb Kanzari*

 Ces extraits des écrits passés de Ghannouchi ont été révélés par l’Observatoire de l’islamisation. Certains étaient jusqu’alors indisponibles en langue française. Nous les publions afin que journalistes, politiques et simples citoyens se fassent une idée plus précise de cet homme pour le moins controversé.

Sur l'apostasie:

«L’apostasie, est le reniement [de l’islam] après qu’on l’a embrassé de plein gré; un reniement, ou les formes lui ressemblant, des constantes de l’islam, tels ses dogmes, ses charia et ses rituels… Comme porter atteinte à la dignité de Dieu ou à la dignité du Prophète, l’autorisation de braver les interdits [de la chariâ] ou la négation des devoirs religieux, etc. Des versets du Coran ont énoncé à plusieurs endroits le caractère affreux de ce crime, et menacé quiconque s’en rend coupable du plus atroce des supplices, sans toutefois édicter une peine précise ici-bas. Quant à la tradition, la sunna, elle a exigé la mise à mort [conformément au hadith]: ‘‘Tuez quiconque change de religion.’’» (‘‘Les libertés publiques dans l’État islamique’’, Centre d’études de l’unité arabe, Beyrouth, 1993, p. 48).

Sur la charia comme «source principale de législation»:

«Comment ne pas stipuler l’islamité d’un chef [de l’Etat], dont la tâche essentielle est d’accomplir la religion, d’orienter la politique de l’Etat dans les limites de l’islam, d’éduquer l’oumma selon l’islam, d’être son imam pour la prière, de la prêcher ex cathedra […] et d’être pour elle l’exemple à imiter? Le Coran a tranché. Il a stipulé que le souverain devait être musulman: ‘‘Ô vous qui avez cru ! Obéissez à Dieu, obéissez au Messager et à ceux d’entre vous qui détiennent le pouvoir’’ (sourate IV, verset 59). Il est absurde, et cela revient à demander l’impossible, de demander à un non musulman d’assumer le dépôt [la magistrature suprême], de veiller sur la religion et la gestion des affaires d’ici-bas – ce qui est la fonction du chef de l’Etat –, et nous, pour la clarification théorique, nous affirmons l’islamité du chef de l’Etat. Car au niveau pratique, le pouvoir islamique que nous réclamons se trouve dans les pays islamiques, et la majorité de ceux qui y habitent sont des musulmans.»

M. Ghannouchi ajoute dans une note de bas de page: «Il est à noter que la plupart des constitutions arabes, y compris la constitution tunisienne, ont stipulé l’islamité du chef de l’Etat, il s’agit en effet d’une stipulation abusive et vide de contenu, tant que ces constitutions ne contiennent pas d’articles imposant la chariâ comme source principale de toute législation, et tant qu’elles ne contiennent pas non plus d’institutions constitutionnelles contrôlant la constitutionalité des lois. Aussi bien le chef de l’Etat lui-même et le degré de son engagement à respecter, dans sa vie publique et privée, la loi et les normes morales, pour ne pas donner le mauvais exemple de ce qui ne plaît ni à Dieu, ni à ses créatures soumises.» (‘‘Les libertés publiques dans l’État islamique’’, Centre d’études de l’unité arabe, Beyrouth, 1993, p. 54)

Sur la laïcité :

A une question d’un quotidien algérien: «Quelle est la place de la laïcité dans la société islamique?», M. Ghannouchi répond: «La société islamique est fondée sur l’interprétation des valeurs organisant la vie des individus et des communautés. De plus, elle organise le côté spirituel de ces derniers. C’est pourquoi on ne saurait concevoir de société islamique laïque, ou de musulman laïc que si ce n’est en renonçant à ce qui est essentiel en islam. Car la foi en Dieu n’est pas essentielle en islam; l’essentiel, c’est la foi en l’unicité de Dieu. Par conséquent, toute législation qui s’inspire d’autres sources pourrait porter atteinte à cette unicité. Une société ne saurait être islamique qu’à condition de ne pas être laïque et d’accepter l’unicité de Dieu.» (Interview à ‘‘Algérie Actualité’’, du 12 octobre 1989).

Critiques des anciens manuels de philosophie pour le baccalauréat:

«L’enseignement de la philosophie devient, si nous ne définissons pas notre appartenance culturelle, non seulement inutile pour traiter les problèmes dont nous souffrons, mais aussi un élément de sabotage et de destruction dans le domaine psychologique et social, comme c’est le cas aujourd’hui [1989].» (‘‘La génération perdue’’, revue ‘‘Forqan’’, février 1989, Casablanca).

La groupie de Youssef El-Qaradhawi:

Ghannouchi a donné une interview à un site internet, où il encense un cheikh connu pour enseigner le meurtre des apostats et des homosexuels, partisan des attentats du Hamas contre des civils israéliens, en le qualifiant ainsi: «Le savantissime prédicateur le cheikh Youssef El-Qaradhawi» (‘‘J’ai voué ma vie à la défense de la liberté’’, ‘‘Ashihab’’, interview conduite par Ala Iddin Al-Rachi, 5 octobre 2005).

Youssef El-Qaradhawi, ami intime de Said Ramadan (père de Tariq, mort en 1995), est sûrement le cheikh contemporain le plus influent du monde sunnite. Voici ce qu’a affirmé Qaradhawi le 28 janvier 2009 sur Al-Jazira TV: «Tout au long de l’histoire, Allah a imposé aux [Juifs] des personnes qui les puniraient de leur corruption. Le dernier châtiment a été administré par Hitler. Avec tout ce qu’il leur a fait – et bien qu’ils [les Juifs] aient exagéré les faits–, il a réussi à les remettre à leur place. C’était un châtiment divin. Si Allah veut, la prochaine fois, ce sera par la main des musulmans. (…) Pour conclure mon discours, je voudrais dire que la seule chose que j’espère est qu’à l’approche de la fin de mes jours, Allah me donne l’occasion d’aller sur la terre du djihad et de la résistance, même sur une chaise roulante. Je tirerai sur les ennemis d’Allah, les Juifs, et ils me lanceront une bombe dessus et ainsi, je clorai ma vie en martyr. Loué soi Allah, Roi de l’univers. Que la miséricorde et les bénédictions d’Allah soient sur vous.»

M. Ghannouchi est membre du Conseil européen de la fatwa et de la recherche que Qaradhawi préside, institution de production juridique de l’Union des organisations islamiques d’Europe, dont l’Uoif est la branche française. Vu l’âge et la santé chancelante de Qaradhawi, Ghannouchi est devenu le président de fait.

Sur une visite de Jean-Paul II en Tunisie en 1996:

A propos de la visite officielle du Pape Jean Paul II en Tunisie en avril 1996, M. ghannouchi écrivit : «Ce qui me transperce le cœur aussi que le cœur de tout Tunisien c’est que la visite du chef d l’Eglise catholique coïncide avec la réception du représentant commercial de l’entité sioniste à Tunis; que comprennent les Tunisiens de tout cela? Peuvent-ils chasser de leurs esprits qu’il y a une invasion croisée et sioniste de leur pays?» (entretien à l’hebdomadaire islamiste marocain ‘‘Arraya’’ du 23 avril 1996).

* Docteur es-Mutations internationales et Adaptations régionales.

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