Malgré les complicités dont ils ont bénéficié, souvent au sommet de l'Etat, les jihadistes n'ont aucune chance de faire triompher leur culture de la mort en Tunisie.
Par Tarak Arfaoui
La Tunisie a connu tout au long de son histoire divers fléaux qui l'ont frappée de plein fouet et dont elle est sortie finalement indemne du fait de l'extrême solidité de son assise sociale façonnée par de multiples civilisations qui se sont incrustées dans le pays, de flux ethniques divers qui ont abouti au développement d'une nation dont la «tunisianité» avec toutes ses particularité est le label exclusif. Cette «tunisianité» a de tout temps constitué le socle indestructible de notre pays et le rempart infranchissable face à toutes les tentatives d'aliénation et d'acculturation.
Misérables complices et pitoyables comparses
Après la vérole, la peste, le cholera et les invasions de criquets, le terrorisme, sous couvert de jihadisme islamiste, ce fléau abject, qui frappe actuellement notre chère patrie et qui n'a rien d'endémique, n'a pu se développer par les exactions des criminels qui en sont la principale incarnation, sans la connivence de misérables complices et de pitoyables comparses
Ceux qui, au nom de l'islam, assassinent leurs compatriotes et les égorgent de sang froid, ceux qui appuient sur la gâchette ou le détonateur, sont bien sûr les principaux coupables mais aussi, en fin de compte, le dernier chainon de tout un système dont la haine, l'ignorance, l'étroitesse d'esprit et l'intolérance sont le label unificateur.
L'organisation terroriste des Ansar Charia, désignée comme le principal commanditaire des actes terroristes qui secouent actuellement le pays, n'est rien qu'un pantin dont les commandes sont manipulées par des forces politiques réactionnaires dont le but est d'imposer aux Tunisiens une idéologie obscurantiste importée du Moyen-Orient. Les coupables sont évidemment désignés par ces minables créatures que sont les Kamel Gadhgadhi, Abou Baker El Hakim, Abou Iyadh et quelques autres tristes personnages, mais qu'en est-il, en fait, de leurs complices et autres comparses qu'il faut avoir le courage de dénoncer du fait leur implication manifeste dans cet imbroglio terroriste?
Les complices sont évidemment tous ceux qui, par leur prise de position publique, leurs discours univoques et leurs encouragements matériel et moral ont contribué à instaurer un climat de haine sociale dans le pays. Sans cette complicité, la tâche serait très ardue pour les criminels.
A tout seigneur tout déshonneur, je citerai en premier lieu les apparatchiks du parti islamiste Ennahdha et à leur tête leur gourou Rached Ghannouchi dont les tunisiens n'oublieront jamais le discours scélérat et ignoble qu'il avait tenu, enregistré à son insu, à des responsables salafiste en 2012 . C'était un discours sans aucune ambiguïté pour encourager ces groupuscules «à mieux s'organiser à être patients et pragmatiques», à se «regrouper dans des camps et à s'entrainer en attendant des jours meilleurs». Il les a qualifiés de ses «propres enfants augurant d'une nouvelle culture», ajoutant qu'il faille protéger.
Les «protecteurs» d'Abou Iyadh
Les Tunisiens n'oublieront jamais la lâcheté de Ali Larayedh, du temps où il était ministre de l'Intérieur, quand il avait ordonné à ses troupes de laisser filer Abou Iyadh, terroriste de premier plan, sur le point d'être arrêté à la mosquée El-Fath de Tunis, ni ses encouragements déguisés aux troupes d'Ansar Charia pour leur permettre d'attaquer l'ambassade des Etats-Unis, ni son extrême laxisme dans l'enquête sur l'assassinat de Chokri Belaid, ni sa désinvolture dans la protection de Mohamed Brahmi qu'il savait menacé d'exécution par les salafistes.
Les tunisiens n'oublieront jamais les accolades publiques chaleureuses de l'ex-ministre des Affaires religieuses Noureddine Khademi avec Abou Iyadh, ni les meetings populaires des députés d'Ennahdha Sadok Chourou et Habib Ellouz, assis à la tribune côte-à-côte avec ce même terroriste, ni leurs encouragements publics à tous ceux qui vont se faire massacrer en Syrie.
Les Tunisiens n'oublieront jamais les envolées enflammées du député islamiste Sahbi Atig à l'avenue Bourguiba qui, mégaphone à la main, haranguait les foules en réclamant le devoir du sang envers les déviants.
Les Tunisiens n'oublieront jamais les esquives et dérobades du ministre islamiste Samir Dilou, qui noyait le poisson dans l'eau bénite de la charia jusqu'à nier même l'existence des groupes terroristes en Tunisie.
Les tunisiens n'oublieront jamais les exactions des Ligues de protection de révolution (LPR), ce ramassis de délinquants récupérés par les islamistes, contre la société civile et certains partis politiques et leur extrême violence en totale connivence avec les salafistes.
Les complices des terroristes ce sont aussi quelques figures de proue du Congrès pour la république (CpR) et du Wafa avec à leur tête le député hurluberlu Abderraouf Ayadi qui ne rate pas une occasion pour glorifier les extrémistes religieux et pour les défendre sous couvert de militantisme politique.
A côté de ces dérives extrêmement graves révélant la collusion évidente d'une certaine classe politique avec les extrémistes religieux, d'autres personnes ont, d'une manière ou d'une autre, encouragé leurs exactions soit par leur mansuétude, leur mollesse ou leur indifférence, soit par de vilains calculs politiques.
Ces comparses se retrouvent à tous les rouages de l'Etat et premier lieu au niveau de la plus haute autorité du pays, en l'occurrence la présidence de la république. Le président provisoire Moncef Marzouki, l'histoire le retiendra, est assurément le premier comparse des terroristes. En effet, dès son «élection» (sic !) sous couvert de militantisme «droit de l'hommiste» dont il fait son fond de commerce, il a immédiatement amnistié tous les criminels qui ont le sang tunisien sur les mains et qui, dès leur élargissement, ont aussitôt repris les armes contre leurs concitoyens. Il a aussi grandement ouvert les portes du palais de Carthage, symbole de la république, en recevant, dans le salon d'honneur s'il vous plait, toute la racaille extrémiste et salafiste qui dénie la république et ses institutions. Il n'a pas hésité, tout dernièrement au mont Chaambi, à promettre une totale amnistie à ceux qui déposeraient les armes!
Marzouki déploie le tapis rouge à la racaille extrémiste.
M. Marzouki n'a jamais eu une attitude ferme et intransigeante vis-à-vis du terrorisme, celle d'un vrai chef de guerre qui a entre les mains le destin de tout un pays.
Cette léthargie au sommet de l'Etat s'est vite propagée à certains de ses rouages vitaux, à savoir les ministères de l'Intérieur et de la Justice, et au niveau de la douane.
Sans tremper directement dans le terrorisme, ces comparses, de part leur attitude négative faite de désinvolture, de nonchalance pour certains et d'opportunisme pour d'autre n'ont fait que donner un coup de pouce aux criminels de tout bord
Ce bien triste constat étant établi, cela ne m'empêche pas d'être optimiste. Malgré ces soubresauts circonstanciels qui secouent notre pays et quel que soit l'appui dont il bénéficie, le terrorisme ne passera pas en Tunisie. L'intégrisme, le jihadisme, le wahhabisme et tous les «ismes» rétrogrades importés du Moyen-Orient et d'ailleurs, du fait de notre «tunisianité» si particulière, n'ont aucune chance de se développer; la culture de la mort ne vivra pas en Tunisie !
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